Par Françoise Solliec
« Suppression de 3 000 postes de Rased, 150 000 élèves sans aide ! » Sur ce slogan, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés devant le Sénat, le 3 décembre au matin, alors que débutait le vote du budget de l’éducation nationale, avant d’aller remettre au ministère la pétition papier, désormais signée à plus de 207 000 exemplaires.
Ce qu’on espère aujourd’hui, nous déclare une rééducatrice,, maître G à Paris, c’est sauver les 8 000 postes qui restent encore pour les Rased. Pour les 3 000, on n’espère vraiment plus grand’chose.
Pourtant, il n’est même pas certain qu’avec 8 000 postes, le cœur du dispositif pourra être vraiment conservé. Aujourd’hui, explique l’enseignante, je travaille auprès de 40 élèves, alors que 400 demandes nous ont été adressées. Je travaille en réseau sur un secteur scolaire de six écoles, soit 2 000 enfants, Si nous perdons un quart de nos moyens, nos secteurs vont devenir immenses et ce sera vraiment très difficile.
Actuellement, je me déplace dans les écoles et je prends les élèves, individuellement ou en petits groupes, à raison de 45 mn par semaine. Ce sont des élèves, de la moyenne section au CM2, qui ont des comportements très inadaptés : manque d’estime de soi, repli sur soi, silence, inhibition, ce qui signifie pour moi qu’ils ont peut-être cessé de se battre. J’essaie de leur faire élaborer des propositions d’expression et je pars de celles-ci, en utilisant des jeux, de la mise en scène, des productions, écrites ou autres … Les succès sont parfois ténus (les élèves arrivent à rester dans leur classe), parfois plus francs.
Je travaille en réseau, de manière complémentaire avec deux maîtres E et un psychologue. Les maîtres E prennent en charge des élèves dont la posture est beaucoup plus adaptée, mais qui sont bloqués dans leurs apprentissages. Nous avons des compétences, attestées par certification, qui sont souvent le plus intéressantes pour un travail en dehors de la classe. Elles sont actuellement totalement niées. Si nous sommes reversés dans les classes, nous redeviendrons d’abord des transmetteurs de savoir et c’est tout une compétence qui va disparaître, alors qu’elle est au service des élèves qui en ont vraiment besoin. Nous ne sommes pas formés pour travailler avec des élèves handicapés, comme cela semble se profiler. Xaier Darcos fait un habile mélange, pour le grand public, entre soutien scolaire et aide aux élèves, mais il sait bien qu’il ne s’agit pas du tout de la même chose.
La plupart des parents perçoivent bien cette distinction, à voir les 207 000 signatures obtenues pour la pétition Sauvons les Rased. Les milieux politiques de gauche affirment aussi leur soutien, tels les sénateurs communistes Guy Fischer ou Annie David, qui sont venus rencontrer les manifestants tandis que, dans son intervention à propos du budget de l’enseignement secondaire, Brigitte Gonthier-Maurin reprochait à Xavier Darcos de s’être « employé à déconstruire notre système public de l’éducation depuis deux ans ».