Par Lucie Gillet
En juin dernier, nous recensions quelques ressources de la toile sur le sujet. Ce mois-ci, sous le sapin, Céline Barriol-Décot nous livre un témoignage fourni sur sa pratique quotidienne de celui qu’elle qualifie de « tableau magique ».
Céline est enseignante en milieu rural en Haute-Loire, son école est équipée depuis longtemps, c’est donc avec le recul de plusieurs années d’expérimentations qu’elle nous propose son regard sur l’emploi d’un tel outil. Non ce n’est pas la fin des patouillages et autres escargots en pâte à modeler, oui on continue d’utiliser des crayons et du papier… Mais surtout on s’adapte au plus près des besoins de nos élèves en diversifiant, en sélectionnant parmi une batterie d’exercices, de logiciels ceux qui seront les plus adaptés…
Précisons que Céline Barriol-Décot utilise également les brevets comme outils de validation des acquis tels que Christine Lemoine les présente sur son site http://maternailes.net/ (souvenez-vous, nous en parlions dans le n° 106)
A déguster tout chaud, écrit spécialement pour le café. Un merci à chaleureux à Céline Barriol-Décot.
Le numéro 104 avec un article de ressources sur le TNI :
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant/primaire/m[…]
Le numéro 106 et les brevets :
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant/primaire/m[…]
Apprendre avec un « tableau magique » au quotidien en maternelle
Par Céline Barriol Décot
Ecole maternelle publique de Bas en Basset (Haute Loire)
uelles utilisations ? Quand ? Comment ? Pour apprendre quoi ?
« Allumé » dès l’arrivée des élèves, au moment de l’accueil, le tableau magique associé à l’utilisation d’un logiciel est un atelier au même titre que la pâte à modeler, les coins jeux, les puzzles, les perles.
Le nombre de places y est limité pour des raisons pédagogiques, mais aussi pour faciliter la mise en oeuvre du respect du matériel.
C’est un outil « fragile » qu’on manipule avec des règles précises, peu à peu connues et maîtrisées par les enfants, eux-mêmes.
On l’utilise la plupart du temps accompagné par la maîtresse en début d’année puis progressivement de manière de plus en plus autonome :
· pour découvrir une nouvelle situation d’apprentissage,
· pour s’entraîner,
· pour évaluer individuellement,
· pour remédier à une difficulté ponctuelle à partir d’un autre médiateur que le jeu, la manipulation, ou la « fiche ».
Pour les rituels :
Il est associé aux affichages communs et connus en maternelle. A l’aide du logiciel J’apprends avec Floc et son activité « Découverte » on combine quatre entrées d’apprentissages : comptines, histoire autour des nombres, diction de la comptine numérique et date.
L’apprentissage des compétences du domaine lié à la notion du temps est facilité et renforcé. La maîtresse n’est plus alors, l’éternel répétiteur médiateur indispensable pour apprendre à formaliser la date et se repérer dans le temps, puisque la situation de « J’écris la date » contient l’oralisation de toutes les étiquettes « consigne, jour, n° de jour, mois et n° d’année ».
Une découverte du calendrier de Floc, orientée et présentée dans un ordre précis favorise ainsi la mémorisation et la connaissance de la suite des jours, la suite des nombres ordinaux, le nom des mois… La mise en évidence de tous ces indices grâce à des traces réalisées avec le stylet favorise de mon point de vue, l’accès au sens, la compréhension. Cela permet aussi de développer une approche des unités de la langue. La formalisation de la date avec ces outils induit des prises de parole où l’enfant réfléchit, explique, argumente et écoute. Une répétition ritualisée et quotidienne sur quelques semaines permet de développer aussi les capacités de raisonnement. Les élèves retrouvent le cheminement des actions pour accéder à l’activité décrite par la maîtresse.
Un transfert de la situation, sous la forme d’une trace écrite, de plus en plus étoffée est alors facilité.
Dans l’atelier
Le TNI peut être utilisé au début de l’activité, pour réaliser collectivement un référent ou découvrir un savoir. Voici quelques exemples :
· construire une bande numérique avec différentes représentations des nombres
· classer les prénoms/photos en fonction de l’initiale
· trier des prénoms/photos en fonction d’un critère :
1. MS\GS
2. fille\garçon
3. nombre de lettres, de syllabes dans le prénom
· mise en page d’un lexique de mots avec insertion d’image (la maîtresse épelle les mots outils, l’enfant doit apprendre à connaître et identifier la plupart des lettres, être capable de passer de la majuscule à la scripte, prendre conscience de l’acte d’écriture en observant la maîtresse, découvrir la notion de phrases…)
L’atelier avec utilisation du TNI peut être aussi utilisé pour valider les apprentissages exercés de manière autonome, à la fin des ateliers. La maîtresse doit alors rechercher la situation, l’outil logiciel qui correspond à la compétence exercée. Avec quelques années d’ancienneté, l’adulte possède tout un panel d’outils. Cela lui permet de trouver rapidement le logiciel et l’activité correspondant à une situation qui favorisera la mise en œuvre de la validation des acquisitions.
Ici, il s’agit d’identifier le nombre de mots qui composent la phrase :
Un autre exemple, après avoir agencé des éléments dans un tableau à doubles entrées de manière autonome, avec un jeu et des cartes à manipuler, la maîtresse peut proposer une situation de transfert pour vérifier que l’élève sait utiliser et expliciter l’organisation d’éléments dans un tableau.
Cet outil permet donc d’associer le faire et le dire.
De même, le TNI peut être utilisé pour s’entraîner à maîtriser un savoir. En petits groupes, les élèves utilisent à tour de rôle l’outil, ils partagent et interagissent sur la situation proposée par la maîtresse. Cette organisation n’est envisageable que lorsque les élèves savent utiliser de manière autonome et respectueuse le matériel. Un tour de rôle, une répartition des tâches, la compréhension de la consigne seront mis en évidence avant l’entrée dans l’activité elle-même. Les activités orales préalablement réalisées en petit groupe favorisent la mise en œuvre du dispositif pédagogique. L’enseignant peut alors observer plus facilement les compétences orales de chaque élève.
Les activités réalisées avec les outils « tice » en général donnent lieu à l’élaboration et à la formulation d’un brevet de réussites qui met en évidence des paliers de difficultés croissantes. Les activités sont représentées par des photos ou des images écran. Chaque élève peut donc formuler, en différé, l’activité vécue. Le domaine d’activité et le champ de compétences évalué sont clairement formulés. Un rond de couleur permet d’identifier le degré d’acquisition atteint par l’élève.
Un des attraits du tableau magique tant au niveau de l’adulte que des élèves est la convivialité. Les élèves partagent une surface de travail, une expérience et développent le goût des échanges oraux partagés. On peut construire, imaginer collectivement un scénario pédagogique. C’est un outil qui induit une pédagogie de projet avec une forte dynamique interactive et coopérative. La démarche actionnelle focalise l’attention et accroît la concentration. Le goût de l’effort, ou la capacité à persévérer, repose et se construit à travers la dynamique de groupe où l’élève en difficulté participe à la hauteur de ses possibilités, sans être mis de côté.
En tant que maîtresse, je pense qu’il faut veiller à conserver les jeux sensoriels et de manipulation, les coins jeux, l’espace dessin ou peinture. Et ne pas rentrer dans une utilisation magistrale de l’outil ! Les élèves doivent agir, le tableau interactif peut être confié même à de très jeunes élèves. Il faut seulement organiser rigoureusement les modalités de son utilisation avec eux. L’appropriation de ces règles d’utilisation est bien plus rapide que pour le domaine des règles du « vivre ensemble ou devenir élève selon les programmes 2008 ». Sans doute, en raison de l’attrait et de la prise de conscience de l’apprentissage facilité quand on en passe par son usage !
Le TNi vient en complément, diversifier l’entrée dans les apprentissages, on transfère le savoir dans un autre type de situation. La trace écrite individuelle en est alors facilitée dans sa réalisation. Dans ma classe, on joue, on manipule, on écrit, on dessine peut être même plus qu’avant l’arrivée du TNI. Car cet outil permet de gagner du TEMPS dans la mise en œuvre et la mise en scène de la classe : toujours prêt !
Remédiation et élèves en difficultés :
Beaucoup d’élèves rencontrent des difficultés en motricité fine… le découpage, le coloriage, l’écriture scripturale sont des obstacles pour que ces élèves puissent montrer aux autres ce qu’ils savent. Les outils tice leur permettent de réaliser d’une autre manière les activités. Ainsi ils valident la compétence au même titre que les autres sans pression psychologique. Petite parenthèse : je m’étonne d’ailleurs que ces enfants maladroits sont bien souvent d’habiles utilisateurs des outils tels que la souris, le stylet, la baguette magique ou le doigt puisque mon TNI est digito tactile.
En effet, le tableau magique permet de développer des compétences recouvrant l’ensemble des domaines d’activités, même en motricité globale.
Son utilisation peut être collective (groupe classe, atelier de quelques élèves) ou individuelle. Il peut après une phase d’appropriation être utilisé complètement en autonomie. L’élève qui ne respecte pas les règles est alors exclu de l’atelier. Ca n’arrive que très rarement car les tous les élèves aiment apprendre avec cet outil.
L’utilisation quotidienne du TBI et des ordinateurs permet de confronter les élèves à une grande variété de situations. L’oral est un outil qui s’y associe comme un prélable à la réalisation des activités.
Il explore chaque activité à travers la réalisation de nombreux exercices, bien plus que s’il en étaient réduits à une fiche telle qu’on les voit fleurir nombreuses en classe de maternelle.
Ces outils permettent donc d’économiser le papier et l’usage de la photocopieuse est largement diminué.
La complémentarité des dispositifs, ordinateur et tni dans la classe, salle informatique avec 10 postes à proximité de la classe permet à l’adulte de porter un regard pertinent et plus individualisé, quotidiennement sur les capacités de chacun des élèves de la classe.
L’attention que la maîtresse peut réserver aux élèves dans leur diversité s’en trouve aussi plus affinée, ce qui permet d’envisager une véritable pédagogie individualisée. Si l’objectif reste identique, ces outils permettent facilement de décliner des paliers de difficultés qui permettent aux bons, moyens ou faibles élèves de progresser à leur rythme…
Ce qui est vrai, avec l’utilisation de ce logiciel s’adapte à tous les outils logiciels que j’utilise au cours de la journée, de la semaine ou de la période.
Ainsi, par exemple on peut demander à un enfant d’identifier un logiciel X qui permet par exemple de travailler, autour
· des nombres (J’apprends à compter avec Floc)
· des lettres (Mémory des lettres)
· des formes, de la notion de grandeur et des couleurs (Blocs logiques)
· de l’espace (Bouge avec Floc).
Il prend conscience de l’objectif de ce qu’il fait… il ne joue pas, il sait qu’il apprend et ce qu’il apprend. La création de brevet de réussites participe à la formalisation de la prise de conscience des apprentissages, c’est aussi un outil de communication interactif autour des apprentissages entre les élèves, l’école et la famille.