Les IUFM, leurs antennes départementales et leur réseau d’enseignants-formateurs continueront de pouvoir inscrire les étudiants en M1. Après les annonces faites au lendemain de la manifestation du 19 mars (maintien des concours sous leur forme actuelle en 2010, première année de titularisation comprenant un tiers de formation…), celles de vendredi dernier sonnent comme un nouveau recul des ministres concernés (V. Pécresse et X. Darcos) sur la question de la formation.
Recul stratégique pour faire éclater un front de contestation qui continue d’être une aiguille plantée dans la communication gouvernementale, ou défaite réelle ? Il est encore trop tôt pour juger, tant les incertitudes sont nombreuses : la « transition » de l’année 2009-1010 permettra-t-elle réellement aux IUFM, désormais intégrées dans les universités, de se construire un avenir pérenne ?
Recul stratégique ou défaite ?Le ministre termine lundi 30 mars un cycle de rencontres « bilatérales » avec les syndicats, à la suite desquelles il publiera un communiqué. Mais la FSU a allumé une mèche qui a fait tourner les mails des profs et des étudiants d’IUFM dès vendredi : l’inscription possible des étudiants dans les IUFM, la promesse de sauvegarder les centres départementaux est une réussite indéniable, à porter au crédit de la mobilisation, au premier rang de laquelle la coordination menée par A. Ouzoulias, S. Plane et C. Pontais a permis de trouver des débouchés aux expressions « spontanées » nées dans les IUFM, reprises ensuite par les syndicats, avec des écarts de mobilisation importants selon les régions. Aujourd’hui, leur « Coordination nationale formation des enseignants » réclame toujours le retrait de la réforme et la convocation d’États Généraux
La FSU et le SGEN-CFDT, reçus en fin de semaine, y voient un recul sous la pression de la mobilisation : Gilles Moindrot, pour le SNUipp, estime que les engagements ministériels permettent de maintenir le potentiel de formation des IUFM. Même avis au SGEN ou T. Cadart estime qu’un dialogue serein va maintenant pouvoir s’engager pour les parcours « définitifs » qui commenceront à partir de 2011. Le SE-UNSA, qui est reçu lundi matin, craint que les IUFM « se replient sur la formation des professeurs d’école », celle des enseignants du second degré étant « atomisée » dans les parcours universitaires disciplinaires.
Premier et second degré, deux métiers opposés ?Derrière ces deux visions qui pourraient paraître opposées, une réalité qui semble se dessiner : la très virtuelle « unification » des filières de formation des enseignants, de la maternelle au lycée, dont rêvait l’IUFM a sa création, semble de plus en plus condamnée à rester un mythe. Si on accepte l’idée que des enseignants des écoles puissent recevoir une formation comportant un volant important de « professionnel», pas sûr qu’elle fasse consensus dans le second degré. Pour Christian Chevallier, du SE-UNSA, « considérer que pour les enseigants du second degré la formation disciplinaire est le coeur de la formation constituerait un recul historique et un non sens au regard du socle commun de la scolarité obligatoire ». Réclamant un recrutement à la licence, suivi d’une formation professionnelle de deux ans en alternance, son organisation s’oppose aux thèses du SNES, syndicat majoritaire, dont le récent congrès de Perpignan réclame pour les enseignants du second degré un recrutement à l’issue de masters disciplinaires, avant deux années de formations en alternance. Le SNES refuse la référence aux « 10 compétences de l’enseignant », pierre angulaire de l’actuel cahier des charges de la formation : « Il multiplie les pressions inutiles et les évaluations sur les stagiaires ». Pour ce syndicat, «l’accès aux métiers de l’enseignement et de l’éducation doit rester possible quel que soit le cursus des candidats aux concours. Il n’est donc pas question de créer de filière enfermant les étudiants ». Le syndicat est cependant favorable à des modules de professionnalisation dans les formations universitaires, assorties d’aides et de pré-recrutement.
Dilemme du verre à moitié pleinSoucieux de désamorcer une tension universitaire qui reste pour lui préoccupante, il semble que l’Elysée et X. Darcos soient prêts à sortir d’un conflit dangereux en donnant des gages aux syndicats majoritaires : dans le premier degré, l’essentiel est de sauver le potentiel de formation des départements, des maîtres-formateurs et de la formation continue sur le temps de travail. Les propositions actuelles pourraient permettre d’imaginer une solution que les préserve pour l’avenir, même si les négociations sur les moyens de formation risquent d’être âpres. Pour le second degré, à l’inverse, le maintien de l’essentiel de la formation dans le cadre disciplinaire des UFR ne semble choquer que les partisans d’une « professionnalisation » fortement renforcée dans la formation initiale des professeurs.
La nouvelle situation va donc poser un problème difficile aux IUFM et aux universités, qui bloquent majoritairement les « maquettes » de formation, indispensables pour faire agréer par le ministère les masters proposés par les universités : sans celles-ci, pas de formation possible en IUFM, au moins pour les professeurs d’école. Réponse dans quelques jours avec l’analyse que vont faire les personnels engagés dans l’action dans les IUFM et dans les universités, mais aussi avec le positionnement définitif des syndicats et des fédérations syndicales. Ca risque de batailler encore ferme dans les listes de diffusion des uns et des autres….