Par François Jarraud
Le rapport de la Cour des Comptes sur l’assouplissement de la carte scolaire confirme que cette politique est néfaste. Quelle autre solution peut-on proposer ?
Le rapport de la Cour des Comptes sur la politique de la ville, remis au Sénat le 3 novembre, analyse l’évolution des collèges depuis « l’assouplissement de la carte scolaire » voulu par le président de la République. Il montre que la ghettoïsation des établissements difficiles s’est accentuée. Sur 254 collèges ambition réussite, écrit Le Monde, 186 ont perdu jusqu’à 10% de leurs élèves. Essentiellement les moins pauvres. A Paris, le rectorat a inventé l’expression « collège dépressionnaire » pour désigner ces établissements d’une façon tristement éloquente.
Des effets déjà connus. A vrai dire, l’analyse de la Cour des Comptes avait déjà été faite il y a un an. Les inspecteurs généraux Jean-Pierre Obin et Christian Peyroux avaient remis à X Darcos un rapport qui annonçait cette dégringolade. « Dans la plupart des départements visités », écrivaient-ils, « la question de la survie de certains collèges est ouvertement posée… C’est aux deux extrémités de la hiérarchie des établissements que la mixité sociale est mise le plus rudement à l’épreuve : dans les établissements les plus convoités, il y a peu d’élèves de condition modeste ; dans les collèges les plus évités, ce sont les catégories favorisées qui ont disparu. » Ils posaient le diagnostique de la survie de ces établissements.
Double ânerie. Pour toute réponse, X Darcos s »était contenté de qualifier de « double ânerie » les conclusions du rapport des deux inspecteurs. Luc Chatel est plus aimable et annonce la publication d’un rapport interne à la fin de cette année.
Que faire ? L’ancienne carte scolaire avait montré ses limites. Elle n’avait pas réussi à lutter contre la ghettoïsation. Mais, inversement, les pays qui pratiquaient la liberté de choix totale (la Belgique, l’Angleterre) sont en train d’instaurer des règles. C’est cette gestion régulée que préconisait aussi Nathalie Mons, dans un article écrit pour le Café. « Tout dépend de la façon dont est conduite la réforme de la carte scolaire » écrivait-elle. « La recherche que j’ai menée sur les politiques de libre choix de l’école montre que dans les pays de l’OCDE il existe deux grandes voies de réforme de la sectorisation classique. Dans un premier cas, que j’ai appelé « le libre choix total », les familles choisissent l’école de leurs enfants et les établissements sélectionnent les élèves qu’ils souhaitent recruter. Il n’y a pas de médiateur entre les parents et le chef d’établissement qui – lorsqu’il est à la tête d’un établissement prestigieux – s’avère être le décideur final… La carte scolaire peut également être réformée selon une seconde logique que j’ai qualifiée de « libre choix régulé ». Dans ces pays, si le choix des parents s’impose comme la règle de base de l’organisation, les inscriptions sont cependant régulées en aval par les autorités locales en charge de l’affectation des élèves ». Luc CHatel aura-t-il la volonté et la puissance politique nécessaire pour une politique de rééquilibrage social ?
Article du Monde
http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/11/05/carte-[…]
La carte scolaire sur le Café
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lesdossiers/Pages/2009/[…]
Le Sgen veut une autre politque
S’appuyant à son tour sur le rapport de la Cour des comptes, le Sgen demande une autre politique prioritaire. » Proposer des options attractives pour éviter les déperditions d’élèves. Augmenter les taux d’encadrement en personnels enseignants et cesser d’y affecter majoritairement les néo-titulaires comme c’est le cas en région parisienne. Cibler les territoires en déshérence qui appellent à une concentration des moyens ».
Communiqué
http://www.cfdt.fr/rewrite/article/22499/actualites/edu[…]
L’Unsa demande une concertation avec le ministère
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2009/11[…]
De plus en plus d’écoles anglaises tirent au sort leurs élèves
Selon une étude, 6% des écoles anglaises font appel à un tirage au sort pour sélectionner leurs élèves. C’est six fois plus qu’en 2001, où cette procédure a été mise en place.
Au départ, il s’agissait de faire barrage aux familles aisées qui contournaient la carte scolaire en achetant ou louant un appartement près de l’école de leur choix. Mais ce qui devait assurer le brassage social a aujourd’hui mauvaise presse. Le tirage au sort serait souvent utilisé pour éliminer des jeunes indésirables en l’appliquant en complément d’autres critères.
Cet épisode rappelle une loi scolaire : la capacité des groupes dominants à récupérer des mesures, même bien intentionnées, pour leur profit.
Article du Guardian