Par Françoise Solliec
Des ressources pratiques sur le site éducation prioritaire de l’académie de Créteil
Avec des exemples de pratique plus ou moins didactisée, une base de données, à terme exhaustive, des actions menées, des références aux travaux des chercheurs et aux textes réglementaires, le site du centre académique de ressources sur l’éducation prioritaire, CAREP, de Créteil est particulièrement complet. Nous vous invitons ici à en découvrir un aperçu.
Innovation pédagogique, pédagogie du détour, pédagogie active, nombreuses sont les appellations dans lesquelles rentrent les actions menées par les enseignants exerçant en ZEP… ou ailleurs. Le site de l’académie de Créteil dédié à l’éducation prioritaire y consacre la rubrique « Pratiques pédagogiques », qui comporte notamment des dossiers thématiques, des exemples d’actions et une base des projets en cours qui présente toutes les fiches mises à jour depuis 2 ans ; un moteur de recherche thématique ou géographique permet une recherche assez aisée.
La sous-rubrique « des actions réalisées dans l’académie » recense plus d’une trentaine de projets « de portée très variable ». Tous ont la caractéristique de mettre l’élève en action, soit en tant que producteur d’émissions régulières comme dans le projet Radio Cartable, soit en tant que participant à des rencontres, avec des personnes âgées au collège Laplace de Créteil, avec des professionnels de la culture ou de l’écriture, soit dans un mixte des deux comme pour les élèves du collège Jean Jaurès de Pantin.
Radio-CartableDans la présentation qui en est faite sur son site propre, « Radio-Cartable est un projet ambitieux qui nécessite de la part des enseignants une conception et une organisation différente du travail scolaire et qui demande la mise en place de réunions de réflexion et de concertation. Mais c’est aussi un projet fédérateur qui dure, malgré toutes ces contraintes, depuis plus de vingt-trois ans ».
Les maîtres ont trouvé là un outil privilégié pour la maîtrise de la langue orale et de la langue écrite, mais aussi un outil privilégié pour ouvrir l’école sur l’environnement et ancrer les enfants dans le tissu social de la ville et des quartiers … Parler, écrire, lire sont des activités qui prennent du sens, qui « font sens », pour ces élèves souvent issus de zone d’éducation prioritaire, et « apprendre » est ressenti comme une nécessité. En effet, il faut débattre, discuter, présenter des documents, s’entraîner à l’animation en direct, rédiger des textes variés (conte, poème, feuilleton, bulletin d’information, compte rendu), leur donner une oralisation de qualité et, simultanément, travailler la langue, l’étudier comme un objet parce que le besoin et la nécessité s’en font sentir …Comme disent Bernard Charlot et Élisabeth Bautier, ils « n’entrent pas seulement dans l’écrit, ils sont dans l’écriture » Ils sont capables de mettre l’objet du discours à distance, d’utiliser le langage pour penser et apprendre, d’être dans un discours en « je », c’est-à-dire de marquer leur identité et d’être sujets de leur discours. Ils ne sont plus dans une logique d’exercices mais dans une logique d’apprentissage complexe ».
Sur le site académique on trouvera une description détaillée des activités et du fonctionnement, conclue par quelques appréciations. « Radio-Cartable jouit depuis longtemps de la reconnaissance des institutions, et, tout d’abord, de celle de l’Éducation nationale. Le site de Radio-Cartable fait l’objet d’un lien sur le site de l’Académie. L’équipe de Radio-Cartable a été invitée à participer à un colloque de l’Unesco sur les » Cultures et subcultures orales dans les pays de la francophonie » en décembre 1990, pour une contribution intitulée » De l’oral à l’écrit dans une ZEP : Radio-cartable à Ivry-sur-Seine « . Enfin, une recherche-action a été menée avec l’Université de Paris-Nord ; ses conclusions révèlent le rôle de la radio dans l’ouverture des enfants sur le monde et dans l’estime de soi ».
En 2006, le collège Amédée Laplace de Créteil était l’un des quatre lauréats du prix de l’innovation pédagogique de la ligue de l’enseignement pour deux projets, dont l’un, inter-générations, engagé « en partenariat avec la Résidence des Bords de Marne de Bonneuil (établissement d’accueil et d’hébergement pour personnes âgées dépendantes)».
« Un après-midi par mois, prévu dans leur emploi du temps, les élèves se rendent à la résidence des Bords de Marne à la rencontre des résidents. Ces sorties sont encadrées par le professeur de lettres accompagnée d’autres enseignants de la classe et de différents personnels (assistants d’éducation, personnels de service, personnel administratif). Les activités se déroulent essentiellement autour de l’écriture : les élèves et les résidents présentent leur production élaborée avec leurs professeurs et animateurs. Des textes sont écrits en commun, des scènes de théâtre sont créées et jouées par les élèves, des chansons connues des résidents sont interprétées par les élèves… Toutes les séances se terminent par un goûter où les échanges par petit groupe sont plus intimes. Deux ou trois élèves conversent avec un résident. Ils échangent des souvenirs d’école, apprennent l’histoire de leur quartier… Les professeurs et l’équipe d’animation de la résidence préparent ensemble les séquences et échangent leurs pratiques professionnelles».
Décoder l’activité ordinaire de la classeAu collège Jean Jaurès de Pantin, l’enseignante de lettres d’une classe de 5ème « s’est saisie d’une action partenariale proposée par le Centre de Promotion de la Littérature de jeunesse, la lecture d’une œuvre de Jeanne Benameur suivie d’une rencontre avec l’auteure, pour amener les élèves à se construire une identité de lecteurs et à s’engager dans une réflexion sur leurs propres pratiques de lecture et d’écriture », notamment au travers de la rédaction de lettres à J. Benameur. Les activités des élèves ont été observées et analysées par une formatrice de l’IUFM. Son rapport comporte plusieurs fils de lecture.
« – La pédagogie de projet : comment une enseignante se saisit d’une action partenariale, la rencontre avec un auteur, pour construire des apprentissages scolaires et culturels en articulant le projet et le programme.
– L’entrée dans les apprentissages : la démarche de l’enseignante propose un parcours possible pour chacun, à partir de situations ouvertes d’oral et d’écrit, d’une posture d’accueil du discours des élèves, et d’un étayage fait d’ajustements constants en réponse à ceux-ci.
– La mise en place de situations de réécriture/révision : la dynamique du dispositif repose sur le rôle de la consigne, ouverte et avec variation, le temps d’appropriation laissé aux élèves, les apports de la professeure entre les réécritures, apports à partir desquels les élèves réélaborent et épaississent leur texte.
– L’analyse des écrits des élèves : la formatrice mène une analyse très aboutie débordant celle que peut faire l’enseignant mais elle propose quelques entrées pour regarder les productions. L’écrit de l’élève est regardé comme un texte et l’enseignant peut utiliser les outils qu’il emploie au quotidien pour l’étude des textes. La posture adoptée considère les erreurs comme révélatrices ».
DossiersDans les dossiers pédagogiques, une dizaine de thématiques sont abordées. Signalons celui sur les apprentissages mathématiques en maternelle. « Lorsqu’on traite des pratiques mathématiques dans les réseaux d’éducation prioritaire, c’est généralement pour évoquer les difficultés tant des élèves que des enseignants. On constate tout d’abord qu’aux évaluations nationales les résultats en ZEP sont plus faibles qu’hors ZEP, en particulier pour ce qui concerne l’acquisition des concepts mathématiques. Dans les classes, les chercheurs observent des représentations récurrentes sur les élèves issus de milieux défavorisés : souvent les enseignants estiment que leur rapport au scolaire est différent, qu’ils ont de plus grandes lacunes et s’intéressent davantage au concret. Les chercheurs remarquent aussi le poids des contradictions entre logique d’apprentissage et de socialisation, logique de réussite immédiate et d’apprentissage sur le long terme… Ces positions se manifestent notamment dans le choix des activités et peuvent entraîner des dérives : une trop forte tendance à l’individualisation, un morcellement des tâches, une absence de phases collectives, notamment d’institutionnalisation, une réduction des exigences… Avec ce dossier consacré à l’enseignement des mathématiques dans les réseaux d’éducation prioritaire, le CAREP souhaite proposer des pistes et des outils pédagogiques. Vous y trouverez notamment une présentation d’initiatives menées dans l’académie de Créteil qui, sans être particulièrement innovantes, sont porteuses de réussite, et ce, dès la maternelle ».
Outre cette partie pédagogique très travaillée, le site offre de nombreuses ressources documentaires : textes et sites de référence, publications de chercheurs, ouvrages d’experts, etc. Une partie statistique donne par département, pour chaque REP, des indicateurs d’évolution et de changement, notamment sur les parcours scolaires et résultats des élèves (dernière année étudiée 2005-2006). On trouvera enfin sous « Egalité des chances et éducation prioritaire » nombre d’informations sur le programme de réussite éducative, la relance de l’éducation prioritaire et les partenariats conclus au service de l’égalité des chances.
http://ww2.ac-creteil.fr/zeprep
http://radio-cartable.ouvaton.org/
Edito : Afficher, ou décider ?
ZEP : repères historiques
Alain Bourgarel : une vie d’engagement pour les ZEP
Qui l’a dit ? (petit jeu)
Faire classe dans l’Education Prioritaire : que dit l’Inspection Générale ?
Et que dit le terrain ?
A Montereau, le lycée cherche les voies de l’excellence
A Créteil, les référents se positionnent
Difficultés à apprendre : l’aide en question
Les CAREP, ressources documentaires
Points de vue de la recherche