« Dans les dynamiques spatiales associées aux sous réussites maximales, la concentration des difficultés dans certains espaces entre en résonance avec les logiques de « sauve qui peut » des familles et des professionnels scolaires et avec le ressentiment des plus captifs. Ces processus cumulatifs parasitent le fonctionnement de l’école. A des degrés divers, ils perturbent le déroulement de la scolarité de nombreux élèves, et dans les cas extrêmes, provoquent des « décrochage » (d’élèves, de classes et parfois d’établissements) ». Cette notion de « décrochage » d’un certain nombre de territoires est au coeur du rapport sur « les inégalités socio-spatiales d’éducation » issu d’un appel à projets de recherche et coordonné par Sylvain Broccolichi, Choukri Ben-Ayed et Danièle Trancart. L’Expresso avait rendu compte de ses premiers résultats le 29 mai.
Les chercheurs ont identifié des départements en sur réussite, qui sont caractérisés par » l’absence d’agglomération importante et une densité de population inférieure à la moyenne nationale », et 12 départements en sous réussite qui sont particulièrement des départements entourant la capitale. L’enquête souligne que ce découpage n’a aucun rapport avec la carte des académies ce qui souligne l’importance de la dimension spatiale.
Surtout l’enquête montre une très forte hétérogénéité à l’intérieur de ces départements. » Les départements où l’on relève globalement les plus forts déficits au niveau des acquisitions et des parcours des élèves sont ceux où l’on trouve les plus fortes inégalités de recrutement et de résultats entre collèges publics ainsi qu’entre collèges publics et privés. Et inversement, les inégalités entre élèves et entre collèges sont réduites dans les départements où les élèves ont globalement les acquisitions et les parcours scolaires les plus nettement supérieurs à ce que laissaient présager leurs caractéristiques sociales… Nous avons ainsi pu identifier dans certaines zones urbaines, des processus cumulatifs qui aggravent les inégalités entre établissements et entre classes, et qui perturbent la scolarité de beaucoup d’élèves, tandis que la qualité des conditions de scolarisation est dans l’ensemble mieux préservée sur d’autres territoires ».
Car l’étude montre comment les politiques d’établissements, en constituant des classes fortes et faibles, aggravent le phénomène de relégation. » Pour une part au moins, les déficits constatés dans des espaces urbains ségrégués peuvent donc s’expliquer ainsi : la prégnance des logiques de concurrence conduit beaucoup d’établissements à utiliser leur autonomie pour retenir ou attirer la petite minorité d’élèves la plus mobile, en opérant des choix (de modes de regroupement et d’utilisation des moyens) qui s’avèrent préjudiciables au plus grand nombre, et en particulier aux élèves les plus dépendants de l’action scolaire… surtout quand elles sont visiblement associées à des différenciations perçues comme « ethniques », ces inégalités flagrantes (entre espaces scolaires voisins et entre familles plus ou moins captives) nourrissent à la fois des soupçons de discrimination et des interprétations ethnicisantes des perturbations observées ».
Etude en pdf
Pour lire les pdf
Rappel : L’Expresso du 29 mai