Par Rémi Boyer et Catherine Terseur
Dans la rubrique carrière, nous avons pris l’habitude de réaliser une interview en lien avec la mobilité professionnelle des enseignants. Nous l’étudions à travers les travaux des chercheurs universitaires, mais aussi à travers celui des enseignants qui ont franchi le pas, afin de vous faire découvrir la richesse de leurs parcours respectifs.
Dans chacune des interviews que nous mènerons en 2007-2008, nous mettrons l’accent sur les compétences détenues et transférables des enseignants, celles dont ils n’ont souvent pas conscience, tout simplement parce qu’ils ne les utilisent que dans un cadre précis : la classe. Ce mois-ci, Rémi Boyer a interviewé Pascal Bouchard,ancien professeur de lettres, co-Fondateur avec Marc Guiraud de l’Agence Education Formation (AEF) en février 1998, et directeur des publications de l’AEF.
Pascal Bouchard : du lycée de Dieppe à la tête de l’AEF
En 1970, Pascal a 20 ans. Bien que tenté par une carrière de journaliste, il devient maître auxiliaire de Lettres Modernes à Dieppe, car il est déjà chargé de famille. Successivement, il obtient le Capes (1972) puis l’agrégation (1973) de Lettres Modernes et développe une activité pédagogique axée sur des ateliers d’écriture avec ses élèves. L’idée de rassembler les textes de ses élèves dans un roman qu’il publie lui vaut de faire partager sa passion de l’écriture à Bernard Pivot et ses télespectateurs lors d’une émission d’Apostrophes en 1978.
Les années suivantes, dans le cadre du journal « Les informations dieppoises », il crée avec des enseignants, des parents d’élèves, une assistance sociale, un magazine sur les questions d’éducation qu’il adresse à Jean-Marie Borzeix, directeur littéraire aux éditions du Seuil. Des écrits suivent : « la grammaire à tâtons » en 1980, un livre sur le pays de Caux…et en 1984, une fenêtre s’ouvre plus largement : Jean-Marie Borzeix, devenu directeur de France Culture, lui propose d’animer une émission culturelle de diffusion nationale. En parallèle, Pascal a obtenu sa mutation dans un lycée de la région parisienne où il enseigne pendant 4 ans, face à des élèves « plus tranquilles que des CPPN, dont la simple pensée l’empêchait parfois de dormir la nuit », mais avec « des corrections plus lourdes ».
En 1988, Pascal Bouchard décide de sauter le pas…en demandant une disponibilité pour convenances personnelles d’un an, car, dit-il : « en animant une émission sur France Culture, en réalisant des reportages sur des établissements innovants avec des collègues novateurs, je ne supportais plus d’être observateur et observé, je ne supportais plus le rythme du lycée en parallèle de celui, plus rapide et immédiat, de la production radiophonique ». Enfin précise-t-il aussi « je ne pouvais plus supporter cette déconnexion entre mon travail réel d’enseignant et mon salaire ».
Entre 1988 et 1998, Pascal renouvelle tous les ans sa disponibilité, multipliant les expériences professionnelles dans le journalisme, avec des piges pour Rustica, L’Etudiant, le Monde de l’Education, et bien d’autres, en soulignant que, pendant deux ans « il n’a pas été imposable », allusion aux aléas financiers de ce nouveau métier. Un passage de 18 mois comme chef de bureau des publications au Ministère de l’Agriculture, la soutenance en 1992 d’une thèse de Doctorat en Sciences de l’Education sur « la condition enseignante » (sous la direction de Philippe Meirieu) lui permettent de se diversifier, pour le plaisir. En février 1998, avec Marc Guiraud, c’est la création de l’AEF, le début d’une grande aventure au service de l’information dans deux domaines qui leur tiennent à cœur, qu’ils ne quitteront pas : l’éducation et la formation professionnelle. AEF diffuse ses dépêches à tous les décideurs de plus de 600 structures institutionnelles (ministères, organismes rattachés, entreprises, média…).
Pascal Bouchard, à 57 ans, jette un regard paisible et satisfait sur son parcours : « je n’ai jamais construit ma carrière en fonction d’un projet, mais en fonction des nécessités. J’ai eu plaisir à enseigner, j’éprouve du plaisir à être journaliste, mais je n’ai jamais eu une démarche rationnelle dans mes choix ».
Des compétences transférables :
De ses savoir-faire, savoir-être et savoir-agir d’enseignant, Pascal estime avoir utilisé « sa culture, son habitude de parler en public et de se présenter, sa faculté à percevoir rapidement les enjeux dans les paroles et les écrits des autres, sa capacité à surmonter tous les imprévus».
L’opinion d’AIDOPROFS :
Cette capacité d’adaptation, d’improvisation, est indéniablement l’un des nombreux atouts, méconnus, de la profession d’enseignant. Pascal Bouchard rejoint l’opinion de l’association AIDOPROFS lorsqu’il indique « je suis frappé par le nombre d’enseignants qui disent : je ferais bien autre chose, mais je ne sais rien faire d’autre ». Comme nous, il pense que tous les enseignants devraient avoir droit à des bilans de compétence, afin de se sentir plus libres de demeurer enseignants ou de changer d’orientation.
Or, il faut atteindre dix ans d’ancienneté pour que le bilan de compétences soit éventuellement pris en charge par l’institution, du fait, certainement, de son coût. Pourtant, quoi de mieux qu’un enseignant motivé pour dynamiser ses élèves ? C’est dans ce contexte que l’association AIDOPROFS est née, afin de répondre aux attentes et aux besoins des enseignants démotivés, ceux qui ont eu l’impression de se « tromper de porte », pour leur permettre, bien avant ces dix ans, de réfléchir « à d’autres pistes ». AIDOPROFS, ce sont des informations, des conseils, une remotivation constante, un accompagnement au projet de l’enseignant, pour lui éviter de repousser sans cesse son rêve aux calendes grecques.
Les conseillers d’AIDOPROFS ont réfléchi, au cours de leurs travaux de recherche de Master Pro d’ingénierie et du Conseil en Formation, aux compétences transférables des enseignants. Ils en ont trouvé beaucoup : vingt, permettant de cibler pour l’instant treize domaines d’activité professionnelle, afin de démontrer qu’un enseignant a bien plus de compétences, transférables vers d’autres fonctions, que ce que les entreprises ou les institutions imaginent.
Les bonnes pistes du mois sur le web pour les professeurs de Lettres :
D’après nos recherches, les professeurs de Lettres développent tout au long de leur carrière des savoir-faire utilisés dans l’édition, la documentation, la conception d’ouvrages pédagogiques ou non, l’animation, la communication.
1. Lorsque l’on envisage « autre chose », il faut se plonger dans le répertoire des métiers :
http://prfc.scola.ac-paris.fr/EmpMet/EM_Metiers.php
http://www.letudiant.fr/metiers.html
http://www.observatoire.cnfpt.fr/pages_local/accueil.phtml
2. Ensuite, il faut consulter une fois par semaine en moyenne ces sites pour optimiser sa recherche :
Documentation et bibliothèques :
http://mvtbib.adc.education.fr/mvtbib/servlet/mvtbib.Centrale
http://sibel.enssib.fr/index.php?m=c&c=435
http://membres.lycos.fr/biblio2001fr/
http://concours.bib.free.fr/
http://www.cepid.com/cepid2003/offre_emploi.php
http://www.abf.asso.fr/article.php3?id_article=97
http://www.adbs.fr/site/carrieres/accueil_candidats.php
http://www.adbgv.asso.fr/index.php?page=vacantes
Documentation, édition :
http://www.asfored.org/page.php?rubrique=mp_emploi_et_metiers&page=18
http://www.talents.fr/web/secteur/1,13-0,1-0,0.html?secteur=art-culture
Communication :
http://www.profilculture.com/annonce/annonce_liste.php?id_annonce_secteur=3&session_reset=1
http://www.bale.fr/index_bale.php
http://www.talents.fr/web/secteur/1,13-0,1-0,0.html?secteur=communication-media
Animation, culture :
http://www.cig929394.fr/emploi/offres_emploi.php
Tous domaines confondus :
http://www.apec.fr/Accueil/ApecIndexAccueil.jsp
http://emploi.lagazettedescommunes.com/
http://www.cnfpt.fr/fr/emploi/contenu.php?id=217
http://www.bourse.fonction-publique.gouv.fr/front/emplois/accueil_emp.cfm
3. Enfin, pour échanger avec des collègues qui ont déjà « sauté le pas », ou pour se sentir soutenu dans son projet (savoir rédiger une lettre de motivation, concevoir son CV, se préparer à l’entretien de recrutement, réaliser un bilan professionnel approfondi, etc.), il ne faut pas hésiter à contacter l’association AIDOPROFS: