Par François Jarraud
Robien laisse une école plus inégalitaire
« Oui, en travaillant pour l’Education nationale, j’ai eu le sentiment de contribuer à dessiner le visage qu’aura notre pays dans quelques années. Le visage d’une France que j’espère plus forte, plus juste ». Gilles de Robien a beau affirmer qu’il a construit « une école plus efficace et plus juste », les experts de son ministère disent le contraire.
Une étude, réalisée par Olivia Sautory, montre que « les enfants de cadres supérieurs représentent 15 % des jeunes de 18 ans, tandis qu’ils représentent 20 % des bacheliers la même année. À l’inverse, si les enfants d’ouvriers représentent près d’un tiers de la même classe d’âge, ils ne forment que 18 % des bacheliers ».
Surtout, la démocratisation du lycée s’est traduite par une spécialisation sociale des filières, c’est ce qu’on appelle la « démocratisation ségrégative ». Ainsi, « au cours de cette période, l’accroissement des taux de scolarisation par âge s’est accompagné d’une augmentation des écarts sociaux d’accès aux différentes séries de baccalauréat : on observe alors un mouvement de spécialisation sociale croissant des séries ».
Ainsi trouve-t-on les enfants de cadres en S, les enfants d’ouvriers et de retraités en bac professionnel. L’effet se renforce dans le supérieur. « La série de baccalauréat joue donc un rôle capital dans l’orientation des bacheliers. Si les disciplines « d’excellence » du supérieur sont encore plus marquées socialement que les séries de baccalauréat les plus prestigieuses, c’est qu’il persiste, pour chaque série, une hiérarchie sociale dans le choix des orientations des nouveaux bacheliers. Cette hiérarchie est différente pour les bacheliers généraux et technologiques et pour les bacheliers professionnels, mais elle est identique en 1997 et en 2004.
Si la spécialisation sociale des séries de baccalauréat s’est stabilisée depuis 1997, leur poids dans l’orientation des nouveaux bacheliers a augmenté, entraînant par conséquent un renforcement du marquage social des publics de chaque discipline du supérieur ». Loin de voir diminuer les inégalités sociales à l’Ecole, le ministère Robien les a vu augmenter.
L’étude
http://www.education.gouv.fr/pid439/sommaire-numero.html
Création de la Commission d’évaluation de la formation des maîtres
« La Commission nationale d’évaluation de la formation des maîtres expertise les plans de formation élaborés par les établissements dans le cadre de la politique contractuelle. A cette fin elle apprécie la qualité et la cohérence de la proposition au regard des dispositions définies par le cahier des charges de la formation des maîtres, par les instructions nationales de mise en oeuvre et par les orientations de la politique éducative menée au sein de l’académie ; elle évalue la qualité des partenariats conduits tant avec les autres établissements universitaires qu’avec les autorités académiques ». UN décret publié au Journal officiel du 2 mai crée une commission de 20 membres nommés pour 3 ans.
La Commission est installée par un arrêté publié au J.O. du 8 mai. Parmi ses 20 membres, on retrouve Viviane Bouysse (IG), Pierre Léna (fondateur de La main à la pâte), le recteur William Marois (président de la commission), et Liliane Sprenger-Charolles (Cnrs).
Au Journal Officiel
http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MENS0751804D
http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MENS0752151A
Le Crap demande « de l’ambition pour l’école »
« Pour la plupart de nos lecteurs, pour sans doute même la majorité des enseignants, l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République n’apparaît pas comme une bonne nouvelle » estime le Crap Cahiers pédagogiques.
Pour autant le mouvement pédagogique ne baisse pas les bras. « Nous lançons d’ores et déjà un appel, « De l’ambition pour l’école ! », signé de nombreuses personnalités, pour pointer les principaux chantiers à venir. Une des bonnes nouvelles de cette campagne aura été le retour des débats politiques dans bien des établissements scolaires, tant dans les salles des professeurs que parmi les élèves. Espérons que cette passion pour le débat d’idées, pour l’engagement civique et citoyen, se poursuivra d’ici les prochaines élections législatives, et même au-delà, et pourra contribuer à peser sur les orientations politiques du prochain gouvernement, à faire émerger de nouvelles perspectives pour l’école et la société de l’avenir ».
http://www.cahiers-pedagogiques.com/
L’Unesco dénonce l’Ecole prise pour cible
Afghanistan : 62 attentas à la bombe en 2005, 88 en 2006. Colombie : 310 enseignants assassinés en 6 ans et 11 000 enfants enrôlés de force. Iraq : 180 enseignants exécutés de février à novembre 2006.
Selon l’Unesco, le nombre d’attaques visant étudiants, membres du personnel éducatif et institutions éducatives a considérablement augmenté au cours des trois dernières années. Il s’agit notamment d’attentats à la bombe, d’assassinats, d’enlèvements, de détentions illégales et de tortures visant des membres du personnel éducatif, des étudiants, de hauts responsables et des syndicalistes de l’éducation ainsi que des attentats à la bombe et des incendies perpétrés contre des établissements éducatifs, ou encore la fermeture forcée d’institutions éducatives.
Ces menaces, externes à l’Ecole, expliquent-elles toutes les violences qui pèsent sur elle ? Ou l’Ecole a-t-elle aussi sa part dans la génération des tensions ?
Dans un rapport pour l’Unesco, R.F. Gauthier a montré la nécessité de garantir des contenus d’enseignement qui aillent dans le sens de la paix. Et l’Unesco invite les états à changer les contenus d’enseignement. « Des mesures urgentes devraient être prises pour que l’éducation ne soit plus un facteur attisant les conflits et qu’elle permette, au contraire, de les résoudre. Cela suppose la création d’écoles inclusives et propices à l’apprentissage, tenant compte des cultures et des langues locales et fonctionnant dans un esprit de paix et de tolérance ».
Il suffit de penser à certains cas (les manuels scolaires d’Iran ou d’autres états de la région) pour savoir que cette éducation à la tolérance n’est pas encore universelle. Elle nécessite l’instauration de régimes et surtout de sociétés démocratiques, capables de gérer par le bulletin de vote leurs conflits.
Pas d’élection démocratique possible sans un développement réel de l’école. Pas de développement de l’Ecole dans ‘une société de ségrégation et de rejet. Dans le monde globalisé comme à l’époque de Jules Ferry, l’Ecole et la démocratie forment un couple interdépendant.
Le rapport
Des Partenariats pour l’Education pour tous
« Un pas de géant vers l’Education pour tous ! » L’Unesco se réjouit de la signature de « Partenariats pour l’Education » avec le Forum économique mondial. Ces partenariats associeront gouvernements, acteurs privés et organismes internationaux pour réaliser l’Education pour tous (EPT). Actuellement près de 80 millions d’enfants ne sont toujours pas scolarisés. Beaucoup le sont par intermittence.
Avec ces partenariats, l’Unesco souhaite trouver les fonds nécessaires à l’Education pour tous, un but fixé pour 2015 mais qui, sans investissements supplémentaires, a peu de chance d’être atteint. Il est vrai que l’EPT doit aussi affronter les traditions, particulièrement pour la scolarisation des filles.
Le programme
Les Etats-Unis investissent dans l’enseignement des maths et des sciences
« On ne peut réussir dans l’économie mondialisée que si on est compétitif et innovant. On ne peut innover sans investir dans l’éducation, la science et la technologie ». Nanci Pelosi, la présidente démocrate de l’assemblée américaine a fait voter le 24 avril des crédits spéciaux pour l’enseignement des maths et des sciences.
La nouvelle loi prévoit de recruter 10 000 professeurs supplémentaires pour enseigner les maths et les sciences. Ils devront doubler le nombre d’élèves choisissant des filières scientifiques. Pour y réussir le gouvernement financera 10 000 bourses supplémentaires qui seront attribuées à ces futurs professeurs.
Cette décision intervient après que plusieurs études aient invité le pays à renforcer son effort éducatif pour garder son avance technologique.
Article d’Education Week
http://www.edweek.org/ew/articles/2007/05/02/35compete.h26.html
Plusieurs états américains reconnaissent des « Enseignants cadres »
On les appelle Teachers Leaders. Ce sont des enseignants expérimentés qui ont été amenés à prendre des fonctions de conseil, d’assistance voire d’encadrement de leurs collègues en plus de leurs cours. Trois états américains délivrent des attestations de Teacher Leader et une quinzaine d’autres s’apprêtent à le faire, nous dit Education Week.
Une expérience qui sera sans doute observée outre-Atlantique. En effet, la question de la carrière des enseignants se pose partout. S’y ajoute la nécessité de reconnaître des tâches qui sont apparues avec le développement de l’Ecole et des tice. Ainsi le décret de suppression des décharges signé par Robien prévoit que les rectorats puissent reconnaître (s’ils en ont les moyens !) des postes de responsable de niveau, d’aide inspecteur par exemple.
Article d’Education Week
http://www.edweek.org/ew/articles/2007/05/09/36teachlead.h26.html
L’Etat de Géorgie introduit la bible dans les programmes
« L’enseignement doit être objectif et dépassionné. Il ne doit pas chercher à endoctriner les élèves ». N’empêche : l’état de Géorgie est le premier à inscrire l’étude de la Bible dans les programmes officiels. La mesure a été votée par les élus républicains et démocrates. D’autres états américains pourraient suivre cet exemple.
Article du Boston Globe
Sénégal : Le mouvement social se durcit
« Ni les ponctions sur leurs salaires, ni les intimidations ne viendra à bout de la détermination des enseignants à voir leur plate-forme revendicative satisfaite » écrit Wal Fadjri, un quotidien de Dakar. Alors que les écoles sont secouées par des actions répétées depuis des mois,la crise semble s’aggraver au Sénégal.
L’intersyndicale de l’enseignement, qui regroupe 18 organisations, appelle les enseignants à faire grève du 8 au 11 mai et organise une marche nationale pour le 15 mai. A l’origine de ce mouvement des revendications salariales qui restent insatisfaites : les enseignants demandent une prime versée également à tous. S’ajoutent des maladresses gouvernementales : des prélèvements sur la paye et la promesse pas toujours tenue de donner une parcelle de terrain à chaque enseignant. A la décharge du gouvernement : comment assurer à la fois l’Education pour tous et relever la rémunération d’enseignants toujours plus nombreux ?
Article
http://fr.allafrica.com/stories/200705080705.html
Article
http://fr.allafrica.com/stories/200705080117.html
Zimbabwe : Le système éducatif s’effondre
« L’éducation au Zimbabwe est dans un mauvais état. Les niveaux se sont détériorés de façon alarmante, comparés à ceux d’il y a dix ans. A cause de l’environnement économique difficile, des enseignants vendent maintenant des bonbons et tricotent des pull-overs ». Selon Inter Press Service, l’inflation galopante (1 000 % !) frappe le système éducatif du pays. Les enseignants partent travailler ailleurs et sont remplacés par des jeunes sans formation. Les écoles n’ont plus de quoi renouveler le mobilier scolaire.
Article
http://www.ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=3610
Scolarisation universelle, guerre et pénurie en Afrique
« Toute personne a droit à l’éducation scolaire. Il y est pourvu par l’enseignement national » L’article 43 de la R.D. du Congo a beau affirmer que c’est « un devoir national » : le pays n’a pas les moyens de cette exigence. Selon Le Potentiel, le gouvernement envisage de réhabiliter 20 000 établissements scolaires pour un coût total de 600 millions de dollars.
« Le gouvernement n’a encore rien dit sur la provenance des fonds et des moyens qu’il compte mettre en oeuvre pour… son ambitieux projet de réhabilitation des établissements scolaires. En effet, consacrer 600 millions Usd à un seul volet de l’éducation nationale suppose des coupes importantes dans d’autres secteurs qui devront inévitablement consentir une réduction sensible des crédits leur alloués dans le budget de l’Etat » poursuit Le Potentiel. La R.D. du Congo consacre moins de 10% de son budget à l’éducation, un taux très inférieur à celui de ses voisins. Les enseignants sont payés 18 à 65 dollars par mois.
En Côte d’Ivoire, selon un communiqué de l’Internationale de l’éducation publié par Notre Voie, le taux de scolarisation serait passé de 75 à 50% du fait de la guerre civile.
Article du Potentiel
http://fr.allafrica.com/stories/200704260090.html
Article de Notre Voie
http://fr.allafrica.com/stories/200704260442.html
L’éducation en Côte d’Ivoire : Fiche Unesco
http://www.uis.unesco.org/profiles/FR/EDU/countryProfile_fr.aspx?code=3840