Xavier Darcos le confirme dans le JDD : « Je souhaite lancer un plan national de formation des enseignants au traitement de la difficulté scolaire pour 40 000 enseignants sur les cinq prochaines années ». Soit 8000 par an, soit 80 personnes par département et par an en moyenne. Bigre.80 personnes par an… Actuellement, dans chaque département, quelle est la situation ? Les enseignants ont accès à la formation continue, essentiellement sur le temps de travail. Le volume de formation disponible est conditionné par plusieurs paramètres :
– les crédits disponibles sur le budget « Premier degré » (BOP 140) pour la formation : rémunération de formateurs, frais pédagogiques, frais de déplacements
– le nombre de postes de « remplaçants » (généralement des « brigades de formation continue »)
– le nombre de professeurs d’école stagiaires 2e année (PE2) qui, lorsqu’il sont en stage en responsabilité dans les écoles (deux fois trois semaines par an, plus un jour par semaine pour le stage filé), dégagent les enseignants chargés de classe de leur obligation de présence devant les élèves, et permettent d’envisager des formations (soit locales, soit départementales) organisées par l’Inspection Académique avec les ressources des conseillers pédagogiques, des inspecteurs, des formateurs de l’IUFM.
Actuellement, et malgré une réduction sensible des moyens (variable selon des académies), les professeurs d’école disposent en moyenne de 2 jours de formation par an. Sachant qu’un peu plus de 30% des enseignants font au moins une formation dans l’année (hors des 18 heures d’animations pédagogiques obligatoires), la durée moyenne d’une formation est d’environ six jours (dans la pratique, on peut faire un stage « 3 semaines » ou des petits stages de 1 à 4 jours).
A la rentrée prochaine, mais surtout à partir de 2010, la situation de la formation continue va fortement évoluer, pour plusieurs raisons :– les retraits d’emplois à faire dans les départements risquent d’avoir des impacts sur le nombre de postes consacrés aux « brigades de formation continue ». Ils sont en effet plus facile à fermer que les postes d’enseignants devant une classe à l’année…– les budgets 2009, qui seront connus début janvier, seront sans doute revus à la baisse– le passage à l’Université des IUFM ne prévoit pour l’instant rien d’epxlicite pour la formation continue des enseignants des écoles. Pire même, les débats actuels sur les maquettes de formation initiale des PE, des PLP et des PLC ne permet sans doute pas aux IUFM et aux université d’y consacrer beaucoup de réflexion…
Plus de PE2, donc plus de stages « trois semaines » ?Mais c’est surtout l’évolution de la formation initiale qui va être un point crucial à la rentrée 2010 : les PE2 stagiaires ne vont plus exister, remplacés par les étudiants de Mastère. Au cours de leur deuxième année (M2), ils devront faire des stages entre l’admissibilité (janvier) et l’admission (juin), mais ils ne seront pas fonctionnaires stagiaires : ils ne pourront donc pas prendre des classes « en responsabilité », mais seulement en « tutelle accompagnée » par un maître formateur. Résultat : tous les départs en formations qui étaient rendus possible par leur présence face aux élèves seront impossibles. Selon les enquêtes de la DESCO, ce tpe de remplacement représente plus de 50% des « journées-stagiaires » disponibles. Sachant que le volume des formations continues « obligatoires » (formations directeurs, formations « débutants » T1 et T2, formations spécialisées…) représentent actuellement 50% du volume des plans de formations actuels, le reste devrait tourner au tour de… pas grand chose !
Prenons un exemple : dans un département comptant actuellement 100 PE2, seront donc supprimés 200 places pour un stage de trois semaines (deux stages dans l’année pour chaque PE2), mais aussi l’équivalent de toutes les journées de « stage filé ». Durant ces journées, les PE2 remplaçaient des directeurs durant leur décharge, ou permettaient des formations pour des enseignants. Ces moyens n’existant plus, il semble probable que les inspecteurs d’académie seront dans la capacité de créer de nouvelles brigades pour effectuer ces remplacements. Ils seront donc contraints, par exemple pour mettre en œuvre les décharges de directeurs prévues par la loi, de transférer des postes de « brigade formation » vers la « brigade de remplacement », limitant encore davantage les moyens pour les remplacements de formation.
DIF : vers une formation hors du temps de travail ?A ces sombres perspectives, s’ajoute une autre difficulté : la loi prévoit, pour tous les salariés, ceux du service public compris, la mise en œuvre du Droit Individuel à la Formation. Si dans certains secteurs, ce droit est un progrès, reste à savoir comment il va se traduire dans les écoles. La circulaire fonction publique est connue, et celle de l’Education Nationale est annoncée.
Le DIF est un droit capitalisable, alimenté chaque année civile à hauteur de 20 heures (soit environ 3 jours pour un temps complet).
Pour être éligible au DIF, une action doit obligatoirement être inscrite au plan de formation, et la candidature de l’agent doit être acceptée par l’IA ou le Recteur. S’il peut s’appliquer à des actions organisées sur le temps de travail, le DIF concerne surtout des actions qui pourraient être proposées aux personnels hors temps de travail. Dans ce cas, la circulaire prévoit, outre le reboursement de frais de déplacement et de repas, une indemnité spécifique (les stagiaires DIF « hors temps de travail » pourraient percevoir l’équivalent d’une heure supplémentaire pour deux heures de stage effectué).
On peut vraisemblablement tirer de tous ces faits un glissement progressif de la formation vers le « hors temps de présence élèves ». Xavier Darcos va sans doute communiquer beaucoup sur ses efforts pour former les enseignants à la difficulté scolaire. Avec un objectif de 80 enseignants par an et par département à former, il ne devrait pas prendre un trop gros risque de ne pas parvenir à ses objectifs…
loi du 2 février 2007 (dite de modernisation sociale)
décret n° 2007-1470 du 15 octobre 2007
décret n° 2007-1942 du 26 décembre 2007, destiné aux agents non-titulaires de l’Etat et de ses é́tablissements publics.