La première association de parents d’élèves a milité pour défendre l’accès de tous à la restauration collective scolaire et pour en faire un lieu d’éducation nutritionnelle. La publication du décret est-elle une victoire de la Fcpe ?
Pour vous la publication du décret sur les cantines doit être une victoire ?
C’est quelque chose qu’on revendiquait depuis 2007. On avait demandé une loi. Elle a été finalement promulguée en 2010. Le décret était prêt depuis 2009…
Pourquoi autant de temps ?
Il y a des lobbys qui n’ont pas intérêt à ce que les choses changent. Un des enjeux de ce changement c’est le coût et le contrôle opéré sur la restauration déléguée.
Les nouveaux textes fixent des règles pour diminuer les graisses, le sel, la taille des portions. Etes-vous satisfait ?
Tout cela s’inspire des travaux du Groupe d’étude des Marchés de Restauration Collective et de Nutrition. Cela se traduira par des normes indicatives qui seront publiées très prochainement et qui pour la première fois concerneront le collège et le lycée. Ce seront des normes de service comprenant toute la conception du service. Dans l’arrêté qui est publié on s’attaque déjà au grammage des portions, à l’idée de limiter le haché au profit de vraie viande cuisinée, de limiter le sucre et les graisses, d’encourager les produits frais et bio. IL y a aussi l’idée de varier les menus. Toutes choses positives.
La FCPE, et vous personnellement, avez beaucoup agi pour ces changements. Qu’en attendez-vous ?
Evidemment qu’il y ait une réflexion sur les équilibres alimentaires et que cela serve aux enfants.
Mais on a vu , en Grande-Bretagne par exemple, que des mesures de limitation des sucreries, des pizzas, des frites avaient des effets négatifs comme la baisse de fréquentation de la cantine et la consommation de junk food apporté de la maison ou acheté en magasin.
On ne peut pas faire l’économie d’une éducation nutritionnelle. Si elle existe, si on limite l’interpellation des enfants par la publicité télévisée pour des produits gras et sucrés, si on limite la vente des bonbons en supermarché, si on a un vrai respect des conditions de nutrition à l’école, on aura quelque chose de cohérent et on peut gagner. L’école et le restaurant scolaire ont à jouer un rôle éducatif. Le restaurant scolaire n’est pas seulement un endroit où l’on mange. Ca doit être un lieu de repos, d’où notre revendication d’un minimum de 90 minutes de pause méridienne. Et aussi un lieu d’éducation au goût où les enfants puissent découvrir de nouveaux produits. Il faut tout cela. Que les enfants aient du temps à table, qu’il y ait un personnel suffisant pour d’occuper d’eux. C’est ce que la norme devrait prescrire.
Depuis le début de cette année on a retrouvé le débat sur les conditions d’accès à la cantine. S’y est ajouté un nouveau thème celui de la laïcité de la cantine avec des maires qui s’ingénient à mettre des plats uniques qui ne respectent pas les habitudes alimentaires des religions minoritaires. Qu’en pense la Fcpe ?
Ce dernier cas est assez rare. Je ne pense pas que parce qu’on va proposer un plat de remplacement on va trahir la laïcité. La laïcité nécessite de la tolérance. La question du hallal ou du casher ne se pose pas en cantine parce que la traçabilité de ces produits est trop difficile. Clairement la municipalité qui choisit de mettre plusieurs fois par semaine du porc au menu sans plat de substitution comme celle qui relève les prix brutalement, le fait pour chasser une partie des familles. Ca nous renvoie à la question de l’accès de tous à la cantine.
Il y a des communes qui interdisent l’accès à la cantine quand un ou les deux parents sont chômeurs. La semaine dernière une commune a été condamnée pour cela. La Fcpe continuera à appeler les parents à refuser de se faire marcher sur les pieds alors que la loi est pour eux. Le Conseil d’Etat a déjà tranché cette question. Les parents n’ont pas à fournir de certificat de travail. Pour que cela soit encore plus simple on demande au gouvernement de légiférer sur cette question.
Propos recueillis par François Jarraud