Par Jean-Louis AUDUC
A quelques jours de la publication du décret et de l’arrêté organisant les formations des enseignants, Jean-Louis Auduc, directeur d’IUFM, analyse les projets de texte. Est-ce la fin des IUFM ? Va-t-on former séparément enseignants du primaire et du secondaire ? Profs du privé et du public ?
Les différents groupes de travail mis en place par le ministère de l’éducation nationale ont déjà tenu deux réunions. La troisième est prévue le 13 mai. Des projets de décret et d’arrêté concernant notamment les modalités de recrutement des professeurs des écoles ont déjà été diffusés.
Faisons le point sur ces textes et sur les débats des groupes de travail, avant que la commission Marois-Filâtre n’entame du 15 mai au 15 juillet son travail visant à « élaborer des propositions et des recommandations sur les contenus et les modalités des concours, la nature des masters et la question de leur adossement à la recherche, l’articulation entre les masters et les concours (y compris l’agrégation), la place des stages étudiants dans les cursus de masters, et enfin la participation des universités dans la formation continue des enseignants débutants » comme l’indique le communiqué interministériel du 21 avril 2009.
Concernant les concours de recrutement prévus pour 2011
Pour le professorat des écoles, le projet d’arrêté diffusé prévoit :
« Deux épreuves d’admissibilité et deux épreuves d’admission, fixées comme suit :
I. – Épreuves écrites d’admissibilité :
– une épreuve de français et de culture humaniste ;
L’épreuve a pour objectif de mettre en évidence chez le candidat, la maîtrise de la langue française, la compréhension de textes divers, l’aptitude à composer et à rédiger en mobilisant, d’une part, ses connaissances dans une ou plusieurs des disciplines constitutives de la culture humaniste et des connaissances sur la langue française et, d’autre part, des éléments de base de la didactique de l’une au moins des disciplines concernées.
À partir d’un texte de deux à cinq pages ou d’un dossier ne dépassant pas dix pages, portant sur un thème de littérature, d’histoire, de géographie, d’histoire des arts ou d’instruction civique et morale, le candidat :
– en réponse à une question posée, présente une analyse du texte ou élabore une synthèse du dossier en mobilisant ses connaissances dans le(s) champ(s) disciplinaire(s) concerné(s) ;
– traite de questions dans les domaines de la grammaire, de l’orthographe et du lexique.
Dans l’une ou l’autre de ces parties, le candidat traite d’une ou de plusieurs questions portant sur la didactique d’une des disciplines concernées.
L’épreuve est notée sur 20 : 12 points sont attribués à la composition (analyse de texte ou synthèse de dossier) et 8 points aux questions relatives à la connaissance de la langue (grammaire, orthographe, lexique).
– une épreuve de mathématique et de culture scientifique et technologique.
L’épreuve a pour objectif de mettre en évidence chez le candidat :
– la maîtrise des savoirs disciplinaires nécessaires à l’enseignement des mathématiques à l’école primaire, la capacité à raisonner logiquement dans les domaines numérique et géométrique et à communiquer dans un langage précis et rigoureux ;
– la maîtrise des principales connaissances scientifiques et technologiques nécessaires pour enseigner à l’école primaire ainsi que la capacité à comprendre, analyser et exploiter des documents ;
– des éléments de base de la didactique de l’une au moins des disciplines concernées.
L’épreuve comporte deux parties :
– dans la première partie, le candidat résout deux ou trois problèmes de mathématiques ;
– dans la seconde partie, le candidat répond à des questions portant sur une documentation de quatre pages maximum, relative aux sciences expérimentales et à la technologie.
Dans l’une ou l’autre de ces parties, le candidat traite d’une ou de plusieurs questions portant sur la didactique d’une des disciplines concernées.
L’épreuve est notée sur 20 : 14 points sont attribués à la résolution des problèmes de mathématiques et 6 points aux questions relevant de la culture scientifique et technologique.
Chacune des épreuves d’admissibilité est d’une durée de quatre heures et est affectée du coefficient 3.
II. – Épreuves orales d’admission, comportant un exposé suivi d’un entretien avec le jury :
– une épreuve prenant la forme d’un exercice pédagogique, en relation avec les programmes de l’école ;
L’épreuve consiste en la présentation d’une séance de classe, replacée dans sa progression disciplinaire et dans le déroulement d’une journée scolaire. Elle comporte un exposé suivi d’un entretien avec le jury.
L’épreuve doit faire apparaître les connaissances et la culture du candidat dans le domaine disciplinaire de référence de la séance, sa capacité à concevoir et organiser un enseignement dans une classe de l’école maternelle ou élémentaire et à expliquer et justifier ses choix.
Le sujet, tiré au sort par le candidat, est extrait des programmes de l’école primaire (maternelle et élémentaire) et précise le niveau de classe concerné ; le tirage au sort donne au candidat le choix entre deux sujets.
Cette épreuve est d’une durée d’une heure et est assortie d’une durée de préparation de trois heures. Elle est affectée du coefficient 4.
– une épreuve de connaissance générale du système éducatif.
L’épreuve prend appui sur un dossier de cinq pages maximum fourni par le jury et portant sur le système éducatif. Elle consiste en un exposé suivi d’un entretien avec le jury. L’exposé permet au candidat de présenter une analyse du dossier et de formuler un avis. Le jury vérifie ensuite les connaissances du candidat relatives aux valeurs et aux exigences du service public, à l’organisation du système éducatif et à ses institutions.
Cette épreuve est d’une durée de quarante-cinq minutes et est assortie d’une durée de préparation de deux heures. Elle est affectée du coefficient 2. »
Pour le concours 2011, il est prévu, provisoirement une troisième épreuve à l’oral de langue vivante étrangère sans programme :
« L’épreuve s’appuie sur un texte d’une vingtaine de lignes dans la langue choisie par le candidat. L’épreuve débute par une présentation orale dans la langue des grandes lignes du texte, d’une durée de cinq minutes. Le candidat doit ensuite lire à haute voix quelques lignes du texte choisies par le jury. Cette lecture est suivie d’un entretien dans la langue avec le jury. L’ensemble de l’épreuve se situe au niveau B2 du cadre européen commun de référence, correspondant à un utilisateur dit « indépendant ».
Les candidats doivent indiquer au moment de leur inscription la langue étrangère choisie parmi les six langues suivantes : allemand, anglais, arabe, espagnol, italien et portugais.
Durée de l’épreuve : vingt minutes incluant les cinq minutes de la présentation orale ; préparation: trente minutes ; coefficient : 1. »
Concernant les « pré requis », il ne reste à l’article 5 de cet arrêté pour 2011 que ceux prévus aujourd’hui : le brevet de secourisme et le brevet de 50m.
Les notes éliminatoires (égales ou inférieures à 5) s’appliquent à toutes les épreuves et non plus à certaines comme c’est le cas aujourd’hui.
Pour les CAPES, qu’est-ce qui a été dit en groupe de travail ?
Il n’y aurait plus pour les CAPES d’épreuve « connaissance du système éducatif ». Dans leur quasi-totalité les épreuves des concours seront des épreuves disciplinaires. On aura par exemple en Lettres modernes, trois épreuves écrites (Composition + Analyse de texte — grammaire, lexicologie, stylistique et ancien français —, et version de langue ancienne ou moderne), et deux à l’oral (présentation d’une Leçon — épreuve commune à tous les CAPES et une explication de texte + grammaire, comme aujourd’hui). En Lettres classiques, on aura, à l’écrit, grec ou du latin.
En Histoire/Géo, il y aurait à l’écrit un programme sur des périodes précises, même si à l’oral une épreuve « sur documents » semble pour le moment concerner la totalité du programme d’Histoire et / ou de Géographie.
L’année de formation professionnelle après réussite au concours :
Un projet de décret modifiant le décret du 1er août 1990 a été diffusé.
Ce décret indique que l’année de stage des PE nouvellement recrutés sera gérée au niveau départemental ( et non plus académique comme aujourd’hui) :
« Les professeurs des écoles sont nommés fonctionnaires stagiaires pour une durée d’un an. A l’issue du stage, dont les conditions sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’éducation et qui comporte une formation, la titularisation des professeurs des écoles stagiaires est prononcée par l’inspecteur d’académie- directeur des services départementaux de l’éducation nationale du département dans le ressort duquel le stage est effectué, sur proposition d’un jury. La titularisation confère le certificat d’aptitude au professorat des écoles.»
S’il est positif de voir apparaître dans le texte explicitement que cette année comporte « une formation », rien n’est dit concernant sa durée, son évaluation.
La question de l’alternance entre des périodes de formation dans des établissements d’enseignement supérieur et des périodes de formation en milieu scolaire n’est pas traitée.
La question du contenu de la formation et des procédures d’évaluation formative permettant de personnaliser pour chaque stagiaire la progressivité de l’acquisition des compétences( en espérant le maintien des dix compétences arrêtées en décembre 2006) nécessaires à l’exercice du métier enseignant, est décisive.
Le projet de décret supprime également la possibilité existant aujourd’hui de faire une partie de son stage dans un pays de l’Union européenne.
Cette suppression est justifiée par le ministère par la « masterisation du recrutement » qui entraîne, à l’instar de ce qui est prévu dans le statut des certifiés, la suppression du stage dans l’UE dès lors que les stagiaires sont désormais des moyens d’enseignement.
A l’heure des élections européennes, on appréciera cette volonté d’ouverture vers l’Europe des futurs enseignants !!!
Quelles leçons tirer de ces projets de textes ?
1) La fin des IUFM est explicitement confirmée dans le projet de décret.
Dans les textes, le terme IUFM est remplacé par « établissements d’enseignement supérieur ».
2) La coupure entre le premier et le second degré est accentuée :
– sur le plan des structures de gestion de l’année de stage: académique pour le second degré, départementale pour le premier degré.
– sur le plan de la philosophie du concours : reconnaissance d’une certaine importance de la pédagogie dans le premier degré ; repliement sur les savoirs disciplinaires dans le second degré
– sur, peut-être, la nature du master. Le master « premier degré » n’ouvrant pas les mêmes possibilités de poursuite d’études et de réorientation que le master « second degré ».
3) Enfin, 2010 sera marqué par la disparition des accords Lang-Cloupet qui faisait que les professeurs de collèges et de lycées du public comme du privé étaient formés ensemble.
La situation de séparation existant dans le premier degré où il y avait des lieux spécifiques de formation pour les personnels du privé ( les CFP) existera donc pour le second degré à partir de la rentrée 2010.
Jean-Louis Auduc
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