Laurence Filisetti : l’importance de compétences sociales à l’école
La grande difficulté, à l’école, c’est de gérer des comportements : agressions, rejets…Le « vivre ensemble » est partout dans les programmes, mais on ne dit pas grand chose aux enseignants sur «comment on fait ? » pour mieux gérer la classe.
Les compétences sociales correspondent à des comportements « approuvés » ou « appropriés » en situation contextualisé. Il faut donc prendre en compte les autres et la situation. Dans la classe, il s’agit des « règles et normes qui définissent le rôle de l’élève » : si on interroge les enseignants, ils citent « partager, coopérer, aider, respecter les règles de classe, respecter les autres, apprendre ses leçons, travailler dur, participer… ».
Or, quand on regarde ce qui se passe réellement dans les classes, on mesure mieux en quoi elles sont, ou non, en lien étroit avec la motivation et les apprentissages scolaires.
D’un point de vue émotionnel, en étant capable de se faire apprécier par les autres, l’élève génère des autres des intéractions sociales positives, se sent bien, ses ressources cognitives sont disponibles. D’un point de vue motivationnel, le rejet ou non par les pairs influe son intérêt et son engagement dans les tâches scolaires, son estime de soi et sa persévérance dans l’effort. Son comportement influence le regard de l’enseignant, suscite un regard négatif, augmente les critiques, diminue le temps d’aide fournie. En retour, ne pas se sentir soutenu va affecter sa motivation, son engagement.
Et la politesse ?
Perçue comme un ensemble de règles qui régissent le comportement et le langage en société, c’est une marque d’identité sociale, qui permet de se valoriser, de gagner l’estime de l’autre, de montrer à l’autre la reconnaissance de son groupe sociale. La « face » est une manifestation publique de soi, visant à la fois à être approuvé par les autres (face positive) et de protéger son espace, d’avoir une certaine liberté d’action (face négative). Mais certains comportements menacent ces faces : critiques publiques ou ordres. Dans les comportements, les individus feraient une « balance » entre le poids de la menace subie et la réaction à avoir, en mesurant les variables : vais-je avoir l’occasion de revoir cette personne ? quelle relation de pouvoir y a-t-il entre nous ? Quelle demande ai-je envers cette personne ? Si je menace quelqu’un, il risque de me menacer aussi… De la stratégie la plus « menaçante » (la moins polie) à la moins menaçante (la plus polie), on laisse plus ou moins à l’autre la liberte de ne pas agir, voir de ne pas comprendre…
Et les enfants ?
Plus l’enfant grandit en âge, plus il utilise de manière consciente les techniques adaptées (compréhension et production). 9 ans semble être l’âge moyen.
A l’école, les chercheurs doivent travailler une méthodologie particulière, celle des premières impressions (quelle est le premier sentiment que suscite un enfant poli/impoli). Un enfant jugé «sympathique» (donc poli) est perçu par l’enseignant comme « meilleur élève ». L’enseignant va avoir tendance à plus aider l’enfant « poli », de plus en plus au fur et à mesure qu’il grandit.
Pistes pour l’enseignant
Il semble nécessaire de sortir de l’implicite de la norme scolaire, de la faire surgir publiquement : les élèves connaissent-ils nos attentes ? En quoi sont elles en décalage avec leurs propres normes (port de la casquette : impoli ou pas ?) ? Les normes sont-elles identiques selon les groupes ?
Une piste essentielle est évidemment de travailler sur les déterminants des compétences sociales : regard sur soi négatif, agir sur les perceptions que l’élève a de lui-même et des autres, l’encourager, lui montrer de l’intérêt.
On peut aussi encourager les jeux de rôle et les discussions (débat), les méthodes d’apprentissage coopératif.
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