François Jarraud
A la Une : Si l’inégalité socio – culturelle est énorme dès trois ans, qu’y peut l’Ecole ?
Dès l’âge de trois ans, les inégalités sociales creusent l’écart culturel affirme une étude britannique publiée le 11 juin. Dans ce cas que peut faire l’Ecole ?
L’enquête du Center for Longitudinal Studies, Institute of Education de l’université de Londres, porte sur 12 000 enfants âgés de trois ans. Elle établit qu’à cet âge, les enfants de parents diplômés du supérieur ont 10 mois d’avance pour les performances en vocabulaire sur les enfants de parents non diplômés. Un test sur la préparation à l’école, basé sur l’interprétation de couleurs, de formes, de lettres, de nombres, a montré que l’écart pouvait atteindre 12 mois, ce qui est énorme à 3 ans ! Si l’on compare les familles selon leur revenu, l’écart est de 10 mois entre celles qui sont au –dessus et en-dessous du seuil de pauvreté.
L’étude a aussi montré de fortes différences entre les groupes ethniques (officiellement définis au Royaume-Uni). Ainsi un quart des enfants d’origine africaine sont en retard contre 4% des « blancs ». L’écart est sensible également entre Britanniques : les enfants écossais ont de meilleurs scores. La même enquête révèle également qu’un quart des enfants est obèse ou en surpoids. C’est particulièrement vrai des enfants de familles défavorisées.
Elle établit que les inégalités culturelles sont indépendantes de l’Ecole. Ces travaux posent la question de la place de l’Ecole dans les politiques de lutte contre les inégalités à l’école. Dans l’ouvrage « Améliorer l’école » (PUF), Marie Duru-Bellat affirme que « ces inégalités sont déjà en germe dès l’entrée à l’école maternelle… Le développement (de l’enfant) est social dès la première heure, avec pour conséquences que les pratiques éducatives parentales exercent une forte influence. Or ces dernières portent la marque des inégalités matérielles ou culturelles qui caractérisent les familles… Ces écarts sociaux ne sont pas atténués par la fréquentation de l’école maternelle, car celle-ci s’avère bénéfique pour tous les enfants, quel que soit leur milieu social ». Ce sont donc les choix et les stratégies familiales qui creuseraient les écarts sociaux.
Doit-on pour autant totalement dédouaner l’Ecole et abandonner toute politique scolaire ? Les travaux britanniques montrent l’impact positif de l’éducation pré-élémentaire. C’est un taux plus fort de scolarisation à 2 ou 3 ans qui expliquerait le bon score des Ecossais.
Surtout l’Ecole peut au moins agir sur ses propres établissements pour diminuer les inégalités d’accès. Elle peut lutter contre les ghettos scolaires, diminuer la sélection qui frappe certaines filières et en éloigne les couches populaires, mettre en place des politiques d’éducation prioritaire plus efficaces. Mieux connaître les inégalités sociales à l’Ecole ne veut pas dire s’y soumettre avec fatalisme.
http://www.cls.ioe.ac.uk/news.asp?section=000100010003&item=409
http://www.cls.ioe.ac.uk/news.asp?section=000100010003&item=406
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