Par Antoine Maurice
Une nouvelle année a toujours son lot de surprise… En effet, le BO du 5 Janvier 2012 a livré son verdict à travers des documents d’accompagnements concernant l’Education Physique et Sportive dans le premier degré pour les cycles 2 et 3. Le document est intitulé « progressions » pour les différents cours (préparatoire, élémentaire, moyen). Plusieurs associations, collègues, conseillers pédagogiques départementaux et syndicats mis devant le fait accompli nous ont contacté pour témoigner de leurs interrogations… Modestement nous allons tenter d’en retranscrire certaines.
Sur le pourquoi du document
En plus de l’absence de concertation, ce qui dérange plusieurs collègues et syndicats, c’est le bien fondé de nouveaux documents d’accompagnements. En effet, plusieurs collègues ont témoigné d’une certaine fonctionnalité des anciens documents d’accompagnements, même si évidemment plusieurs choses sont toujours perfectibles. Le fait est, les nouveaux documents sont là !
Un document pragmatique ?
Quel est l’intérêt des documents d’accompagnements ? Doivent-ils dire ce qu’il faut faire ou au contraire proposer des solutions pour les enseignants ? Evidemment, au début, on s’est interrogé sur l’intérêt du catalogue que constituent ces listes « d’attendus ». Construire des « progressions » n’est pas le plus difficile pour l’enseignant. Ce qui lui pose problème, c’est comment on organise l’enseignement pour permettre aux élèves d’atteindre ces « attendus ». On peut noter la disparition de l’idée de programmation de l’EPS, forcément très dommageable, notamment par la disparition de l’obligation de traiter les 4 compétences chaque année.
Un éloignement du concept de compétence
Nous essayons toujours au café d’accueillir un texte avec un certains recul, et nous n’hésitons pas à souligner les progrès, les liens réalisés entre les différents niveaux du système éducatif français. Cependant, nous perdons ici un peu le lien qui avait caractérisé l’arrivée des nouveaux programmes, notamment ceux du lycée et du collège. Dans les « attendus » des documents d’accompagnements, nous ne pouvons que constater que les composantes connaissances et attitudes des compétences sont minorées, voire oubliées. Nous ne pouvons que rappeler la définition des compétences telle qu’elle est définie dans le socle commun de compétences comme un ensemble de connaissances, capacités et attitudes s’exprimant dans une situation complexe ! Ce qui nous amène désormais à questionner les propositions dans le fond, et là encore, nous sommes forcés de soulever certaines interrogations…
Un décalage dans les propositions avec la réalité
Nous ne pouvons que constater que le document est en froid avec quelques principes de base de la discipline : par exemple, maintenir une course rapide sur 10 secondes en cycle 3 est inapproprié : cette durée de course engendre de la fatigue qui va à l’encontre de la possibilité de répéter et de stabiliser sa performance. Des durées de 5 à 6 secondes sont beaucoup plus adaptées.
Autre point, nous constatons que de nombreux attendus sont hors de portée d’élèves de cycle 3 : à tel point que ces derniers sont ceux du niveau 2 des programmes du collège en athlétisme, en course d’orientation, en gymnastique et en lutte.
Pour exemple, en gymnastique pour les CM, il est demandé : « En appui sur une barre, tourner vite par une action simultanée du haut et du bas du corps » ; on comprend logiquement que cette formulation pose souci. Le tour d’appui sur une jambe est difficile, mais que dire du tour avant ici évoqué ? Nous éviterons d’évoquer le « tourner vite »…
Un document surprenant, mais aussi dangereux
Comment aller dire maintenant aux enseignants de cycle 3 de ne pas faire faire de la lutte debout à leurs élèves : amener un adversaire au sol en partant debout demande aux élèves une maîtrise et un accompagnement de la chute qui n’est construit que chez les élèves pratiquant en club la lutte ou le judo… Cette construction n’est pas du domaine des compétences du maître polyvalent !
Comment accepter qu’à l’école élémentaire on attende de l’élève des « exploits » gymniques alors qu’au collège on attend une combinaison d’éléments simples et maîtrisés ?
Pour conclure
Beaucoup d’éléments de ces progressions résistent mal à une lecture attentive. C’est donc l’inquiétude qui nous gagne au sujet de l’utilisation de ces progressions. Elles se posent désormais en référence. On ne peut donc qu’inviter l’ensemble des acteurs à la plus grande prudence et à ne pas attendre des enseignants des mises en œuvres impossibles…
Le document d’accompagnement
http://media.education.gouv.fr/file/1/58/7/programmes_ecole-primaire_203587.pdf
Sur le site du Café
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