Des formations pour tous les acteurs du système éducatif en milieux ruraux ?
Pierre Champollion, Inspecteur d’Académie,
Observatoire de l’Ecole Rurale (15 chercheurs de 4 origines différentes à Grenoble)
1. Résultats
L’espace à dominante rurale se divise en trois : espace sous faible influence urbaine, pôles ruraux et le rural isolé. En zone rurale, les élus comme les enseignants favorisent toutes les possibilités pour rompre l’isolement, par exemple les TICE. Mais les résultats ne montrent pas de progrès visibles pour les élèves qui ont bénéficié de ces technologies.
En revanche, les retards scolaires sont inférieurs, et les résultats scolaires de ces élèves sont au moins équivalents, y compris jusqu’en fin de collège.
Mais l’orientation des élèves issus de zones rurales montre une spécificité : 10% d’élèves de moins souhaitent accéder au second cycle général de lycée, et les parents eux-même semblent avoir moins d’aspiration scolaire. L’Ardèche a de meilleurs résultats que la Drôme, mais elle a pourtant moins d’étudiants…
2. Analyses
Au-delà de la variance liée à l’origine socio-familiale (48% de variance), l’ancrage territorial local semble amener une difficulté à la mobilité (28%) et à se projeter dans l’avenir (23% de variance), ces deux facteurs étant le plus souvent entremêlés, pour être des déterminants plus importants que le déterminisme social.
Conséquence : les bons résultats ne produisent pas automatiquement d’orientations vers des filières longues
3. Quelles formations ?
Comment faire pour que les élèves de classes rurales aient des orientations comparables à tous leurs congénères ? Sans doute en ne se focalisant plus uniquement sur la » réussite scolaire « , mais en dirigeant l’effort de formation vers les processus d’orientation. Mais on ne dispose pas de recherches sur la manière dont se territorialisent les politiques d’orientations.
Si des formations sont à mettre en œuvre, elles doivent être construites en partenariat : enseignants, élèves, COP, CPE, chefs d’établissements… dans des formations de bassin. Mais si on devait choisir, je pense qu’il faudrait prioriser les parents d’élèves (qui sont eux-mêmes un frein à l’orientation des élèves) et les enseignants, qui sont les acteurs majeurs de l’orientation.
Cette formation, si on veut qu’elle dépasse la caricature actuelle du » projet de l’élève » à partir de quelques éléments présentés, doit commencer dès l’école primaire, sans quoi les élèves risquent de limiter leurs choix aux métiers qu’ils connaissent…
Un tel projet ne pourrait évidemment avoir de sens que sur un temps long, avec une volonté politique forte et constante, nécessairement liée à une réflexion sur l’aménagement du territoire, la carte des formations, les équipements en TICE, les BCD mobiles, les sorties scolaires, les intervenants extérieurs, les outils didactiques ou les pédagogies adaptées…
La nécessité pour le système éducatif est bien de former les cadres qui seront en capacité d’organiser les conditions de ce » pilotage partagé « . Nous n’en sommes plus à réclamer la » défense » de l’école rurale, comme une entité intouchable, mais à mieux comprendre en quoi cette école peut être une réponse efficace pour les différentes catégories sociales qui composent désormais le milieu rural, dans leur diversité…
Comme le concluait Yves Jean, » faire que puissent se parler les cadres, les ouvriers, les chômeurs, les agriculteurs, à la porte de l’Ecole, mais aussi que toutes ces personnes puissent avoir des espaces pour définir ensemble leurs priorités en matière éducative… « .
Tout un projet de société…
Patrick Picard – publication le 01-12-2006
Sommaire :
- • Accueil
- • Combien de divisions ?
- • Une histoire loin d’être linéaire
- • Une « Ecole de la périphérie » ?
- • Des formations spécifiques à imaginer
- • Quelle efficacité pour l’Ecole rurale ?
- • Les syndicats font le point dans la Nièvre
- • Faire la campagne à la ville ?
- • L’enseignement agricole, fils aîné du monde rural ?
- • Liens