Par Martine Ramos
Il était une fois une mutation…. ou Karine en voyage
Jeune prof-doc, Karine occupe son 1er poste en Picardie dans le LEGTA de l’Oise. Rapidement des envies d’exotisme se font jour et Karine échange les paysages picards contre le sable fin et le soleil de l’île de Moorea, île située au coeur de l’océan pacifique, à 15 km au large de Tahiti. Elle prend donc ses fonctions au lycée professionnel agricole d’Opunohu dans lequel elle exercera ses missions pendant plusieurs années.
D’Oponohu à Amboise, un rayonnement qui a le soleil en poupe en région Centre !
Lorsque j’ai demandé à Karine de me raconter son aventure, elle a commencé par poser les bases avec vérité et modestie ; le défi elle y a participé et ce avec beaucoup de bonheur, elle nous l’a « offert » même en région Centre mais en aucun cas elle ne l’a initié. Les choses sont dites… Laissons à César ce qui est à lui ( !) « Quand je suis arrivée en Polynésie française, le défi-lecture était une « institution ». Il en existait en fait deux. Un pour les collèges un pour les lycées professionnels. Tous les deux fortement médiatisés. J’avais lu plusieurs comptes-rendus dans la presse qui m’avaient séduit ».
L’histoire va donc pouvoir commencer.
La joie par les livres
Passionnée par la lecture (cf. sa formation Khâgne et Hipokhâne littéraire à Paris) Karine prend rapidement contact avec la documentaliste du Lycée Professionnel du Taaone, l’organisatrice du défi version LP. La collègue ravie de grossir la liste des participants ne tarde pas à lui envoyer un bulletin d’inscription. « J’ai donc participé à ce défi pendant deux ans avec des collègues profs de français et des classes de BEP vente et Agriculture des Régions Chaudes ».Karine m’explique que cette action avait, par rapport à d’autres actions culturelles quelque chose de spécial car « elle [le défi] donnait envie de lire aux élèves sous couvert d’un aspect très festif. J’avais en effet été complètement subjuguée le jour de « ma première finale » où j’avais vu 200 élèves de lycées professionnels chercher fébrilement dans les livres les réponses aux questions et crier de joie à chaque bonne réponse. On aurait dit un mélange de jeu télé et de tribune de foot ! Et non, le foot n’y était pour rien à ce moment-là… toute cette joie… c’était pour des livres ! »
Le Dieu Neptune
« Si je devais vous livrer une anecdote, je raconterai celle de la houle en pleine mer » (rires étouffés). Pour les élèves de l’île de Moorea c’était un peu compliqué de participer à ce défi question déplacement et organisation. Le jour de la finale est enfin arrivé ; c’est le départ ; il est tout juste de 6h du matin ; le Ferry prend la mer. Il était prévu entre la documentaliste et les élèves que la traversée ne serait pas oisive mais serait consacrée à relecture sélective de passages afin de se mettre bien dans le bain (ironie du sort) en arrivant à quai. C’était sans compter sur la colère de Neptune ! Ce jour là, le Ferry et ses élèves du lycée professionnel agricole bien décidés à gagner le défi devaient supporter tout le long du voyage une houle de 3 mètres, plus question de lire !!. « Nous sommes tous arrivés pour la finale à la maison de la culture de Papeete avec un sacré mal de mer !…mais toujours une petite envie de relever le défi ».
L’atterrissage dans les vignobles de Touraine
Juillet 2003, l’aventure professionnelle s’arrête. Karine G. rentre en « France » (« c’est comme ça qu’on dit là-bas ») avec mari, premier enfant né à Papeete et 2e enfant à naître. Elle avoue avoir eu besoin d’une année pour se réacclimater et surtout pour se familiariser avec son nouveau poste en plein cœur du vignoble de Touraine. Karine n’a aucune hésitation lorsqu’à la rédaction de son projet documentaire elle inscrit fièrement « Défi-lecture » sauf qu’il lui manquait une pièce à son puzzle : les adversaires ! Il ne lui reste plus qu’à convaincre ses nouveaux collègues documentalistes de la région Centre pour faire revivre ce défi si apprécié sous les tropiques.
Merci Anne !
En arrivant « j’ai senti que « l’environnement » professionnel était propice à ce genre de choses ». Le lycée agricole et viticole d’Amboise (37) dans lequel elle travaille toujours aujourd’hui est un établissement particulièrement dynamique. M. Deschamps, directeur de l’époque était convaincu ET de l’utilité de la lecture pour les jeunes et de la fiabilité du réseau régional de documentalistes avec ses « documentalistes actives et sympathiques ». Son soutien a été déterminant. Karine a ainsi profité d’une de nos réunions trimestrielles pour présenter le projet. Déception ! La première année, une seule collègue a spontanément adhéré : Anne, professeur-documentaliste au du LPAgricole de Beaune-la Rolande (45). « Nous avons fait un mini mais joli défi entre nos deux classes. Cela m’a permis de me rôder en tant qu’organisatrice pour les années suivantes»
Nous en sommes maintenant à la 5e édition
Le défi compte chaque année entre cinq et sept établissements (sur les neuf que compte la région c’est un très bon résultat). Cela fait une moyenne de cent-cinquante élèves ou apprentis chaque année. Pour les établissements qui jouent le jeu c’est une action très prenante. La documentaliste et les élèves sont mobilisés dès le mois d’octobre et ce jusqu’en mars ou avril. Le travail est important. L’envie de lire ne doit pas s’essouffler. Au cours des années, Karine a pris soin de modifier les règles du jeu par rapport au défi original d’Opunohu.
Pandora Box
« Aujourd’hui je propose trois livres à lire : un roman puisé dans la littérature jeunesse actuelle, un recueil de nouvelles et une BD ». Le principe reste lui inchangé : 1ere réunion des profs-docs, de français et de socio-culturelle pour sélectionner les titres ; Les élèves lisent les titres selon un calendrier ; En classe ils réalisent des questions-jeux et des questions classiques, faciles et difficiles ; 2nde réunion des profs pour sélectionner et vérifier la validité de toutes les questions ; Le jour de la finale qui a lieu à l’auditorium du LEGTA de Tours-Fondettes, le jury composé des profs pose des questions au micro ; Les élèves doivent répondre « livre en main » en temps limité. « L’ambiance est électrique. L’envie de gagner est palpable. Leurs petits cris de joie envahissent l’audi ».
Le signe intangible de notre utilité
« Bien sûr, il y a eu quelques couacs. Il nous est arrivé (à nous l’équipe de documentalistes et de profs de français et d’éducation socio-culturelle) de nous tromper dans le choix d’un ouvrage. Nous sommes aussi parfois tombés sur des classes qui refusaient absolument de jouer le jeu. Il y a même eu une année terrible où certains élèves s’étaient vraiment mal conduits lors de la finale qui avait lieu au Château d’Amboise ! Oui, c’est vrai, il y a des années où je me suis dit que j’allais arrêter mais je crois que j’aime trop cette action. Une collègue documentaliste, Myriam m’a dit un jour de cette action qu’elle y avait vu « le signe intangible de notre utilité ». La formule est belle et elle traduit bien ce qui me motive à organiser à nouveau cette action chaque année. Je crois donc que comme chaque année, je vais très prochainement battre le rappel pour le défi 2009/2010 ! ».
A Tahiti, le défi existe toujours, voila un lien vers le défi tahitien de cette année
http://lewebpedagogique.com/lplire/2009/03
Annexes : pour prolonger le plaisir
Sélection du défi 2009
BD : ALACANTE et PAGOT – Pandora Box : l’orgueil – Volume 1- Ed, Dupuis, 2005
Roman : LEROY, Jérôme – La grande môme – Ed. Syros, 2007 – (Rat noir)
Les recueils de nouvelles : THIBERT, Colin -Tirez sur l’ambulance ! – Ed, Thierry Magnier, 2008
Les titres qui ont le mieux marché
Romans
1/ OLLIVIER, Mickaêl – Frères de Sang – ed, Thierry Magnier, 2006
2/ LEROY, Jérôme – La grande môme – Ed. Syros, 2007 – (Rat noir)
MARTINIGOL, Danielle – Les oubliés de vulcain – Ed, livre de poche, 2007
BD
FERRANDEZ et BENAQUISTA – L’Outremangeur – Ed, Casterman, 2003