Par François Jarraud
Rencontré aux Journées de l’innovation, Dominique Schnitzler est un proviseur heureux. Son lycée voit ses effectifs repartir à la hausse et les résultats du bac s’améliorer. C’est le résultat d’une expérimentation pédagogique menée depuis 2007et basée sur la pédagogie de projet. Alors que la réforme du lycée piétine dans de nombreux établissements, le lycée F Mayer de Creutzwald a réussi à donner un sens aux nouveaux dispositifs en les utilisant pour conduire des projets pédagogiques.
Situé dans l’ancienne zone charbonnière lorraine, le lycée Felix Mayer de Creutzwald était en perte de vitesse. D. Schnitzler, proviseur du lycée, fait le constat de la situation en 2007. « Un constat de départ a été fait depuis quelques années sur les « nouveaux publics » en lycée, c’est à dire des élèves avec une autonomie faible, qui sont mal préparés à l’intégration de l’espace de liberté et de travail personnel que représente le lycée par rapport au collège. Les difficultés majeures portent sur trois axes identifiés : le problème du passage à l’écrit et à la pratique de l’argumentation ; des élèves dont les compétences en matière de TIC sont de plus en plus diverses; le manque d’ouverture culturelle évident est un des handicaps forts de nos élèves ».
Avec Sciences Po. En 2007, le lycée donne un nouveau cap à un partenariat plus ancien avec Sciences Po. L’expérimentation vise à « redonner de la motivation aux élèves, développer les capacités de travail autonome ou en groupe des jeunes lycéens, élargir leurs horizons à travers une démarche de projet; favoriser les initiatives citoyennes ». D Schnitzler rappelle que la plupart des élèves ignorent le monde environnant. Très tôt le lycée organise des voyages qui entraînent tous les élèves. Par exemple ils partent en Afrique du sud dans une région où des mines de charbons fonctionnent encore… Le lycée va aussi s’engager dans des opérations citoyennes.
Pédagogie de projet. Dès le départ, les enseignants font le choix d’impliquer toutes les classes de secondes, puis les années suivantes toutes les premières et terminales. Chaque vendredi après-midi une tranche de 4 heures est mise à l’emploi du temps de toutes les secondes. Les élèves sont répartis par groupe de projet. Pendant toute l’année 2 à 3 professeurs de matières différentes travaillent avec les élèves sur un projet. Par exemple en 2009-2010, le thème du projet est « comment les sociétés réagissent-elles face aux situations de crise ». Avec la réforme du lycée, les projets sont intégrés dans les enseignements d’exploration, l’ECJS et l’accompagnement personnalisé. Les professeurs interviennent pour former les élèves à la recherche et au traitement de l’information. Ils apprennent à faire un diaporama, à rechercher l’information sur Internet, à s’exprimer oralement devant des groupes de taille différente. L’autonomie et la créativité des élèves sont privilégiées. Les projets développent aussi la citoyenneté. Par exemple un Forum des solidarités a lieu dans el lycée. Il fat connaître les différents acteurs locaux.
Un bilan positif. Au terme de 4 années, D Schnitzler estime que « malgré un positionnement en fin de semaine l’absentéisme des élèves est faible. Les élèves participent volontairement aux actions engagées. » Les résultats des élèves sont « impressionnants ». Le nombre de mentions au bac a explosé. En STG elles ont doublé de 2009 à 2010 par exemple. Et le projet est bien installé dans l’établissement. Le recrutement du lycée est à nouveau à la hausse.
Les recettes du succès. Pour D Schnitzler, le succès tient à plusieurs piliers. D’abord « la concertation dans la conduite du projet ». Il a fallu accompagner quelques professeurs qui avaient peur de se lancer. Trois ou quatre enseignants, devenus coordinateurs de projets, ont joué un rôle moteur avec la direction. Le soutien financier de Sciences Po et de Total a permis de faire face aux dépenses des voyages.