Par Marcel Brun
C’est avec ces mots que la toujours très pertinente Agnès Van Zanten décrivait la situation dans un récent entretien diffusé récemment dans l’émission Rue des Ecoles.
« Certains parents, souvent de classes moyennes et supérieures, considèrent désormais que la réponse adaptée aux cas personnels est une mission de l’école. Dit autrement, alors que les enseignants estiment que la Justice due par l’Ecole est de mettre tous les élèves à égalité « de chances », les familles attendent que l’établissement où ils scolarisent leur enfant s’occupe spécifiquement de celui-ci, avec ses « besoins particuliers » éventuels. Parfois jusqu’à l’excès consumériste, pas loin des pubs MMA qui vantent la pression du lobby consommateur pour tirer le meilleur du système.
L’articulation entre l’individuel et le collectif est évidemment le défi de l’Ecole de notre temps, y compris pour ceux qui en attendent des vertus démocratiques. Face à la difficulté scolaire, « l’école doit pouvoir répondre sur la question des connaissances et de la socialisation » explique A. Van Zanten, pour qui ’accompagnement personnalisé ne peut qu’être bénéfique si on maitrise les conditions dans lesquelles ça a lieu : non pas dans l’extériorité ou les dispositifs ségrégatifs, mais d’abord à l’interne de la classe et en coordonnant les interventions différentes.
Mais là où le bât blesse, c’est lorsque l’institution fait passer l’idée que seuls les « pauvres méritants » méritent d’être aidés lui semble discutable : ce sont des politiques très malthusiennes, consensuelles mais qui se font au détriment du traitement de la masse des élèves. Dans les zones d’éducation prioritaire, l’action des enseignants engagés est désormais « aspirée » vers ces politiques qui les valorise, et permet parfois des résultats réels pour quelques uns. Du coup, les politiques de lutte contre l’échec scolaire sont déshabillées, et le plus grand nombre des élèves en difficulté sociales abandonnés. Cela s’est nourri de la déception à l’égard des politiques publiques, et nourri l’impression que rien n’était possible dans ces zones difficiles. On peut alors comprendre que faute de confiance dans l’action publique ou le travail pédagogique, certains décident de chercher des solutions individuelles pour leurs enfants. Et renforcent ainsi la compétition, la « course à l’armement scolaire » que ne peuvent que perdre ceux qui ont le moins de moyens économiques et culturels.
Pourtant, il existe des espaces d’action » conclut Agnès Van Zanten , qui nécessitent des conditions, mais ont des effets sur les résultats des élèves et génèrent des cercles vertueux sur le terrain.
« Une école pour tous, une école pour chacun » Dubet
Marcel Brun
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