Quand on regarde les critiques faites aux politiques de démocratisation, on peut distinguer deux types de critiques :
– faut-il faire confiance dans la capacité du système éducatif à avoir la même ambition scolaire pour tous les élèves (critique élitiste du collège unique) ?
– est-il pertinent de miser sur davantage d’éducation, à un moment où les contraintes budgétaires sont fortes, risquant d’entraîner des frustrations chez les jeunes diplômés déclassés ?
Ces deux critiques, l’une plutôt de droite, l’autre plutôt de gauche, se rejoignent pour remettre en question les politiques éducatives de démocratisation.
L’exemple des pays scandinaves est intéressant parce que leurs réformes ont eu lieu de manière décentralisée, et non imposée à tout le pays : dans les années 60, ce sont les communes ou les régions qui ont progressivement expérimenté le passage au collège unique, avec un pilotage national. On peut donc aujourd’hui comparer les destins sociaux des personnes du même âge et du même pays, selon que les enfants aient suivi ou non leur cursus dans une collectivité qui ait ou non fait la réforme. Le diagnostic est sans appel : niveau moyen de formation plus élevé, carrière salariales plus réussies pour ceux qui ont été scolarisés dans le collège unique.
De même, la société anglaise, basée sur les très sélectives grammar school jusque dans les années 60, s’est totalement décentralisée, et on est en mesure de comparer les résultats des discricts, selon qu’ils aient où non abandonné rapidement les grammar school. Là encore, ce sont les discricts qui sont passés les premiers au collège unique qui ont les meilleurs résultats.
Pour la France, les résultats sont plus difficiles à mesurer, à la fois par le manque d’archives statistiques fiables, et par un tel étalement de la réforme sur 30 ans que les différentes variables sont extrêmement complexes à travailler. Cependant, les résultats de la période des années 80, phase cruciale d’avancement du collège unique avec la création des bacs pro et des filières courtes en université, montrent que les résultats des générations nées à la fin des années 60 croissent de manière régulière, avant le coup d’arrêt de la fin des années 90 où on retrouve une stagnation des résultats. Les résultats en matière de taux de chômage suivent : baisse du chômage des jeunes (1 point par an) jusqu’au milieu des années 90, avant le coup d’arrêt qui dure jusqu’à aujourd’hui.
Ce que deviennent les entreprises est directement corrélé au niveau de formation des employés. Parce que les emplois se régénèrent sans arrêt, la qualification des personnes diplômées permet l’élévation du niveau de qualification des emplois. Aujourd’hui, on arrive même à une polarisation entre « supérieur » et « secondaire », ces derniers devenant de plus en plus en difficulté devant l’emploi.
voir aussi la critique de l’ouvrage d’Eric Maurin dans le Café Pédagogique