Chapitre 7 de notre saga de l’été
Si l’on ne devait garder qu’un seul cliché, c’est peut-être celui-ci qui resterait ! A quoi tient-il ? Sûrement plusieurs choses… dont des vérités. Mais pour un visiteur étranger, la distance préjugée des Suédois est d’abord un mythe car ceux-ci s’expriment tous dans un anglais quasiment parfait, ce qui en fait des interlocuteurs aisés ! En effet, n’importe quel inconnu rencontré dans la rue pourra tenir une conversation, au point que l’on oublie presque évoluer dans un pays dont seuls une vingtaine de mots nous sont (presque) accessibles !
Une fois encore, il n’est pas question de généraliser à partir de ma seule expérience. Cependant, les rencontres que j’ai pu faire furent toutes très chaleureuses. Les Suédois apprécient beaucoup la culture française dont ils louent le chic et le raffinement… Un de leurs préjugés à eux ?
La rationalité des Suédois peut se retrouver jusque dans l’approche même de ce concept. Ils sont plutôt prompts à se livrer à une analyse de leur culture et mettent en avant leur éducation aux émotions. Beaucoup de parents sont très loquaces sur la psychologie de leurs enfants : ils identifient leurs traits de caractère, les phases psychologiques par lesquels ils passent… L’interdiction de tout comportement à tendance violente envers les enfants aurait apparemment favorisé la discussion avec les enfants, et par voie de conséquence, l’écoute qui leur est accordée.
Au département « enfants » de l’école de design locale, beaucoup de projets de fin d’année font la part belle au bien-être de l’enfant et à la gestion de ses émotions : plafond apaisant pour une chambre d’hôpital, cabane rassurante (ci-dessus), marionnettes pour faire s’exprimer les membres de la famille…
« Je ne demande pas à mes enfants pourquoi ils pleurent, mais ce qu’ils ressentent quand ils pleurent », m’explique un père pour illustrer cette éducation aux émotions. A cause de la barrière de la langue, je n’ai pas accès à la réalité du discours qui est tenu par les enseignants à leurs élèves durant la classe. Je ne peux que constater la relative douceur du ton et la fréquence du chuchotement… sûrement encouragés par l’effectif des classes ! En effet, vingt-cinq élèves pour deux enseignants (ou un enseignant et un assistant) reste un maximum à ne dépasser sous aucun prétexte !
Terminer l’école obligatoire, à 18 ans, est une institution à laquelle aucun Suédois ne renoncerait pour rien au monde : dress code, champagne et fraises, pancartes ridicules, cadeaux par dizaines et parade en char… La cérémonie a tout du rite de passage !
Enfin, afin de relier émotions et passage des étapes de la vie, les Suédois sont très attachés aux traditions qui célèbrent la fin des différents échelons scolaires. Séjournant à Göteborg en fin d’année scolaire, j’assiste ainsi à de nombreuses cérémonies marquantes : fin de la maternelle, fin de l’école obligatoire, fin de l’université… A chaque fois, c’est toute la famille qui s’investit (humainement et financièrement) dans ces « rites de passage ». Au son tonitruant des chars d’écoliers circulant dans les rues de la ville, le cliché de la retenue des habitant fait long feu !
Ainsi, respect strict des horaires, poignée de main plutôt que bise et intimité préservée coexistent parfaitement avec les embrassades à tout va, fêtes plutôt alcoolisées et démonstration de joie dans les rues. L’école suédoise, par son attention à la personnalité et à la confiance en soi de chaque enfant, semble cultiver ce mélange subtil. Quels genres d’adultes deviennent alors des enfants ainsi éduqués ?
Eva Ruaut