PARCOURS DE NICOLE MARQUIS : POUR DONNER CORPS A SES ENVIES, SUIVRE SES CHOIX
Pouvez-vous me retracer précisément les étapes de votre parcours professionnel depuis la fin de vos études jusqu’à votre activité actuelle ?
Entrée dans l’enseignement par « la petite porte » comme elle le précise, à l’occasion d’un remplacement après deux ans d’études en faculté, Nicole n’a pas fait l’Ecole Normale, obtenant son Certificat d’Aptitude Pédagogique en candidat libre, en menant de front des formations pédagogiques et des études en sciences de l’éducation et de linguistique.
Pendant ses 5 années de professorat, entre 1978 et 1983, elle profite de sa vie à Paris pour suivre toutes les études qui l’intéressent. Elle « rencontre » l’orthophonie grâce à un ami qui s’intéressait à l’enseignement des mal-entendants. Admise en 1981 au concours d’entrée, elle suit les cours du soir la première année, puis enseigne à mi-temps la seconde année, puis quitte son poste afin de terminer sa formation, en vivant sur ses économies.
En 1984, diplômée d’orthophonie, après 3 années de formation intensive, elle réalise son premier remplacement en libéral, puis évolue comme salariée dans un hôpital à Vichy en 1985 avant, à nouveau, de monter un puis deux cabinets en libéral à partir de 1988 (tout en demeurant salariée à temps partiel pour le démarrage).
En 2003, Nicole reprend sa formation par des études de coaching au Dojô à Paris et obtient sa certification en 2005, ce qui lui permet d’exercer les deux professions d’orthophoniste (son cabinet ne désemplit jamais) et de coach personnel (« life coaching ») et professionnel. Elle accompagne les personnes qui souhaitent engager un changement, pour réaliser un projet de vie, une nouvelle carrière.
Nicole précise qu’elle a mené sa carrière selon ses envies, sans peur, sans freins, sans contraintes, en finançant elle-même ses formations.
Quelles compétences, mises en œuvre dans l’enseignement, Nicole a-t-elle conservées ?
« Mes facultés d’adaptation, et être à l’écoute des autres, des demandes formulées ou pas ». « Savoir observer et trouver ce qui va être déclencheur pour la personne, ainsi que l’esprit d’analyse et de diagnostic sont des compétences que j’ai utilisées dans mes différentes professions ».
Comment Nicole a-t-elle vécu ce « grand saut » ?
« Je n’ai pas exercé suffisamment longtemps pour être enkystée », note Nicole, « il n’y a pas eu de grand saut, mais des choix : j’ai tout fait à l’envie, à l’instinct ». « Je n’ai pas changé de métier, j’ai évolué vers d’autres activités. « Me positionner en libéral, c’était m’engager vers mon entreprise, c’est un choix par goût, une autre approche ». Dans un premier temps, le fait d’être salariée l’a sécurisée, lui permettant d’assurer cette mutation d’activité en douceur. Actuellement, l’orthophonie correspond à 65% de son activité tandis que le coaching, peu à peu, monte en puissance, c’est une profession nécessitant des compétences toujours élargies, en constante évolution (comme l’est le métier de professeur) et pour lequel la demande évolue.
Comment ses anciens collègues ont-ils perçu ce changement d’orientation ?
« J’ai, petit à petit, perdu de vue mes anciens collègues, il n’y a pas eu de suite, du fait aussi de mon changement de région ».
Comme dans l’entretien mené avec Jean-Luc Codaccioni qui a créé ICADEMIE, il s’agit de bien séparer « la vie d’avant » et « la nouvelle carrière » : en effet, AIDOPROFS l’indique régulièrement à ses adhérents : pour s’engager dans une reconversion, il faut fermer une porte derrière soi, sans regrets, sans fuir non plus une situation, afin que la nouvelle carrière puisse prendre appui sur des compétences solidement ancrées dans un parcours de carrière diversifié.
A-t-elle eu des regrets de quitter l’enseignement ?
« Les vacances, et des horaires bien définis avec de grandes plages de liberté sont bien loin», précise Nicole. « En libéral, on a beaucoup plus de travail ». Au niveau du contact avec un public jeune, Nicole n’y a pas perdu, puisqu’elle côtoie un public très diversifié, « de 0 à 97 ans » indique-t-elle avec le sourire. « J’y ai gagné en élargissement de clientèle, mes consultations et missions sont très variées ».
Comment considère-t-elle l’enseignement maintenant ?
« C’est un métier difficile comme d’autres, mais pas plus difficile qu’un autre. Nous y sommes privilégiés car nous réalisons un métier merveilleux : enseigner à des enfants, des jeunes plein d’engouement. Il faut savoir créer une relation avec eux, se mettre à leur portée ».
Nicole pense « que tous les professeurs ne sont pas également impliqués dans leurs pratiques pédagogiques », même si certains sont fantastiques et transmettent admirablement leurs savoirs.
Devenir professeur, c’est « un métier à faire si l’on en a vraiment l’envie, et quand on ne « le sent plus », il faut partir, avoir le courage de se l’avouer à soi-même et le quitter », sans remords ni culpabilité.
Que pense-t-elle de ses conditions de travail actuelles ?
« C’est bien simple, je fais ce que je veux ! Je suis libre et contente ». Nicole s’impose elle-même des contraintes, mais n’a plus de relations hiérarchiques, système dont elle n’avait pas le sens, par goût de l’autonomie, de sa liberté d’action et de décision. Elle indique qu’il y a tout de même des contraintes : « tenir une comptabilité, réaliser les démarches administratives auprès de la Préfecture, de l’URSSAF, avoir un numéro de SIRET, des autorisations diverses, et s’imposer une rigueur de travail… ».
Quels conseils Nicole donnerait-elle à une personne qui souhaite enseigner ? et à une personne qui souhaite quitter l’enseignement ?
« Une personne qui s’engage dans l’enseignement ne doit pas le faire par défaut : il faut qu’elle ait vraiment envie de faire ce métier. Je suggèrerais qu’elle se mette en condition d’être élève dans un autre domaine, pour qu’elle n’oublie jamais ce que c’est, afin de conserver, elle aussi, son statut d’élève, et toujours se confronter à cette situation d’apprenant et à différentes pédagogies ».
« Une personne qui souhaite quitter l’enseignement ne doit pas croire qu’elle a besoin d’être assistée pour tout. Il faut qu’elle se bouge, qu’elle devienne rapidement autonome, qu’elle soit motivée, qu’elle retrouve de l’estime de soi, car ses savoir-faire et ses compétences sont multiples. C’est ainsi qu’elle pourra se construire un nouveau projet de vie. »
Nicole ajoute « les profs sont souvent des râleurs : quand on leur propose des réformes, individuellement, ils sont pour, mais au final ils s’y opposent avant de réfléchir, avant de chercher à comprendre ce que ça peut leur apporter de positif, du fait d’un phénomène de groupe ». Changer de vie professionnelle changera bien plus que s’adapter à une nouvelle réforme.
Que pense Nicole de la création d’une association comme AIDOPROFS ?
« Le soutien que vous proposez est super, très, voire trop complet, je trouve qu’il ne faut pas trop mâcher le travail, ne pas faire « à la place » des gens : il faut que les profs apprennent l’autonomie, qu’ils se bougent de façon choisie et responsable. En effet, si l’on porte trop les gens, ils ne sauront pas marcher tout seuls ».
Tout comme l’association le précise régulièrement à ceux qui la contactent, Nicole fournit un conseil très appuyé à tout candidat à une mobilité professionnelle : « Prouvez votre autonomie, comme celle que vous conseillez à vos élèves dans le cadre de l’enseignement de votre discipline. Prenez le temps de mûrir votre projet, d’approfondir votre réflexion, de savoir pourquoi vous voulez ce changement, sans avoir peur de l’échec, car un projet bien élaboré devient hyper efficace et répondra alors à votre attente. Vous pouvez créer l’avenir que vous désirez ».