Par Cyril Froidure
Le développement durable, Assen Slim, collection idées reçues, éditions le Cavalier Bleu.
Usant de la veine fort à la mode des idées reçues, cette collection se donne pour objectif de « comprendre leu raison d’être, de déceler leur part de vérité souvent cachée derrière leur formulation dogmatique… ». Assen Slim, docteur en économie, rend compte dans la deuxième édition de son livre de celles touchant au développement durable et ce pour une raison : le problème de la définition non-stabilisée du concept en lui-même .
15 idées sont au sommaire.
-« La société civile n’a aucune influence sur le décisions internationales. »
Cette assertion ne semble plus valable tant les populations, les opinions et les associations font entendre leurs voix, l’exemple des ONG étant plus particulièrement développé par l’auteur : poids de celles-ci après de l’ONU, lors du Grenelle de l’environnement.
-« Le développement durable est vide de contenu scientifique. »
Faisant état des positions anti ou pro-développement durable, des discussions autour des changements climatiques et de leur ampleur, l’auteur se place du côté du GIEC insistant sur les limites du progrès scientifique face aux mutations en cours qui devraient amener une « innovation de style de vie » (P.Chassande)
-« Le développement durable est un escroquerie. »
Utilisation du concept, escroquerie morale, slogan commercial étaient plus que suggérés dans un entretien accordé par l’Agan Khan au Diplo en 2002.
Assen Slim réfute toutes ces affirmations une à une indiquant qu’il est paraît normal que les entreprises utilisent le développement durable à des fins commerciales mais fait remarquer que dans le même temps les producteurs profitant du commerce équitable retirent des avantages nets de leur participation à ces logiques économiques.
-« Le développement durable, c’est la couverture morale des entreprises. »
Ne réfutant pas l’excès de communication des entreprises autour du développement durable, l’auteur fait état de plusieurs paramètres incitant les entreprises à se lancer, voir à surjouer leur investissement : la valeur ajoutée positive, la pression des investisseurs et consommateurs, les performances à la hausse des produits financiers « verts ».
-« Le commerce équitable, c’est trop bien pour être vrai. »
Non car, par exemple, il existe une association possible entre solidarité et compétition économique illustrée par la croissance des ventes de produits équitables.
-« Le développement durable, c’est l’occidentalisation du monde. »
En fait, c’est le terme de développement qui est connoté renvoyant aux PAS, libéralisation, privatisation qu’ont connu nombre de PVD et peut-être reçu comme une occidentalisation si l’aspect durable du développement ne se réfère qu’à une poursuite du développement actuel basé sur la croissance.
-« Le développement durable, c’est la même chose que la croissance durable. »
Il semble difficile de superposer les deux car l’un revêt un caractère quantitatif et l’autre qualitatif et la question se pose d’évaluer le développement durable. On tente de calculer désormais l’IBEED (indice de bien être économique durable soit un calcul du PIB retranché de toutes les activités ne participant pas ou restreignant la qualité de vie.
-« Le développement durable c’est un développement au rabais pour les pays du Sud. »
Plus l’application de normes drastiques aux pays du Sud, plus la mise en place de droits sociaux. Pourquoi les PVD accepteraient-ils toutes ces contraintes ? L’auteur offre plusieurs éléments de réponse : d’abord, si les PID n’ont pas subi ces contraintes lors de leur décollage, pour les PVD, il faut qu’il en soit autrement car nous sommes dans une situation différente, aussi parce que le mode de vie occidental n’est pas généralisable, sous peine de catastrophe.
-« Il faut arrêter la croissance des pays riches pour assurer le développement durable. »
Cette opinion s’appuie sur les travaux du club de Rome, le rapport Meadows mais depuis lors leurs prédictions ne se sont pas réalisées et ce serait dans une autre forme de croissance, associant logiques économique et environnementale, que se trouverait l’une des solutions.
-« La mondialisation est incompatible avec le développement durable. »
Sur le sujet s’opposent libéraux et altermondialistes, la vérité se trouvant certainement entre les deux positions ; pour l’instant, le constat est fait d’un libéralisme ne prenant qu’encore peu en ligne de compte les différents aspects du développement durable.
-« Le développement durable, c’est zéro déchet. »
Impossible du moins à ce jour mais plutôt par la réutilisation de ces déchets qui reste avant tout un problème à gérer au niveau de chaque état.
-« Pour faire du développement durable, il faut renoncer au nucléaire. »
Là aussi, le nucléaire a ses partisans et ses opposants. Quoiqu’il en soit, au niveau mondial, on observe une relance de la construction de centrales à la fois car le nucléaire ne rejette pas de GES et il réduit la dépendance aux hydrocarbures toutefois, cette solution a ses revers : les déchets, les risques d’accidents. L’avis de l’auteur est clair : on ne peut passer actuellement du nucléaire au vu des besoins et des ressources limitées en énergies fossiles.
-« Les OGM, c’est le contraire du développement durable. »
Autre sujet polémique, les OGM ne sont pas pour l’auteur opposé au développement durable si leurs cultures sont très encadrées.
– Dernière idée, « L’explosion démographique est un obstacle au développement durable. »
Evoquant les courants de pensée ayant mené une réflexion sur la croissance de la population et ses conséquences, Assen Slim rappelle que l’explosion démographique n’aura pas lieu mais que d’autres évolutions peuvent-elles être pernicieuses : l’exode rural, le développement de maladies, le vieillissement de la population. Plus sûrement, la pauvreté est pour l’auteur le véritable obstacle au développement durable.
En conclusion, il faut dire que ce livre, parmi la multitude d’ouvrages consacrée au sujet, n’apprendra pas grand-chose au lecteur mais la démarche est-elle intéressante : poser les positions des uns et des autres, replacer dans un temps plus long chacune des opinions, indiquer la sienne avec quelques arguments. On peut ne pas être d’accord avec tout ce qui est écrit, mais au moins peut-on dire que le point de vue n’est pas stigmatisé.