Que certifie au juste le diplôme national du brevet ? Une fin de scolarité du premier cycle du collège ? Alors il faudrait compter 87% de reçus et un seul examen… Un examen d’entrée au lycée ? C’est peut-être ce à quoi correspondent les 84% de reçus. Toute l’ambivalence du brevet est dans ces deux comptabilités : taux de reçus au brevet et taux de validation du socle commun… Les résultats montrent les énormes différences qui existent à l’intérieur du collège « unique »…
Le ministère de l’éducation nationale a publié le 13 juillet les résultats officiels du diplôme national du brevet, un examen passé par la quasi totalité des jeunes Français (780 000 candidats), qui se décline en trois séries : collège (89% des inscrits), technologique (4%) et professionnel (7%).
Globalement on compte 659 536 reçus soit 84,5% des candidats, un pourcentage en hausse de 1% par rapport à 2011. 65% des candidats ont obtenu une mention dont 33% « bien » ou « très bien » (+5% par rapport à 2011).
Qu’évalue au juste le brevet ?
Mais le brevet n’est plus la seule évaluation du premier cycle du secondaire. Selon le ministère, 87,5% des candidats ont validé le socle commun. Car depuis 2009, les élèves doivent aussi valider le socle commun de connaissances et compétences établi par la loi de 2005. Le ministère n’a pu ignorer la loi de 2005 qui installait le socle, mais il s’est refusé à rompre avec l’examen traditionnel. On a donc cette curieuse juxtaposition qui fait coexister un examen traditionnel de connaissances disciplinaires avec une évaluation de compétences beaucoup plus larges. De surcroit, pour valider le socle, il a institué un contrôle bureaucratique où les enseignants de troisième sont obligés de valider une centaine d’item pour chaque élève. Evidemment cette validation est d’une qualité très variable d’un établissement à l’autre d’autant que certains items sont très imprécis. En décembre 2011, un rapport du Haut Conseil de l’Education estimait que » dans le cas du collège, la prise en compte du socle est très variable selon les disciplines ». En 2010, le rapport Grosperrin avait été plus critique. » Le socle commun est souvent mal ou peu compris tant d’un point de vue « culturel » que disciplinaire », écrivait-il. « L’attestation qui doit le valider semblant cristalliser les réticences, voire la méfiance des enseignants ».
L’éclatement du collège
Le Diplôme national du brevet est lui-même divisé en trois séries qui anticipent sur les filières du lycée. Or les taux de réussite sont trés variables d’une filière à l’autre : 86% en série collège soit 1,5 % de plus qu’en 2011, 78,5% en technologique (-1,3%) et 65,6% en professionnel (-1,1%). On a donc une évolution divergente qui préfigure celle du bac. Dès la troisième le « collège unique » s’accommode de la mise de coté de 11% des élèves (ceux des séries professionnelle et technologique). On ne s’en étonnera pas.
L’étude de la Depp sur le brevet 2011 mettait déjà en évidence les fortes inégalités sociales dans la réussite au brevet. « L’origine sociale marque fortement le succès au brevet », écrivait la Depp. « Le taux de réussite passe ainsi de 69% à 95% selon que l’élève a un parent sans activité professionnelle ou bien cadre ». Les écarts entre académies variaient selon les filières. S’ils étaient de 11 points pour la série collège, ils étaient de 34 points pour la série professionnelle. Ces résultats éclairent la réalité des inégalités entre collèges et l’incapacité à atteindre un socle commun. Le rapport de Marco Oberti, Edmond Préteceille et Clément Rivière sur les collèges franciliens a montré que la ségrégation scolaire dans les collèges est encore plus forte que la ségrégation urbaine !
Ces résultats dessinent l’héritage du collège unique laissé par Luc Chatel. Si le primaire est la priorité du nouveau ministre, à coup sur il a aussi du travail qui l’attend coté collège.
François Jarraud