Par François Jarraud
La publication de l’ouvrage de F Dubet, M Duru-Bellat et A Vérétout « Les sociétés et leur école » relance le débat sur l’inflation scolaire avec de belles tribunes des auteurs et de Philippe Coulangeon.
Le débat repart entre François Dubet, Marie Duru-Bellat et Philippe Coulangeon
Dans une série d’articles publiés par La vie des idées, le débat sur l’inflation scolaire revient dans l’actualité. Philippe Coulangeon, Chercheur à l’Observatoire Sociologique du Changement, analyse le dernier ouvrage de F Dubet, M Duru-Bellat et A Vérétout. Les auteurs lui répondent.
« Sans insister sur le présupposé malthusien sous-jacent à cette conviction, puisque c’est bien seulement lorsque l’emploi est vu comme une quantité finie que la diffusion des diplômes peut être « mécaniquement » tenue pour responsable de leur dévaluation sur le marché du travail, on rappellera, qu’en toute rigueur, la démonstration d’une telle dévaluation supposerait de comparer non pas, comme on le fait le plus souvent, le rendement des titres au sein des générations successives de diplômés, mais de comparer, au fil des générations, le destin d’individus dotés de propriétés sociales comparables mais ayant connu des durées de scolarisation inégales et ayant atteint des niveaux de diplômes différents », remarque Philippe Coulangeon dans son analyse de l’ouvrage de F Dubet et alia. « Pour sérieusement mettre à l’épreuve cette thèse ancienne de l’inflation scolaire, toujours très populaire dans la sociologie française, il conviendrait aussi de prendre en considération les trajectoires des individus, et non leur position à un moment donné, en s’appuyant sur des données longitudinales, comme l’ont notamment fait aux États-Unis Paul Attewell et David Lavin, dans un ouvrage fondé sur le suivi, de 1970 à 2000, d’un panel de plus de 15 000 étudiantes newyorkaises, et qui montre l’impact indubitablement positif, lorsque l’on observe les trajectoires davantage que les positions, de l’allongement de la durée des études ».
La réponse des auteurs. » En nous accusant de malthusianisme, Philippe Coulangeon nous fait un faux procès. Nous ne souhaitons pas que les enfants et les jeunes aillent moins à l’école et soient moins instruits. En revanche, nous pensons qu’il n’est ni raisonnable ni juste de confier à l’école le monopôle de la définition et de la mesure du mérite des individus. Il faut bien que ceux qui n’ont pas de mérite scolaire puissent faire valoir leurs compétences dans d’autres épreuves et d’autres compétitions que celles que contrôle l’école », répondent F Duber, M Duru-Bellat et A Vérétout. » Le fait que tous les élèves tirent une utilité individuelle des diplômes ne signifie pas que cette utilité soit équitablement répartie. Elle peut être très chèrement payée par ceux qui n’ont pas de diplômes et elle peut être de plus en plus longue à acquérir pour ceux qui n’ont pas rejoint rapidement les élites scolaires pour lesquelles l’utilité est maximum… Nous avons aussi essayé de montrer que, plus les individus croient dans l’utilité et l’équité des diplômes, plus ils s’engagent dans une compétition qui accentue les inégalités scolaires afin de maintenir les avantages relatifs des diplômes. Au bout du compte, la reproduction sociale en sort renforcée puisque les mieux armés gagnent les batailles. »
Les jeunes : Sacrifiés ou enfermés ?
« Il n’est pas certain que la société française a « sacrifié » la jeunesse pour mieux protéger les générations plus anciennes. En revanche, la jeunesse française est comme écrasée par le poids d’un « tout scolaire » confiant à la seule école le monopole de la définition et de la mesure du mérite des individus ». Dans Le Monde, François Dubet publie une belle tribune qui égratigne les thèses de L Chauvel et revient sur le thème de l’inflation scolaire et des dégâts généras par l’Ecole.
« Le pessimisme, l’amertume et parfois la colère des jeunes français s’expliquent peut-être par le choix de protéger les générations chanceuses des années de croissance. Mais ils s’expliquent plus sûrement encore par la scolarisation excessive des parcours d’accès à l’emploi. Plus les parcours scolaires s’allongent, plus ils doivent être « parfaits » pour être utiles, plus la concurrence entre les formations et entre les individus devient forte et surtout, plus ceux qui ne réussissent pas finissent pas se persuader eux-mêmes qu’ils n’ont pas vraiment de place dans la société. Les jeunes français sont moins sacrifiés qu’ils ne sont enfermés dans une promesse de salut scolaire intenable. Nous devrions apprendre à élever le niveau de formation sans trop scolariser l’entrée dans la vie. »
L’article de P Coulangeon
http://www.laviedesidees.fr/Les-societes-malades-de-leur-ecole.html
La réponse
http://www.laviedesidees.fr/Le-diplome-contre-l-egalite.html
Le dossier du Café
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lesdossiers/Pages/110320[…]
Analyse de l’ouvrage dans le Café
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/laclasse/Pa[…]
La tribune du Monde
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/17/la-jeune[…]
Sur le site du Café
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