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Les législatives donneront-elles une majorité pour changer l’Ecole ? La question interroge bien sur les résultats politiques. Mais elle s’adresse aussi à l’institution sur ses modes d’évolution.


Si l’on en juge par les résultats lyonnais, ça s’annonce mal. Dans la première circonscription de Lyon, un des rénovateurs de l’Ecole, Philipe Meirieu, investi par le PS et EELV, est devancé par le candidat UMP et le candidat du maire socialiste de Lyon. Il se retire devant le candidat de gauche. Cette guerre fratricide éclaire bien les difficultés de la réforme politique. Si le président de la République a fixé un programme pour l’Ecole, les élus de son propre camp ne partagent pas forcément les mêmes options. Or c’est devant le parlement que la loi d’orientation que le gouvernement annonce devra passer. Le résultat des législatives sera donc déterminant pour la transformation de l’Ecole.


Ces divisions politiques se retrouvent au sein même des candidats enseignants. C’est ce que souligne Claude Lelièvre sur son blog. Il signale que 871 enseignants candidats aux législatives sont des enseignants en activité. S’intéressant aux 108 enseignants du supérieur candidats, il en trouve 57 à droite et 51 à gauche, répartis entre 5 formations qui ont chacune leur propre vision de l’Ecole.


Mais la question n’est pas que politique. Le pouvoir précédent a-t-il vraiment réussi à transformer l’Ecole ? Il s’y est attaqué avec plus de violence que de clarté. Il a hésité sur la question du socle commun. Il a lancé l’Ecole dans une réforme libérale, inspirée des pratiques anglo-saxonnes, sans marquer des avancées remarquables. Ses réformes les plus avancées résultent directement de choix budgétaires : la suppression de la formation professionnelle des enseignants en est l’exemple type. Il a échoué à insuffler son idéologie dans l’école qu’il s’agisse de la mise en concurrence, de l’autonomie des établissements, de la responsabilité précoce des élèves, de l’évaluation comme mode de gestion. Et au final le politique semble avoir fait plus de dégâts que de transformation.


Si le levier politique est indispensable au changement, il est loin d’être suffisant. Tout changement de l’Ecole ne peut se faire que dans une forte demande de la société ou à travers le développement d’une culture professionnelle. La grande force du père fondateur, Jules Ferry, c’est d’avoir pu associer les aspirations sociales et politiques de la petite bourgeoisie avec la création d’une culture républicaine du corps enseignant. Mai 1968 a vu l’Ecole portée par un courant profond de transformation de la société. Sans ces grandes forces, les rénovateurs politiques, même quand ils disposent d’une majorité cohérente, se heurtent au facteur temps. Après les élections, il y aura encore à convaincre et à former…


François Jarraud