Par Jeanne-Claire Fumet
» J’aime ce métier et je vais continuer « . Rappelez-vous : elle avait accepté de témoigner pour le Café, en début d’année, de son expérience d’enseignante débutante lancée sans formation dans le métier. Elle souhaitait garder l’anonymat ; la tension était vive, alors, autour des nouveaux stagiaires fragilisés par l’incertitude de leur mode de titularisation. Après une année réussie, Hélène Doroszczuk fait le point sur cette immersion un peu rude qui n’a pas entamé son enthousiasme.
Vous vous disiez motivée mais épuisée. Qu’en est-il après quelques mois de pratique ?
C’est toujours difficile, mais le métier rentre, je crois. Je me laisse moins impressionner par la masse de préparations et j’ai appris à gérer les situations inattendues. J’ai eu l’occasion de tenter des approches pédagogiques différentes, avec les AP en seconde : un atelier de lecture à voix haute, par exemple, pour apprendre à discerner l’importance des changements de ton, les éléments de ponctuation, tout ce qui rend un texte intelligible au lecteur. Et puis un « procès des idées » : les élèves devant assumer la défense ou la critique argumentées d’une idée, en l’occurrence la peine de mort, avec l’aide de « témoins » à charge ou à décharge qui évoquent des cas particuliers. Cela les aide à comprendre la différence entre une idée générale et les exemples qui peuvent l’illustrer, l’importance de dépasser les opinions spontanées, l’intérêt d’arguments réfléchis. C’est une approche assez efficace des exigences de méthode – et ils ont adoré.
N’était-ce pas pesant de mener ces activités en plus des cours au programme ?
J’ai eu la chance d’être très bien conseillée par mon tuteur, qui m’a obligée à organiser mes préparations avec une extrême précision. En prévoyant le déroulement des séquences de façon rigoureuse, je pouvais distribuer aux élèves des consignes de travail à la maison qui leur permettaient de s’organiser à l’avance. C’est une grosse charge de travail au début de chaque nouvelle séquence, mais on est plus libre ensuite pour improviser.
Les relations avec les élèves sont restées satisfaisantes ?
Tout à fait, mais elles ont évolué. J’avais deux classes de seconde, dont une plus imprévisible et difficile que l’autre. Je me suis rendu compte que j’avais tendance à me montrer plus sévère avec la classe la plus facile ! Tout cela s’est équilibré et nous avons passé une très bonne année. En première, les rudiments de lecture analytique et de méthode sont acquis et il m’a semblé plus simple d’y enseigner – malgré l’examen final.
Comment envisagez-vous les années à venir ?
J’aime ce métier et je vais continuer. De toute façon, avec un service de 18h, on ne peut pas tenir si on n’est pas vraiment fait pour ça. Des stagiaires ont abandonné, peut-être est-ce préférable de savoir rapidement que l’on ne tiendra pas. L’an prochain, je suis nommée sur un poste de TZR (titulaire sur zone de remplacement) ; ce sera une autre expérience. Je vais préparer une spécialisation en théâtre, et un master 2 en relation avec ce domaine pour développer d’autres approches. Ensuite, je pense présenter l’agrégation de Lettres. Et continuer d’apprendre…