IIMA du 22 novembre 2005 au 22 janvier 2006.
Trente artistes arabes photographiant leur propre monde : d’ores et déjà cette exposition fait date, en cela qu’elle diffère considérablement de la plupart des manifestations consacrées elles aussi à la représentation photographique du monde arabe contemporain, par le nombre des créateurs qu’elle rassemble, d’une part, mais surtout, et d’autre part, par la nationalité de ceux-ci qui, tous, sont Arabes. (Certains n’ont pas quitté leur pays ; d’autres s’en sont éloignés puis y sont revenus ; certains mêmes en sont partis, emportant avec eux le pays natal ; d’autres encore, nés à l’extérieur du monde arabe, sont restés liés indéfectiblement à leurs origines.).
Notre univers médiatique est saturé d’images prises par des photographes occidentaux. Cette tradition ethnocentriste remonte au XIXe siècle, depuis que des Européens – souvent missionnés par leur gouvernement -, armés d’un appareil, se sont mis à traverser les mers pour tirer le portrait de peuples tout récemment soumis à leurs regards. Il va s’agir de délaisser pour une fois ce regard unilatéral, pour emprunter une vue plus intime sur le monde arabe et adopter le regard de ceux-là mêmes qui l’habitent, qui le vivent au quotidien ou, parfois, au travers de leur mémoire.
Rivages et déserts, rues grouillantes de monde, de jour et de nuit, villages perdus, capitales animées, joies et deuils, êtres et choses : images de studio, images vidéo, photographies ne constituent pas seulement des documents sociologiques plus ou moins intéressants en fonction de la qualité du regard du photographe. Ce sont d’abord, ce sont surtout des oeuvres d’art, morceaux d’architecture optique extrêmement élaborés. Tirées en noir et blanc ou en couleurs, sur de grands ou de petits formats, photographies uniques ou composées en polyptyques, les images présentées dans l’exposition ne sont emblématiques d’aucune école particulière, d’aucun courant ; ce sont autant de découvertes, dont chacune est singulière ; elles ne cherchent pas à affirmer une identité, elles sont l’émanation de cette identité.
Au Xe siècle, le mathématicien Muhammad Ibn Al- Hassan Ibn Al-Haytham, connu aussi sous le nom d’Alhazen, est le premier à décrire les propriétés du phénomène physique de la lumière et du sténopé, à l’origine de la chambre noire. Au-delà des questionnements qu’elles suscitent, les photographies de ces trente artistes arabes, permettent justement de rejoindre la terre d’histoire et de civilisation où ont été formulées les premières règles d’optique qui allaient fonder cet art.
http://www.imarabe.org/temp/expo/phar.html