Par Antoine Maurice
Comment, dans un premier temps, ne pas se réjouir de la parution d’un texte attendu depuis 15 ans… Evidemment, ce texte était nécessaire, tant le décalage avec celui de 1987 devenait de plus en plus important.
Rentrons dans le vif du sujet…
Tout d’abord, il est important de souligner que le texte est avant tout digeste, et gagne en pertinence et précisions dans sa forme raccourcie. Ainsi, il dessine les contours de l’évaluation du DNB pour la session 2013. Cette dernière se trouve désormais en lien avec les attentes des programmes du collège, même si quelques contradictions existent (nous y reviendrons plus tard) et surtout reste dans la lignée des évaluations aux baccalauréats. On ne peut qu’apprécier ce lien et surtout cette cohérence dans le trajet de formation de l’élève.
Quels sont les points importants à retenir ?
La note de service précise que la « note d’EPS au DNB (Diplôme national du brevet) résulte des évaluations effectuées dans trois APSA relevant de trois compétences propres à l’EPS ».
Point important et changement par rapport au premier projet d’évaluation : En effet, nous avions, en compagnie de l’AEEPS et du SNEP, souligné les grandes difficultés d’évaluer dans 4 compétences propres différentes. Il semble que, soucieux de permettre de rendre ces instructions réalisables, le législateur a pris en compte ces remarques, même s’il invite à évaluer autant que possible les quatre compétences propres de l’EPS.
Autre précision, « la note obtenue au DNB entre 0 et 20, ne correspond pas nécessairement à la moyenne des notes trimestrielles ». Laissant ainsi la place de proposer des évaluations en lien avec le projet de classe, ou d’établissement ou autre. Enfin, il convient de noter l’apparition d’un référentiel national d’évaluation, encore une fois en lien direct avec la démarche au lycée, l’EPS au collège se dote d’un référentiel qui sera sans aucun doute une aide indéniable au service des collègues et de l’évaluation dans une logique nationale de l’EPS au DNB.
Des contradictions
La note de service précise des attentes, notamment sur le fait qu’à la « fin de la scolarité au collège, chaque élève doit avoir atteint le niveau 2 des compétences attendues par le programme dans chacune des 4 compétences propres à l’EPS ». Rupture évidente avec le programme du collège qui indique que le niveau 2 de compétence doit être atteint dans au moins une APSA de chacun des huit groupes d’activités à l’issue du collège. Objectif à la baisse, mais surtout et nous l’avions déjà souligné, cette directive risque de voir disparaître un grand nombre d’activité des différentes programmations.
Par exemple, on perçoit bien les difficultés structurelles pour se rendre à la piscine, et à l’inverse, la facilité de pouvoir proposer des activités athlétiques aux élèves. Dans ce cas précis, les activités aquatiques seraient réduites dans une majorité de cas, en une simple validation du « savoir nager ».
Autre point et autre exemple, on note depuis plusieurs années les difficultés d’engager les collègues (nous avions déjà évoqué les différentes explications à cela) vers un niveau 2 en danse. Des progrès avaient notamment été soulevés avec le texte de 2008. Là encore, n’y a t’il pas un risque de diriger les collègues vers d’autres APSA. Sans parler, évidemment, de la CP4 ou les activités duelles de combat, et les sports collectifs vont être sous représentés… Et c’est donc bien la question de la classification ou de la catégorisation des APSA qui sont une fois de plus remises en cause ici.
De plus, à propos d’un référentiel national d’évaluation
Nous en avons parlé précédemment : évidemment, ce référentiel peut être perçu à la fois comme une aide non négligeable, mais il peut être également perçu comme le manque d’autonomie laisser aux différentes équipes pédagogiques… Sans oublier ou minimiser la quantité de travail qui a été nécessaire pour la réalisation de ces référentiels, on peut se questionner sur la pertinence de certains.
Par exemple, en Acrosport, un groupe est amené à passer deux fois. La seconde prestation prenant en compte les observations des juges. Les juges sont- ils là pour juger ou pour conseiller ? De plus, n’y a t’il pas un risque de perdre du sens au regard de la compétence propre qui est de réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique. Refait-on la chorégraphie en Danse ou l’enchaînement en Gymnastique.
Autre exemple en Handball, il est proposé de faire des aménagements afin de faciliter l’évaluation. Par exemple, création d’un surnombre par un engagement du but avec un défenseur en retard. N’y a t’il pas un risque de voir apparaître chez nos élèves un comportement simplement adaptatif en relation directe avec la mise en place et non suite à l’analyse et la perception du rapport de force ? Ou bien, peut on évaluer les compétences des élèves en Handball, dans une autre situation que celle d’un match ?
Evidemment la critique est facile, mais elle pose surtout la grande difficulté d’évaluer une compétence, ou plutôt de noter une compétence. Car c’est bien là que le problème réside… et sans aucun doute, les solutions sont complexes à l’image des compétences que nous devons évaluer.
La question des inaptitudes
Le texte a une nouvelle fois l’avantage d’être précis et concis concernant le contrôle adapté. Ainsi, les élèves seront évalués au DNB sur au moins deux épreuves adaptées relevant de deux compétences propres à l’EPS. Les adaptations seront ainsi proposées suite à l’avis médical et par la suite incluse dans le protocole d’évaluation, soumis à l’inspection pédagogique régionale.
Pour conclure
Il convient d’accueillir ce texte, comme un outil de travail intéressant, simple et accessible. Même s’il soulève certaines problématiques récurrentes notamment concernant les classifications et l’évaluation des compétences.
La note de service
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/eps/Documents/Note_[…]
Les annexes
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/eps/Documents/[…]
Quelles sont vos premières impressions sur le texte ?
La note de service sur l’évaluation en EPS au DNB n’est à ce jour toujours pas publiée, mais elle circule. L’inspection générale l’a envoyée aux IPR qui eux-mêmes l’ont généralement fait parvenir aux enseignants. Au titre des satisfactions : la prise en compte par la DGESCO de notre refus du projet initial dans lequel l’IG imposait deux choses pour nous inconcevables : d’une part l’évaluation de 4 APSA prises dans 4 « compétences propres », ce qui aurait mis la grande majorité des collèges en grande difficulté pratique, et d’autre part l’obligation de présenter le protocole au conseil pédagogique et au CA et de le faire valider par le chef d’établissement. Le texte présenté n’en parle plus et impose d’évaluer 3 APSA relevant de 3 « compétences propres », ce qui est plus raisonnable. Par contre il reste un certain nombre de choses, dans l’écriture, qui sont pour le moins discutables. Enfin, et surtout, les collèges sont maintenant soumis aux mêmes problèmes qu’au BAC : des « référentiels » sont joint à la note de service. Ils ont été produits dans le plus grand secret : nous n’en n’avons pas été destinataires pour discussion, pas plus que la majorité de la profession. C’est « l’anti-SNEP attitude ». Espérons que les changements politiques annoncés vaudront aussi pour l’EPS.
Vous parlez « d’originalités » discutables ! c’est à dire ?
Nous avons donc contesté l’option première de l’IG qui relevait d’un double objectif implicite. Le premier, comme ça a été le cas pour les lycées, a comme ambition de limiter ce qui est regroupé abusivement dans une entité qualifiée « d’affrontement » (Compétence Propre N°4). On considère ainsi, nous l’avons largement critiqué dans les programmes, que le tennis de table et le rugby relèvent d’une même compétence. Le second, veut profiter du DBN pour, déjà, anticiper le remodelage des programmes de 2008 encore trop jugés marqués par le SNEP (qui s’est abstenu lors du vote au CSE en 2008) puisqu’ils conservent la référence aux groupes d’activités. Le texte de la circulaire dit ainsi que « l’évaluation rend compte des acquisitions par l’élève des compétences visées dans le programme EPS : – compétences propres à l’EPS – compétences méthodologiques et sociales ».
Or les programmes disent, ce que nous soutenons effectivement, « Pour construire les compétences du programme, il est nécessaire de s’appuyer sur des activités physiques, sportives et artistiques. Pour chaque APSA, des acquisitions, appelées compétences attendues sont définies. » Autrement dit, les acquisitions, ce sont les compétences attendues. Quelques lignes plus loin dans le texte DNB, on parle pourtant des compétences attendues, mais pour là aussi changer la logique des programmes. La note de service dit : « A l’issue de la scolarité au collège, chaque élève doit avoir atteint le niveau 2 des compétences attendues par le programme dans chacune des 4 compétences propres à l’EPS ». Le programme, lui, précise : « Le niveau 2 de compétence doit être atteint dans au moins une APSA de chacun des huit groupes d’activités à l’issue du collège ». C’est la raison pour laquelle nous avions demandé que le DNB reprenne les formules du programme pour être en adéquation avec les textes existants.
Nous avons donc un texte qui, première originalité, en tout cas dans « l’esprit », n’est pas calé sur le texte de référence des programmes.
Une autre « originalité » est la façon de qualifier le contrôle du DNB. Il s’agit donc officiellement, rappelé dans la première ligne, d’un « contrôle continu » (CC). Par conséquent nous ne sommes pas dans le cas maintenant classique en EPS du « contrôle en cours de formation » (CCF). Ce n’est pas du tout la même chose dans le principe : le CC devant être réalisé comme son nom l’indique en continu et donc à n’importe quel moment. La définition du CCF correspond mieux à nos fonctionnements dans les examens car il s’agit d’une évaluation qui vient « ponctuer » un cycle d’apprentissage. Est-ce que le CC peut nous donner plus de latitude ? A voir. Mais ce qui est curieux c’est que dans l’annexe, qui comprend les référentiels, une page d’explication redit en gros ce qui est écrit dans la note mais concernant le contrôle, on peut lire que l’évaluation « s’effectue dans le cadre d’un contrôle continu réalisé en cours de formation. » Ou bien il s’agit d’un pléonasme (comment un contrôle continu pourrait-il ne pas se faire en cours de formation ?) ou bien d’une bizarrerie sémantique. Car la définition qui suit cette phrase identifie bien un CCF et non un CC. Pourquoi alors ne pas avoir utilisé le terme approprié ?
Vous identifiez plus de désaccords ?
Pour résumer à cette étape le point de vu global sur le texte : des avancées notables par rapport à la proposition initiale qui a été bien corrigée par la DGESCO et qui permettront une mise en pratique correcte, quelques problèmes d’écriture qui ne sont que les symptômes d’une difficulté à penser l’EPS d’aujourd’hui par rapport au fatras notionnel inventé dans les programmes, et 2 désaccords importants, mais de natures différentes.
Les programmes, là encore après intervention du SNEP, ne ramenaient pas la totalité des APSA programmées à la seule liste nationale, en ouvrant à une liste académique et surtout en permettant de programmer une activité qualifiée de « locale » dans les programmes. Cela permettait, pour les établissements qui avaient une culture et un environnement particulier, de ne pas perdre les acquis de leur travail, parfois « historique ». Malheureusement, la note sur le DNB ne reprend pas cette dernière possibilité. Ça n’aurait en rien perturbé à ce niveau l’exigence d’un cadre national puisque cette activité locale devait être expertisée et validée par le corps d’Inspection. Nous aurions donc souhaité que cette activité, lorsqu’elle est programmée, puisse être, logiquement, évaluée au DNB.
Le second désaccord, plus fort parce qu’il renvoie à une certaine idée du pilotage de l’EPS, porte sur la constitution des référentiels, conçus par quelques personnes et sans visibilité. L’IG dit régulièrement que « 400 » collègues sont sollicités. Ce chiffre a été repris plusieurs fois face à nos critiques. Le problème c’est que nombre d’entre eux nous ont déjà dit que leurs points de vue n’ont pas été repris… Bref, de toute façon il faut aujourd’hui inventer en EPS une tout autre procédure pour arriver, sur les programmes et les référentiels, à des « consensus provisoires » qui soient véritablement des bases communes de travail et de réflexion. La majorité des collègues vivent ces référentiels, même lorsqu’ils sont intéressants, comme un plaquage venu « d’en haut » auquel ils n’adhèrent pas. Le fait que le SNEP, qui est l’organisation qui crée du lien entre les professionnels de l’EPS, soit écarté systématiquement de la réflexion est un problème majeur. L’EPS ne gagnera rien avec de telles pratiques. Lors des nombreuses rencontres avec la profession sur ces thèmes, nous avons pu percevoir la rupture de plus en plus nette entre les enseignants et la hiérarchie pédagogique (en général, car il arrive qu’ici ou là les IPR soient en phase avec la profession. C’est tellement méritoire dans le contexte actuel qu’il faut le signaler). Ce n’est pas une bonne chose car la réussite de tous requiert un effort commun et soutenu, pas de séparer sur des critères tordus les « bien pensants » des « mal pensants ». L’autoritarisme n’est jamais une démonstration de force, c’est plutôt le symptôme d’une faiblesse mal assumée.
On pourrait penser que l’idée d’un cadre national dérange ?
Pour en revenir au DNB, que l’on ne se trompe pas sur nos propos : le SNEP soutien l’idée d’un cadre national commun pour les diplômes et examens scolaires. On pourrait dire que pour la scolarité obligatoire c’est même le minimum que l’on puisse faire. C’est la méthode que nous contestons. Vincent Peillon a annoncé la refonte des programmes dans la transparence et la concertation. Peut-être que cela va offrir à la discipline un bol d’air et une nouvelle dynamique ?
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