Avec ATD : une dynamique partenariale dans un projet de quartier
« Le premier souci des gens, c’est que leurs enfants ne soient pas dans la même galère qu’eux ». La « promotion familiale », c’est la première raison d’être d’ATD-Quart-Monde. « Pourquoi les enfants en difficultés scolaires devraient-ils relever de la scolarisation des élèves handicapés et de ses structures ? La mise en place des MDPH crée par nature des souffrances et des malentendus ». En guise de déclencheur, B. Mazurel propose aux participants de l’atelier un film qui rend compte de quatre années de projets dans le quartier Maurepas (Rennes).
Début 2007, ATD rencontre tous les partenaires du quartier : les enseignants, la maison de quartier… Un constat de l’époque : tous les dispositifs extérieurs à l’école consistaient à traiter la difficulté scolaire (plan Borloo), il s’agira donc de développer un nouvel axe sur la participation et l’implication des parents à l’école.
Le mouvement ATD veut faire en sorte que les parents qui ne se connaissent pas entre eux puissent se réunir en « groupe de pairs » pour faciliter leurs échanges autour de l’école. Un autre groupe de pairs se constitue autour des enseignants. Chaque groupe est co-animé par un militant d’ATD. Une convention engage les partenaires, et l’Inspection Académique prend en compte les heures investies par les enseignants dans les « 108 heures » de concertation. La FCPE cherche à comprendre ce qui freine les parents à s’impliquer. L’universitaire Pierre Périer suit également l’avancée des travaux, l’IUFM, la Municipalité figurent aussi parmi les signataires. Malgré toutes ces bonnes fées, certaines familles n’ont commencé à effectivement fréquenter les réunions d’école qu’après deux ans de fréquentation des groupes d’échanges d’ATD… De longs temps de préparation en groupe de pairs sont nécessaires avant de confronter les deux groupes, pour que puisse émerger un langage commun. « Les parents veulent le bonheur de leur enfant, mais tout le monde ne met pas les mêmes notions derrière les mots » précise une IEN dans le film. Ni la même définition derrière la réussite… « De toutes façons, quand on n’est pas dans l’alliance avec les parents, les enfants sont perdus » témoigne un accompagnateur.
Le plaisir est-il le moteur des apprentissages ? « Au fil des réunions, reprend l’animateur à la fin du film, on s’est aperçus de ce qu’il fallait faire pour qu’une vraie communication s’instaure, pour que les parents comprennent mieux ce qui se passait dans la classe ». Il reconnait volontiers « qu’on était un peu figé au début », de peur d’être dépassé par les événements. « On a mieux compris que les règles pouvaient être différentes à l’école et à la maison, sans remettre en cause aucun des deux espaces » témoigne une enseignante.
Au bout d’une quinzaine de réunions de tous ordres organisées durant cinq ans, quelles conclusions ? « Le plus étonnant, pour les enseignants, a été de comprendre que les parents, même les plus démunis, peuvent aussi apporter quelque chose à la classe. Ce changement de regard sur les parents se lit dans les yeux des enfants ». « Des petites avancées, modestes, avec quelques parents qui vont faire jouer le bouche à oreille » explique un coordonnateur. « Faisons leur confiance, ils sauront faire avancer les choses… ». Pourvu qu’on prenne le temps, ce qui est toujours le plus aléatoire…
« Evidemment, rien n’a été facile, et personne n’aime être mis en danger dans ses habitudes, précise B. Mazurel. Les changements politiques ou les modifications de règles adminstratives peuvent même remettre en cause un projet en quelques semaines, d’autant plus qu’un mouvement comme ATD Quart-Monde est symboliquement et institutionnellement faible pour animer un tel projet…Mais on a tenu le cap »
« Ce que nous demandons », conclut le militant d’ATD, ce n’est pas qu’on « concentre les moyens » sur les plus pauvres, mais qu’on mette leur parole et leur destin au coeur du travail collectif autour de l’école et des enfants« . Histoire de convaincre qu’au-delà de l’aide, aux familles comme aux enfants, c’est bien la mobilisation collective des acteurs eux-mêmes qui est le levier efficace de la reconnaissance, en apprenant à changer de regard sur le potentiel de chacun… De la salle, un homme prend le micro : « Parce que l’enseignant doit se convaincre que le savoir, c’est bien ce qui transforme celui qui apprend. Ce n’est pas seulement une formalité qui permet de passer de classe en classe… »
Le projet et le film sur le site d’ATD Quart monde :
http://www.atd-quartmonde.fr/Le-film-En-associant-leurs-parents.html