Par Françoise Solliec
Comment se met concrètement en œuvre le PPI ? La question a son importance, car toute construction nouvelle ou rénovation de lycée ou de CFA doit être inscrite dans le programme pluriannuel pour avoir une chance d’être réalisée. Le processus d’élaboration est long et complexe et fait intervenir de multiples acteurs, notamment sur les questions de débouchés et d’emploi.
Toutes les opérations immobilières de grande ampleur impactent durablement l’offre de formation, affirme Emmanuelle Moreno, chef du service formations à l’unité lycées. Cela confère une grande importance à une vision prospective (aménagement du territoire, projections démographiques, projet des communautés), mais il faut bien comprendre que l’évolution de l’offre de formation dépend au moins autant, sinon plus, des demandes exprimées par les établissements dans les mesures de rentrée. Ainsi cette année, la réforme des STI, dont le calendrier est très court, a vu modifier les guides d’équipement et obligé les académies à réfléchir à d’éventuelles nouvelles implantations, pas toujours avec des positions identiques d’ailleurs. Les mesures de rentrée permettent aussi aux établissements de déplacer des formations pour constituer des pôles.
A côté, le PPI permet des transformations plus radicales – plus chères aussi. Dans ce cadre on traite des extensions des capacités d’accueil, des internats, des implantations nouvelles, de la redistribution des demandes des élèves, …
Pour élaborer le PPI, on se base sur de nombreux outils, dont certains intègrent des découpages administratifs. On essaie de s’en affranchir pour coller au mieux à la réalité de terrain et prendre en compte les facilités qu’ont les élèves pour accéder aux implantations. La carte des diplômes est aussi un guide important. Enfin, il faut intégrer les données économiques : équipements particuliers comme les aéroports, évolution du tissu économique, données régionales sur l’insertion des jeunes, etc. Toutes les réflexions, bien que pilotées par la région, font intervenir les académies et d’autres interlocuteurs et experts, notamment sur les débouchés des formations et l’avenir des métiers. Elles sont ensuite consignées dans un document général d’orientation, les OCER, orientations conjointes état région, qui indique quels sont les secteurs qu’il faudrait développer, maintenir ou réduire. A partir de ces orientations, les établissements feront leurs propositions et le recteur arrêtera la carte scolaire.
Pour aboutir aux préconisations, un diagnostic est établi pour chaque formation : demande sociale, flux, maintien ou non dans les murs, réussite aux examens, statistiques d’insertion. En énergétique, par exemple, tous les indicateurs sont au beau fixe, on recommande un développement sous forme de pôles. En productique, les indicateurs d’emploi sont bons, mais cette formation présente peu d’attrait pour les élèves ; on recommandera donc une restructuration, permettant d’ajuster les capacités d’accueil. Depuis 2007, les discussions réunissent inspecteurs et représentants des branches professionnelles ; tout le monde y trouve son compte, déclare Emmanuelle Moreno. Cependant, si les éléments sont partagés, les conclusions locales ne le sont pas forcément. Les projets des lycées sont instruits sur 2 mois (octobre et novembre), en privilégiant les mesures de rentrée qui supposent des travaux. Dans beaucoup de cas, les avis sont consensuels, mais en cas de désaccord, la décision finale revient à l’Etat. Il arrive aussi que des mesures soient acceptées, mais irréalisables pour la prochaine rentrée.
Toutes ces discussions influent sur le PPI, mais d’autres éléments sont également pris en compte dans sa préparation, notamment la démographie et les prévisions académiques de flux d’élèves, qui permettent une projection du nombre d’élèves à accueillir par niveau. La distribution des logements, élément important pour l’accès des élèves aux établissements, est fournie par l’IAURIF et d’autres éléments économiques sont intégrés. L’éventail des opérations déjà réalisées est aussi un facteur, ainsi que les priorités identifiées pour les locaux les plus dégradés. On cherchera enfin à réaliser des établissements plus polyvalents.
La programmation d’une rénovation ou d’une construction nouvelle est une opération très précise, dans laquelle on ne peut se contenter d’orientations générales de filières. On se base donc sur une situation à un moment donné, mais les délais sont tels que les orientations initiales doivent parfois être complètement revues, notamment dans le cas d’évolutions des référentiels nationaux. Il y a donc, dans toute programmation, obligation d’anticiper et de minimiser les risques. Le rapprochement entre les programmes prévisionnels d’investissement et celui de rénovation devrait permettre de réduire cette difficulté.