Attendus depuis des semaines, les deux audits sur « la grille horaire des enseignements en lycée général et technologique » et celle du collège demandent des coupes sombres dans les budgets du secondaire. Ces rapports, commandés par le gouvernement, réalisés par des inspecteurs des finances et des inspecteurs généraux de l’éducation nationale, font suite à l’audit sur les décharges horaires des enseignants dont l’application a été quasi immédiate.
Le rapport sur le lycée est exigeant : il fixe comme objectif une baisse de plus de 20% des dépenses. Relevant que « l’investissement massif dans le volume d’heures d’enseignement n’a amélioré ni la performance ni l’équité du lycée français » il en conclut que la baisse des coûts est légitime.
Comment faire ? Il s’agit d’abord de réduire fortement les heures d’enseignement. Le rapport préconise une méthode : « désamorcer les tensions portant sur l’horaire hebdomadaire en considérant que les arrêtés ministériels n’ont plus vocation à sanctuariser des volumes de services d’enseignants négociés entre disciplines, mais à offrir un référentiel national, un point de départ à partir duquel se construisent localement des projets adaptés aux attentes des élèves ».
Plus clairement, il s’agit de fixer un plafond horaire pour les 3 niveaux du lycée. Ainsi en seconde les élèves ne pourraient avoir plus de 900 heures d’enseignement annuelles, au lieu des 1 044 à 1 188 actuelles. En première et terminale le plafond serait à 950 heures (par rapport à 1 050 à 1 386 heures actuelles). Ces plafonds seraient calculés sur 36 semaines de cours grâce à l’allongement de deux semaines de l’année scolaire effective.
Comme parallèlement l’enveloppe horaire de chaque discipline serait annualisée, on obtiendrait ainsi une forte économie de postes. Le rapport réorganise donc les enseignements sur ces bases. Par exemple, les horaires de français en seconde passeraient de 4 h 30 hebdomadaires à moins de 3 heures (100 heures annuelles), ceux de langue vivante 1 de 3 heures à 1 h 50 minutes (70 heures annuelles). En première ES, les SES passeraient de 5 heures à moins de 4 heures, l’histoire-géographie de 4 heures à moins de 3 heures.
Les horaires en série technologique semblent mieux satisfaire les auteurs qui se félicitent que les nouveaux programmes de STG aient réduit les frais d’enseignement de 5% et ceux de SMS (ST2S) de 10%. Malgré tout ils envisagent à la rentrée 2007 l’ouverture d’une nouvelle filière, » sciences et technologies » qui permettrait de diminuer davantage les horaires d’enseignement.
En langues, outre la baisse des horaires, les dédoublements accordés en terminale seraient remis en question. Ils ne seraient plus accordés de droit et les rapporteurs préconisent une gestion globale des horaires de langues dans l’établissement. Une façon, semble-t-il, de réduire le nombre des options.
Ces horaires pourraient être complétés par des heures d’études surveillées pour encadrer le travail des élèves qui serait réalisé dans l’établissement (400 à 500 heures annuelles).
Pour les auteurs, il est clair que le tour de vis doit être rapide : il pourrait s’appliquer dès la rentrée 2007 si le ministre suit leurs recommandations.
Au collège, « le coût moyen du collégien a augmenté de 33% entre 1990 et 2004 » souligne le rapport, qui montre quand même une stabilisation depuis la fin des années 1990.
Aussi le rapport demande-t-il, comme pour le lycée, une réforme du pilotage » fondé sur les objectifs et l’évaluation des résultats ». Il s’agirait d’adopter « une démarche progressive visant à confier nettement plus de responsabilités aux échelons déconcentrés, en contrepartie d’une exigence pédagogique et budgétaire accrue ». Ainsi il préconise de libérer 20% des moyens pour les affecter à la réalisation des objectifs de progrès de l’établissement. » Dès la rentrée 2007, l’assouplissement des obligations horaires est amorcé, dans la limite de 20% de la dotation, par les équipes qui souhaitent prendre le risque du changement… Dans un second temps et après évaluation, sont abrogées pour l’ensemble des années au collège les grilles horaires hebdomadaires au profit d’un référentiel qui fixerait pour chaque enseignement une base horaire par cycle (annuelle pour le cycle d’initiation 6e, bi-annuelle pour le cycle central 5e- 4e, annuelle pour le cycle d’orientation 3e). Cette base est inférieure à la dotation actuelle, car elle est appelée à être complétée à hauteur de 20% par des moyens non fléchés ».
Ainsi pour le cycle central, on n’aurait plus que 250 heures de français pour les deux années, 230 de maths, 280 de langues, 100 de SVT, le tout sur 36 semaines. S’y ajouteraient 200 heures annuelles de dotation non affectée. Les horaires de langues seraient fusionnés et la carte des langues « rationalisée ». Chaque établissement aurait le choix d’offrir ou non une seconde langue en cinquième.
Toujours pour diminuer les coûts, le redoublement serait « plafonné » par établissement.
Ces mesures ont-elles une chance d’être appliquée dès 2007 ? Probablement non, ne serait-ce que parce que le budget 2007, qui a retenu les propositions d’un autre audit sur les décharges, est déjà bouclé.
Certaines propositions semblent embarrasser le ministère. Ainsi, au lycée, le décalage des examens sur l’été , nécessaire pour assurer 6 semaines de cours, semble difficile. Le ministre relève que » la clôture de la session, symbolisée par les résultats du second groupe d’épreuves du baccalauréat et intervenant mi-juillet, serait reportée au 31 juillet. Une telle mesure serait susceptible de soulever des réticences de la part des parents d’élèves et des enseignants, de même que des organisations professionnelles du tourisme ». En ce qui concerne les langues, le ministère relève que la mesure proposée » risquerait de conduire à la disparition de l’enseignement de toutes les langues, à l’exception de l’anglais et de l’espagnol » ce qui va contre des engagements politiques internationaux.
Enfin, » la remise en cause du caractère hebdomadaire de l’obligation réglementaire de service des professeurs, constituerait un véritable bouleversement à la fois pédagogique et structurel, dont la mise en oeuvre reposerait sur une décision politique forte, entreprise sur la durée et qui devrait tenir compte de négociations et de consultations importantes, notamment des enseignants, des chefs d’établissement et des fédérations de parents d’élèves ».
Faut-il pour autant l’écarter. Certainement pas. En effet, ces rapports ont été réalisés pour faire face à un besoin réel : le financement des mesures inscrites à la loi Fillon qui doit se faire à moyens constants et la volonté gouvernementale de dégager de la productivité dans l’éducation nationale.
Une application programmée. Aussi contiennent-ils des prévisions budgétaires éclairantes jusqu’en 2010. L’application intégrale de ces rapports, comme de celui sur les décharges, est programmée et devrait être appliquée sauf bouleversement politique. Leur impact est calculé : 9 203 emplois récupérés en lycée par réduction des horaires élèves, 9 609 par suppression des dédoublements au seul lycée, 3 000 emplois en langues par révision des dédoublements, 2 282 emplois du fait de la réduction des redoublements et un nombre non calculé de postes venus de la réduction du nombre d’options. » Au total, l’application des recommandations de la mission permettrait de dégager près de 24 000 ETP, sans compter les économies générées par une révision du système des décharges. Une partie de ces marges de manoeuvre supporterait le coût de déploiement de la loi d’orientation, une autre partie permettrait de piloter le système en redéployant des moyens en fonction d’objectifs pédagogiques exigeants, et enfin une partie représenterait des gains de productivité qu’un plan de gestion des ressources humaines adapté pourrait concrétiser pendant la période 2006-2010″.
Audit lycées
Audit collèges