Reçus au ministère le 26 juillet, les enseignants « désobéisseurs » ont défendu leur point de vue et affirmé le maintien de leur combat. Ils ont demandé notamment la levée des sanctions pécuniaires et disciplinaires qui les ont frappé. Une réponse pourrait être donnée rapidement.
« Le combat continue mais le dialogue s’est ouvert ». Interrogé par le Café, Alain Refalo, un des dirigeants du mouvement des « désobéiseurs », est satisfait d’avoir été écouté dans ce qui depuis Xavier Darcos symbolisait tous ses ennuis : la rue de Grenelle. Le 26 juillet, avec Marie-Odile Caleca, Gilles Lehmann et Annie Biancarelli, il été écouté par Yannick Tenne, conseiller technique de V. Peillon et René Macron, responsable du Bureau des écoles.
Un héritage sarkozien
Apparu sous Darcos, le mouvement des « désobéisseurs » regroupe des enseignants, très majoritairement du primaire, qui n’appliquent pas publiquement certaines directives officielles. Ils se signalent par leur refus de mettre en place une aide personnalisée séparée des cours. Ils n’appliquent pas à la lettre les nouveaux programmes de 2008. Ils boycottent les évaluations nationales de CE1 et CM2 ainsi que le livret personnel de compétences et se méfient des fichiers informatiques nationaux comme Base élèves.
Libéraux dans leur gestion, les ministres de N. Sarkozy se révèlent étatistes et autoritaires. Tous ces « crimes » idéologiques poursuivis avec zèle sous Darcos et, avec moins de hargne, sous Chatel leur ont valu des sanctions multiples. A des degrés divers selon le niveau d’ardeur de leur inspecteur, ils ont été harcelés par leur hiérarchie. Les enseignants désobéisseurs ont été écartés de certains postes pour « déviance pédagogique ». Ils ont subi des retenues sur salaire répétées. Tout un contentieux s’est glissé entre eux et l’Etat. Ils ont aussi su se défendre, faire condamner l’Etat à plusieurs reprises et populariser auprès des enseignants leur combat.
Le vent tourne
Aujourd’hui le vent a tourné rue de Grenelle. Sur bien des points, le nouveau ministre donnerait sans doute raison aux désobéisseurs. Critiquer les programmes de 2008, l’aide personnalisée ou les évaluations nationales est devenu possible ou même officiel. Tel haut fonctionnaire qui les combattait a maintenant pour mission de les recevoir…
Ils veulent de la « concertation » dans le système éducatif, un mot qui n’est pas pour déplaire à V. Peillon. « Les enseignants ont quelques raisons de nourrir de la méfiance, eu égard au peu de respect dont ils ont fait l’objet ces dernières années », estiment-ils. « Nous avons également insisté sur le fait que cette concertation devait absolument associer les enseignants de base qui sont directement concernés par l’application des orientations prévues par la loi. »
« On ne souhaite que devenir des fonctionnaires normaux qui appliquent les directives avec discernement dans la mesure où elle vont dans le bon sens », nous explique A. Refalo. « On n’a pas vocation à être désobéisseur à vie ». Les désobéisseurs ont demandé l’abandon des programmes de 2008, de l’aide personnalisée et des évaluations nationales actuelles. Ils jugent les sanctions qui les ont frappé « injustes » et demandent leur levée et la fin des pressions. Selon eux, une réponse du ministère sur ce point devrait leur arriver « dans les prochaines semaines ».
François Jarraud