Dossier spécial
Clichy 2005
Un excellent T.P. qui pose le décor social de Clichy, le lieu de départ des événements. La webquest de Marc Lohez fait étudier aux élèves les caractéristiques de la ville. Puis il leur demande d’analyser les programmes de politique de la ville mis en place.
http://www.hgatlas.net/article.php3?id_article=24
La question des banlieues
« Une bonne part de la population se vit ainsi, culturellement et politiquement, comme immigrée dans son propre pays, qui ne peut même plus lui offrir une définition de sa propre appartenance nationale. Tous désaffiliés, selon le terme de Robert Castel. Or, de la désaffiliation au desafio, au défi, il n’y a pas loin. Tous ces exclus, ces désaffiliés, qu’ils soient de banlieue, africains ou français «de souche», font de leur désaffiliation un défi, et passent à l’acte à un moment ou à un autre… Je ne suis pas sûr qu’ils aient, comme nous l’espérons, tellement envie d’être réintégrés ni pris en charge. Sans doute considèrent-ils au fond notre mode de vie avec la même condescendance, ou la même indifférence, que nous considérons leur misère… La culture occidentale ne se maintient que du désir du reste du monde d’y accéder. Quand apparaît le moindre signe de refus, le moindre retrait de désir, non seulement elle perd toute supériorité, mais elle perd toute séduction à ses propres yeux. Or, c’est précisément tout ce qu’elle a à offrir de «mieux», les voitures, les écoles, les centres commerciaux, qui sont incendiés et mis à sac. Les maternelles ! Justement tout ce par quoi on aimerait les intégrer, les materner !… «Nique ta mère», c’est au fond leur slogan. Et plus on tentera de les materner, plus ils niqueront leur mère. Nous ferions bien de revoir notre psychologie humanitaire » explique Jean Baudrillard, au terme d’un texte qui étreint la civilisation occidentale dans Libération.
Le même quotidien donne la parole à 4 sociologues, Eric Maurin, Pierre Rosanvallon, Emmanuel Todd et Jean-Pierre Le Goff, sur le même sujet des banlieues. La place d el’Ecole est au centre des discussions. » Le point de départ de mai 1968, c’était la révolte des recalés des classes moyennes face à la fermeture du véritable enseignement supérieur aux enfants des classes moyennes. Aujourd’hui, tout a changé : c’est la grande difficulté des enfants des classes populaires face au collège et au lycée qui est en cause. Cette difficulté dérive en partie de l’extrême précarité des conditions de logement et d’existence des enfants des familles pauvres. Ce n’est pas un problème que l’Education nationale peut régler seule… Les politiques du logement n’ont pas fait reculer les problèmes de surpeuplement qui touchent près du quart des enfants et sont une cause majeure d’échec à l’adolescence. Les politiques urbaines n’ont pas non plus fait reculer la ségrégation territoriale. Les enfants pauvres vivent aujourd’hui dans des quartiers où le taux de pauvreté est quatre fois plus élevé qu’ailleurs. Or il est extrêmement difficile d’adopter ne serait-ce qu’une attitude positive vis-à-vis de l’école quand on grandit entouré de camarades en échec » affirme Eric Maurin. .
Pour P. Rosanvallon, » En dix ans, 50 milliards d’euros ont été dépensés dans les zones urbaines sensibles, une somme absolument considérable, mais qui a été dépensée pour des structures, jamais pour des programmes et des personnes. Si l’on donnait à 100 lycées ou collèges des enveloppes permettant de retenir les meilleurs moyens, on aurait peut-être des résultats différents… L’exemple des banlieues montre que les grandes réformes uniformisatrices et gérées du sommet ne permettent pas de trouver des solutions. Il faut favoriser des moyens décentralisés, mis en oeuvre par les acteurs eux-mêmes, recréer des pôles de prise de parole et d’initiative ».
http://www.liberation.fr/page.php?Article=339243
http://www.liberation.fr/page.php?Article=339848#
Banlieues comment en parler ?
Les Cahiers pédagogiques publient plusieurs témoignages de pratiques pour évoquer les émeutes urbaines en classe. Le Café donne aussi des pistes
http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id_article=1995
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant/languesvivantes/anglais/Pages/2005/67_accueil.aspx
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant/schumaines/educationcivique/Pages/2005/67_accueil.aspx
Les émeutes, en parler ou pas ?
En parler ou pas ? C’est la question que se posent beaucoup d’enseignants devant la gravité de la situation, ses risques politiques, les peurs ou la révolte des élèves. Certains enseignants se lancent et proposent des dossiers documentaires. C’est le cas par exemple de Claude Bordes, professeur de SES qui met enligne un copieux dossier. Le Nouvel Observateur, comme d’autres médias, propose un dossier. Le Monde agrémente le sien de documents sonores. Enfin, dans Libération, les sociologues Didier Lapeyronnie et Laurent Muchielli évoquent l’humiliation des jeunes. « L’émeute et la violence urbaine charrient toutes les déviances qu’elles mêlent au sentiment d’une humiliation démultipliée. Une humiliation scolaire. L’école n’est pas vécue par une partie de ces jeunes comme un instrument de promotion mais comme le lieu d’une sélection qui transforme leur destin social en autant d’humiliations personnelles. A leurs yeux, la promotion par l’école est réservée à d’autres, qui savent tirer tous les bénéfices et qui sont généralement des «Blancs» quand eux sont généralement des jeunes issus de l’immigration. Ne serait-ce pas ces mêmes «jeunes de banlieue» qui, au mois de mars dernier, dépouillaient et frappaient les lycéens venus manifester pour défendre leur école ?… L’émeute naît ainsi d’abord du vide politique. La violence surgit quand la politique est absente, quand il n’y a plus d’acteurs sociaux ni même de conflit, quand il ne reste plus que la défense de l’ordre et de l’identité nationale. Certes, il est urgent de rétablir un minimum de politique sociale, de lutter contre les discriminations, d’en finir avec des pratiques policières indignes d’une démocratie et surtout de stopper cette ségrégation urbaine qui structure de plus en plus nos modes de vie. Mais les émeutes nous rappellent qu’il est avant tout indispensable de reconnaître et de respecter toute une population, de considérer qu’elle ne constitue pas un problème mais qu’il s’agit bien de citoyens de notre pays ».
http://press-ses.blogspot.com/
http://www.nouvelobs.com/articles/p2140/hebdo.html
http://www.liberation.fr/page.php?Article=337030
L’Ecole dans les quartiers
Les « Zones Urbaines Sensibles » font l’actualité. Quelle est la réalité de ces quartiers ? Le rapport annuel de l’Observatoire des ZUS est sorti quelques jours avant les émeutes de Clichy. Il apporte des données fiables et un important dossier sur l’éducation en ZUS. Il établit d’abord la spécificité des publics scolaires, c’est-à-dire la réalité ségrégative des quartiers. Les collèges ZUS comptent 64% d’élèves venant de milieux défavorisés (contre 43% hors ZUS) et surtout deux fois moins de jeunes de milieux favorisés (17% contre 32%). En 6ème, le pourcentage d’élèves en retard d’au moins 2 ans est deux fois plus important que dans les autres établissements alors que le nombre moyen d’enfants par classe est quasi identique (20 contre 21). Un quartier ZUS c’est aussi deux fois plus de chômeurs (21%) et un revenu moyen qui représente 61% du revenu moyen national (10 540 euros contre 17 184).
http://www.ville.gouv.fr/pdf/editions/observatoire-ZUS-rapport-2005.pdf
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lesdossiers/Pages/violence_index.aspx
L’état d’urgence
Le gouvernement a décidé d’appliquer la loi du 3 avril 1955 instituant l’état d’urgence. Cette loi restreint considérablement les libertés individuelles. En effet elle permet sur simple décision administrative, sans contrôle de la justice, d’interdire la circulation des personnes, mineures et majeures, d’assigner à résidence, de pénétrer dans les domiciles de jour et de nuit sans limites, d’empêcher les réunions, de contrôler les médias. L’état d’urgence donne aussi la possibilité aux autorités de remplacer les tribunaux civils par des juridictions militaires. Ce dispositif peut permettre tous les dérapages et donne d’énormes responsabilités au gouvernement. Et d’abord celle de réussir puisque aucune mesure plus forte ne peut être envisagée. Les décisions annoncées sont-elles susceptibles de redonner sécurité et espoir aux banlieues, c’est-à-dire d’offrir une sortie de crise ?
http://www.senat.fr/connaitre/pouvoirs_publics/pouvoirs_publics15.html#_Ref520542917
Le Journal officiel du 9 novembre publie trois décrets établissant l’état d’urgence à partir du 9 novembre