» C’est bien le recrutement de fonctionnaires qui doit être la règle pour pourvoir les emplois permanents. C’est la loi de 84. Le recours aux contractuels doit être mieux encadré, avec un contrôle annuel des comités techniques notamment ». Le 7 mars 2011, le gouvernement a transmis aux syndicats un projet d’accord sur les contractuels de la fonction publique. Nous avons demandé à Dominique Thoby, secrétaire nationale du Se-Unsa, son avis sur ce texte.
Peut-on dire qu’aujourd’hui l’appel aux précaires est un élément de confort pour les usagers du service publics par exemple dans l’éducation ?
Nous ne nions pas la nécessité d’un recours aux contractuels, notamment quand un emploi devient vacant en cours d’année. Pour autant ce recours aux contractuels ne peut se substituer au recrutement de fonctionnaires, y compris pour leur remplacement.
Que disent les précaires de leur employeur ?
Ils ne sont pas respectés. Le contrat ne vaut que dans un sens, le leur c’est-à-dire leur travail. L’employeur se désintéresse globalement de ses responsabilités une fois le contrat signé : respect des éléments du contrat, formation, accompagnement, respect des droits en général… Les contractuels subissent et ont peu de moyens pour se défendre (salariés souvent isolés), sinon ils risquent de se voir non renouvelés.
Faut il maintenir des contrats à durée limitée ou supprimer le recours aux précaires ?
C’est bien le recrutement de fonctionnaires qui doit être la règle pour pourvoir les emplois permanents. C’est la loi de 84. Le recours aux contractuels doit être mieux encadré, avec un contrôle annuel des comités techniques notamment. Nous ne voulons pas d’extension des cas de recours déjà prévus dans la loi de 84. C’est ce qui nous opposait au gouvernement avec son contrat de projet et le développement du CDI. Ce CDI doit rester l’exception , notamment dans l’éducation pour les enseignants contractuels dans des disciplines pour lesquelles il n’y pas de concours (ex en LP , l’horlogerie etc.). Il faut savoir qu’avec le plafond d’emploi tout développement du CDI diminuera d’autant les places aux concours.
L’accord donne t il des garanties d’intégration dans la Fonction Publique aux précaires ?
L’employeur doit prendre ses responsabilités. S’il a recours à des contractuels il doit les former et les accompagner pour leur faciliter l’accès à la titularisation. L’accord comporte une seule mesure immédiate dont pourront bénéficier les contractuels aujourd’hui employés : c’est la mise en œuvre de la RAEP « reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle », épreuve aménagée du concours. C’est ce sur quoi nous nous sommes battus alors que dans le premier projet de texte, le gouvernement donnait priorité au CDI. Si le CDI peut donner une garantie de longévité au contrat, il n’apporte pas les garanties d’un emploi de fonctionnaires : carrière, licenciement exceptionnel, pension et autres droits.
A la rentrée 2011 par exemple, 1000 supports destinés à l’enseignement des langues vivantes en primaire devant être supprimés, nous avons déjà des exemples de contractuels en CDI , avec une ancienneté de service de 10 ans et à qui est annoncé un licenciement. Pour le gouvernement le développement du Cdi correspond à une volonté de faire des économies en instaurant une fonction publique duale , voire sous fonction publique, sans les garanties citées ci-dessus.
L’accord renforce t il leurs droits ?
Sur cette partie, on ne peut pas dire que des engagements ne sont pas pris, mais quand seront-ils concrétisés ? Après l’éventuelle signature de l’accord, un projet de loi basé sur cet accord sera préparé au printemps, la loi sera votée au plus tôt fin 2011. Les décrets d’application verront le jour en 2012, donc les contractuels ne sont pas prêts de voir la concrétisation des textes qui doit renforcer leurs droits.
Pour notre part, nous n’entendons pas rester les bras ballants à attendre ces textes. Nous continuons à mener campagne à la DGRH (Direction des ressources humaines du ministère) pour que des préconisations soient envoyées dans les rectorats, notamment pour que les règles de 2007 actuellement en vigueur soient respectées ( décret 83-86 modifié).
L’accord répond il aux besoins de formation souvent promis aux précaires (par exemple aux avs) ?
C’est pareil. Il y a des engagements. Mais nous l’avons dit au gouvernement. Nous ne sommes pas naïfs. Quand on voit la part laissée à la formation dans les BOP académiques, sans crédits que sera-t-il réellement fait ? S’agissant des AVS, nous continuons là aussi notre combat :
– au niveau du CNCPH pour faire aboutir un référentiel métier pour cette mission : un vrai métier dans une branche professionnelle reconnue avec des garanties collectives pour ces salariés, qui ne doivent pas rester des contractuels de droit publics. Il faudra ensuite organiser l’accès des personnels qui occupent aujourd’hui ces missions vers les emplois créés.
– Au niveau de la DGRH pour l’accompagnement en formation de ces personnels. Nous avons un rendez vous prochainement sur ce sujet.
Dominique Thoby
Propos recueillis par François Jarraud
Liens :
Sur le Café : le texte de l’accord