Lors de visites avec des guides conférenciers de la ville, les élèves de la classe de Valérie Maury, en CP/CE1 à l’école Alfred Clin ont découvert le patrimoine de Saint-Quentin. De retour dans la classe, ils ont écrit et enregistré des textes, cherché des sons et des musiques pour illustrer ces oeuvres et les mettre en sons et en images (avec l’enseignante uniquement). Ils ont créé des petits clips pour présenter des lieux et des oeuvres de leur ville à leurs parents. Son projet est présenté au 5ème Forum des enseignants innovants. Quel a été l’origine (la personne, l’évènement, la rencontre…) de votre projet ? C’est l’émission « Palette » d’Arte sur La Bataille de San Romano de Paolo Uccello. Au début de cette émission, on voit des détails du tableau, on entend des bruits et des musiques avant que ne commencent les commentaires. J’ai trouvé intéressante l’idée d’adapter cette activité à la classe : choisir une oeuvre ou un monument, imaginer un scénario de présentation, écrire puis lire un commentaire enregistré pour illustrer des photos, ajouter des bruits, des musiques.J’ai essayé avec un groupe d’élèves en aide personnalisée pour travailler la rédaction (décrire une oeuvre)… Les enfants ont avancé rapidement et ont eu le temps d’enregistrer leurs textes, de produire des sons et de choisir une musique de générique dans une liste que je proposais. Leur enthousiasme, mais aussi la qualité de leur production m’a donné envie d’adapter cette situation au groupe classe l’année suivante avec des objectifs en langue orale, rédaction, lecture à voix haute, éducation musicale, histoire des arts. Pouvez-vous décrire, du point de vue des activités menées avec les élèves, une situation dans laquelle vous avez vu un impact positif sur les apprentissages scolaires ou de la mobilisation des élèves ?
– Plusieurs fois pendant le projet, trois fois en fait, des mères d’élèves sont venues me voir ou m’ont transmis un petit mot écrit pour me dire que leur enfant avait été un peu souffrant, mais qu’il souhaitait absolument revenir en classe à l’occasion d’une visite d’un des lieux retenus dans le projet ou parce qu’une séance d’enregistrement était prévue. L’absentéisme scolaire a été plus faible pendant la durée du projet.
– Plusieurs élèves ont, quittant leur quartier, fait découvrir à leurs parents le musée de la ville.- J’ai vu quatre élèves au « concert de musique Française du XVIIIème » organisé en septembre lors des journées du Patrimoine. Retrouver ces enfants qui n’étaient plus dans ma classe m’a fait réfléchir à toutes ces graines que l’on sème en classe et que l’on ne voit pas germer pendant l’année. Selon vous, quel est/a été la plus belle réussite de ce que vous avez pu mettre en oeuvre ? Tous les élèves de la classe, quelles que soient leurs difficultés, ont participé : travail en groupe sur l’observation des détails, choix esthétiques (détails retenus, scénarios de présentation, couleurs des génériques, polices, choix des musiques et des bruits mis au vote). Tous les élèves ont écrit du texte et tous ont enregistré, même les enfants qui avaient des difficultés de prononciation et suivaient des séances d’orthophonie. Et a contrario, une difficulté persistante, un écueil que vous n’aviez pas mesuré complètement ? Il est plutôt difficile de mener seule avec les élèves les séances d’enregistrement… Un enfant lit ou récite dans le micro … essaie et recommence pendant que tous les autres élèves doivent rester absolument silencieux… C’est long et difficile. Il faut beaucoup d’activités que le reste de la classe peut mener en complète autonomie et qui ne sont pas toujours faciles à exploiter après. Il faudrait un deuxième adulte. Pouvez-vous nous faire partager une anecdote significative d’un comportement, d’une réaction d’élève(s) au cours d’une des phases de votre travail ? – Les élèves se sont de plus en plus investis tout au long de l’année. Ils avaient de réels destinataires pour leurs mini-clips (dans un premier temps, leurs parents et de grands élèves de l’école, puis également des élus de la ville). Certains ont bien compris la notion de point de vue. « On ne peut pas laisser ce portrait longtemps à l’écran … c’est trop long, après les parents ne vont plus rien écouter ». – Tout au long de l’année, j’ai aussi trouvé que les élèves devenaient de plus en plus critiques. Ils justifiaient leurs choix esthétiques (« ces photos en couleur après le tableau sombre, ça ne va pas du tout… L’herbe est trop verte… Le tableau paraîtra encore plus sombre »). – Ils ont acquis un vocabulaire, des connaissances qui semblaient pourtant loin d’eux, notamment en histoire des arts. A la question d’un spectateur : « Maurice-Quentin de La Tour c’est à l’époque de quel roi ? Louis XIV ? J’ai pas bien entendu … » Une élève de CE1 a répondu » 1704-1788, c’est plutôt Louis XV. Et puis, pour Louis XIV, c’est pas la bonne perruque. Là, c’est une perruque blanche à marteaux. » Si c’était à refaire, pouvez vous citer une phase du projet que vous pourriez modifier pour le rendre plus « efficace » pour les élèves ? Si c’était à refaire avec des CP/CE1 ou des CE1, je préférerais que les élèves de CE1 écrivent leurs propres textes plus rapidement dans le projet et que la part de reformulation des commentaires et explications entendus lors des visites soit moindre. Il faudrait aussi choisir des oeuvres qui permettent d’écrire plus de texte personnel. Je pense aussi qu’il pourrait être intéressant que tous les élèves ne travaillent pas sur toutes les oeuvres. Ce ne serait pas facile à organiser mais ça laisserait plus de temps de parole à chacun, surtout aux « petits parleurs ». On pourrait aussi présenter le travail au reste de la classe qui par ses questions, ses remarques aiderait le groupe producteur à prendre conscience de points à revoir. Un point de vue, une remarque que vous souhaiteriez partager avec les lecteurs du Café Pédagogique ?
Le logiciel qui a permis la réalisation de ces clips : Magix Music maker version école, est un outil magnifique. Facile à utiliser, très intuitif, très visuel avec les élèves, il permet de mettre des sons et des musiques sur des images fixes ou des vidéos. On peut sonoriser ainsi des albums jeunesse, des poésies, des vidéos de sorties… La liste est longue.
Mais le véritable outil, c’est la personne. Le souvenir que je garde de ce projet, c’est qu’il a été une grande aventure humaine. La qualité des échanges m’a laissé une très forte impression. Bien sûr, je détenais le droit de dire « Oui » ou « Non » en dernier, mais ce sont les élèves qui ont fait évoluer le projet, par leur enthousiasme, par leurs questions, par les allers-retours entre les oeuvres et leurs productions, ce sont eux qui ont permis d’aboutir à des productions finales d’une telle qualité.
Marcel Brun La présentation du travail sur le site de la ville :http://www.ville-saintquentin.fr/pages/page_stq.asp?id=238 Les réalisations des élèves (dans l’ordre où elles ont été faites):http://www.youtube.com/watch?v=-FD5kO29o-E http://www.youtube.com/watch?v=ykOjPSw2o-A http://www.youtube.com/watch?v=FZnGD24awqk http://www.youtube.com/watch?v=25KHOy9yQys