Censuré sous Chatel, le rapport de l’inspection générale sur l’évaluation de la politique de formation continue des enseignants de 1998 à 2009 met en évidence le quasi abandon de la formation. Le rapport souligne les baisses de crédits mais il montre aussi le grand écart entre la formation donnée et celle demandée par les enseignants.
Piloté par Alain Henriet et Marie-Hélène Granier-Fauquert, le rapport de l’Inspection générale sur la formation continue a été réalisé en octobre 2010. Depuis il dormait dans une armoire jusqu’à ce que V. Peillon le rende publique. Ce long sommeil s’explique aisément : le rapport montre un ministère qui économise sur la formation et la détourne des besoins des enseignants.
« La mission a pu faire le constat que les crédits alloués à la formation continue ont servi sur la décennie de variable d’ajustement pour réaliser l’équilibre budgétaire », notent les rapporteurs. De fait le budget affecté à la formation continue a diminué ces dix dernières années. Au primaire la baisse est de l’ordre de 10%. Elle est beaucoup plus forte dans les econdaire.De 2001 à 1009 on est passé de 35 à 15 millions d’euros ! » Le nombre de jours de formation par personne concernée est passé de 2,5 jours au début de la décennie à 1,8 jour à la fin de la décennie soit une baisse d’environ 25%. Dans le premier degré, le développement des animations pédagogiques de circonscription est venu compenser la réduction des actions de type départemental ou académique ; l’indicateur volumique est resté à peu près stable, autour de 6 jours par an, d’où le constat d’un écart significatif entre le traitement réservé aux enseignants du primaire par rapport à ceux du secondaire. »
Le rapport souligne le recours croissant à des ressources externes : formations en ligne et aussi partenaires extérieurs. » Les enseignants apprécient ce type de formation qui leur permet de sortir de l’endogamie de plus en plus marquée dans la formation continue actuelle et de prendre du recul grâce aux témoignages d’experts ou l’observation in vivo des pratiques dans une spécialité professionnelle », écrit le rapport. « La question posée est d’élargir le cercle des partenaires et surtout de caractériser la nature du lien entre l’administration (centrale ou déconcentrée) et ces prestataires, sur les plans juridiques, organisationnels et financiers de telle façon que la relation soit viable et suivi d’effets ». En effet l’écart va croisant entre l’offre externe et les réponses en nombre d’enseignants du ministère.
Cette baisse du financement s’accompagne d’un décalage croissant entre les formations proposées par l’institution et celles qui sont attendues. » Les demandes d’accompagnement des enseignants pour faire face aux nouveaux enjeux de gestion collective ont été peu satisfaites », affirme le rapport. En fait les demandes des enseignants les portent vers des formations de gestion de classes ou des approches disciplinaires. Or la formation continue a été réorientée vers l’accompagnement des innombrables réformes. Souvent d’ailleurs le stage est un moment de production de ressources pour la réforme. On comprend mieux la très forte demande de formation exprimée lors du sondage réalisé par el Café en mars 2012.
Une autre attente des enseignants a été laissée de coté : la reconnaissance de la formation pour l’évaluation des enseignants. Le ministère a totalement abandonné cette idée alors que chez nos voisins suivre une formation a un impact sur la carrière.
Les rapporteurs souhaitent » accroître la responsabilité des établissements et des bassins parallèlement au développement des formations sur site… L’allocation d’une « enveloppe formation » aux établissements ou aux bassins, ou encore aux circonscriptions pour le premier degré, permettrait à ceux-ci de définir et mettre en place une vraie politique de formation, conçue sur le terrain, discutée au sein de la communauté éducative et ciblée sur ses besoins. Ces moyens, en heures d’enseignement et/ou en crédits de fonctionnement, pourraient faire l’objet d’une contractualisation avec le rectorat ou l’inspection académique ». Il s demandent un nouveau pilotage.
Le rapport sort à pic au moment où le ministère va revoir la formation initiale et continue des enseignants dans la future loi d’orientation.
François Jarraud