Par Claire BALAS
Rencontre avec Sandrine Chapoulie-Villepreux pour interroger notre métier et sa spécificité à l’aune de trajectoires connexes.
Enseignant-documentaliste de formation, Sandrine Chapoulie-Villepreux estactuellement en charge du fonds audiovisuel de la bibliothèque universitaire de l’université de Toulouse-2 (Arts, lettres et sciences humaines). Nous lui avons posé quelques questions concernant ses missions .
°*°*°*°*°*°*°*°*°
Café Pédagogique : Pouvez-vous nous décrire rapidement la composition du fonds audiovisuel d’une bibliothèque centrale universitaire ?
Sandrine Chapoulie-Villepreux :
La vidéothèque a pour mission d’œuvrer à la promotion et la valorisation du patrimoine audiovisuel et d’accroître sa place parmi la documentation pédagogique ou de recherche en complémentarité des autres supports de l’information.
La vidéothèque met à la disposition du public universitaire une collection cinématographique qualitative et représentative de toutes les périodes et de toutes les tendances du cinéma mondial, tant en films de fiction qu’en documentaires. Plus généralement, elle permet de développer une culture cinématographique et se veut un support pédagogique de l’éducation à l’image.
Le fonds de la vidéothèque est constitué de plus de 2000 titres signalés dans le catalogue de la bibliothèque qui est consultable en ligne.
Les documentaires sont consacrés aux disciplines enseignées sur le campus et sont classés selon la classification Dewey utilisée pour les autres documents de la bibliothèque.
Les fictions sont sélectionnées parmi les titres du patrimoine cinématographique et en lien avec les études universitaires. Elles sont classées par ordre alphabétique de nom du réalisateur suivi de la première lettre du titre du film.
Web-TV et vidéos en ligne sont accessibles sur les postes multimédias. Une sélection de sites de vidéos en ligne en lien avec l’enseignement supérieur est proposée à partir de ces postes.
CP : Quels sont vos fournisseurs privilégiés pour les acquisitions ?
S C-V : En raison des droits afférents aux documents audiovisuels nous nous adressons à des fournisseurs qui négocient ces droits pour un usage institutionnel.
Les deux plus importants fournisseurs (en nombre de vidéos disponibles au catalogue) sont l’ADAV et COLACO mais il en existe bien d’autres avec des catalogues plus thématiques comme la Médiathèque des Trois Mondes.
Il existe aussi des grandes institutions de l’enseignement et de la recherche qui possèdent un catalogue de vidéos : le CNRS, le SCEREN, le CERIMES (centre de ressources et d’information sur les multimédias pour l’enseignement supérieur), Canal U…
Le Ministère de la culture diffuse via la BPI son catalogue national des films documentaires, catalogue constitué de vidéos avec des droits négociés à des conditions très intéressantes pour les bibliothèques.
Sinon l’article L.132-24 du code de la propriété intellectuelle prévoit que l’auteur d’une oeuvre est présumé céder ses droits d’exploitation au producteur sauf pour la partie musicale où la demande doit être faite à la SACEM. Ainsi le producteur de vidéo étant défini comme la personne physique ou morale qui a l’initiative pour la mise en oeuvre d’un premier enregistrement détient aussi le droit d’autoriser ou pas l’utilisation du support d’enregistrement. Donc l’autorisation doit être demandée directement auprès du producteur avant toute mise à disposition du public. Cependant, cette démarche est assez contraignante et demande des compétences juridiques pour la rédaction du contrat !
Reste le problème de toutes les vidéos qui ne sont pas diffusées en France. Les formalités se compliquent car il faut respecter à la fois la législation nationale du document et celle de la France. A la vidéothèque pour ne pas être en infraction, nous avons préféré ne pas faire d’acquisitions à l’étranger.
CP : Les droits de consultation et de prêts sont-ils soumis à des règles particulières ?
S C-V : L’acquisition des oeuvres vidéos et DVD comme nous venons de le voir doit respecter les droits de représentation et éventuellement de reproduction. Dans les médiathèques, il existe deux types de communication possible :
– prêt individuel gratuit pour une utilisation strictement privée à l’usage du cercle de famille (au domicile privé)
– consultation sur place avec la possibilité de projeter, à titre gratuit, dans l’enceinte des locaux de l’organisme acquéreur, pour des visionnements individuels ou en groupe, à l’exclusion de toute autre utilisation par le biais de postes de lecture.
Ces projections sont réservées au public fréquentant les locaux de l’organisme acquéreur. L’activité doit être totalement gratuite, pas d’adhésion, pas de participation financière permettant un accès aux projections. L’information doit se faire uniquement dans l’enceinte de l’organisme acquéreur (pas de publicité extérieure, ni presse, ni affiche etc…).
Il faut noter que les droits sont acquis pour le support et non le film ! Dans la pratique, cela veut dire que si le support est endommagé, il doit être racheté avec les droits. A titre d’information le coût moyen d’un DVD acheté avec les droits de prêt et de consultation représente environs 60 euros avec de grandes variations dans les tarifs.
A la vidéothèque nous achetons toutes nos vidéos avec les droits de prêt et de consultation. Mais, seuls les enseignants peuvent emprunter les vidéos (prêt d’une semaine), les autres usagers ont la possibilité de consulter sur place les vidéos.
Ce fonds particulier nécessite une vigilance accrue en matière de juridiction : quels sont vos moyens de veille les plus efficaces en ce domaine ?
Mener une veille juridique en participant à des réseaux professionnels. Au niveau régional nous participons à un groupe de vidéothécaires coordonné par le Centre Régional des lettres, au niveau national nous adhérons à une association comme » Images en bibliothèques » qui regroupent les professionnels des bibliothèques et de la documentation qui s’intéressent au développement des images animées en bibliothèques.
CP : Comment peut s’exercer votre rôle pédagogique vis à vis des usagers ? (travail en relation avec les enseignants, éducation à l’image…)
S C-V : Il y a une grande différence entre une vidéothèque et un vidéoclub : les services, les publics sont différents et la réglementation aussi (la réglementation pour le droit de prêt est différente de celle pour le droit de location). Il existe de même une différence entre les vidéothèques de lecture publique et les vidéothèques de bibliothèques universitaires.
Le développement des collections de la vidéothèque se fait à travers une politique d’acquisitions cohérente, adaptée aux besoins des étudiants et des enseignants. Nous prenons en compte à la fois les programmes des disciplines enseignées à l’université à tous les niveaux, les programmes des enseignements spécialisés en cinéma, les programmes des concours de l’enseignement et enfin la nécessité de transmettre une culture cinématographique de qualité qui fait partie intégrante de l’éducation à l’image.
Les documents audiovisuels ont aujourd’hui pleinement pris place parmi la documentation pédagogique ou de recherche en complémentarité des autres supports de l’information.
Nous sommes à la disposition des étudiants et des enseignants aussi bien pour la consultation, que pour l’aide à la recherche sur le contenu intellectuel des documents. Nous avons un rôle de valorisation des documents audiovisuels à travers la mise en place d’expositions ou de filmographies pour des expositions locales à l’université ou s’appuyant sur des manifestations culturelles nationales: » Le mois du film documentaire » ou locales » Les rencontres du cinéma d’Amérique latine »…
Enfin, nous assurons une veille documentaire sur les ressources audiovisuelles en ligne développées spécifiquement pour l’enseignement supérieur, notamment en donnant accès sur les postes multimédias de la vidéothèque à des sites comme :
– Le CERIMES (centre de ressources et d’information sur les multimédias pour l’enseignement supérieur) qui a pour missions principales :
– de faciliter l’accès des enseignants, chercheurs et étudiants de l’enseignement supérieur aux ressources audiovisuelles et multimédias et de les aider à les intégrer dans l’enseignement ;
– de produire ou coproduire des documents audiovisuels ou multimédias à la demande d’enseignants ou de chercheurs ;
– d’informer sur les dispositifs de formation à distance des établissements de l’enseignement supérieur
– Canal U qui est la vidéothèque numérique de l’enseignement supérieur. C’est le site de référence pour les ressources audiovisuelles de l’enseignement supérieur. Enseignants et étudiants peuvent y trouver des programmes enrichis de documents pédagogiques et validés par les conseils scientifiques des Universités Numériques Thématiques.
CP : Pour terminer, un point de convergence et à l’opposé un point de divergence avec le métier de professeur documentaliste tel qu’il s’exerce en établissement scolaire ?
S C-V : Il y a certainement plus de convergences que de divergences !
Les seules différences tiennent essentiellement à une question d’échelle : la vidéothèque est un service situé dans la bibliothèque universitaire centrale (BUC) qui fait plus de 15 000m2, le public auquel elle s’adresse appartient à l’ensemble de la communauté universitaire. Cette échelle induit donc une spécialisation qui n’existe pas dans un CDI. A la BUC, je suis enseignante documentaliste responsable des ressources audiovisuelles, il existe d’autres services celui des ouvrages, celui des périodiques et celui des ressources informatisées…
Pour les convergences, je gère un fonds documentaire, j’accueille et je renseigne du public enfin j’enseigne dans le cadre des formations de méthodologie documentaire mises en place pour les primo entrants à l’université (ceux qui étaient au lycée et dans un CDI quelques mois avant !).
Le site de la bibliothèque universitaire centrale de Toulouse-2
http://w3.bu-centrale.univ-tlse2.fr/
Vidéothèque du CNRS
http://www.cnrs.fr/cnrs-images/videotheque/presentation.htm
Présentation des ressources audiovisuelles du Scéren-CNDP
http://www.cndp.fr/tice/ressources_av/
Page d’accueil du CERIMES
http://www.cerimes.education.fr/
Canal U : la vidéothèque numérique de l’enseignement supérieur
http://www.canal-u.education.fr/
Catalogue des films de la BPI
Images en bibliothèques : association de coopération pour la diffusion du patrimoine cinématographique et audiovisuel dans les médiathèques