Un budget contesté
» Le budget de l’enseignement scolaire, de la maternelle à la terminale, atteint 58,47 milliards d’euros. Cette augmentation de 3,65 % est le double de celle du budget total (1,8 %) ; cela manifeste très clairement le caractère prioritaire de l’éducation dans la politique de la Nation ». Gilles de Robien a présenté le budget 2006 de l’éducation nationale. Il se traduit par la création de 1000 postes dans le primaire et la suppression de 1383 postes de professeurs dans le secondaire, auxquels il faudrait ajouter, selon les syndicats, 1400 postes de professeurs stagiaires. Le ministre a aussi conformé son intention de supprimer les détachements : « je souhaite appliquer un principe simple, que tout le monde comprendra : un professeur doit être en priorité devant des élèves ! Or, le rapport de la Cour des comptes paru en janvier dernier soulignait qu’il y a encore de nombreux professeurs qui ne sont pas devant des élèves. Nous avons là un potentiel inemployé ; je souhaite lui redonner la possibilité d’enseigner ». Il a promis un allégement général des cours de langues en terminales à la rentrée 2006.
Les syndicats ont réagi négativement à l’annonce du budget. Pour le Snes, » le Ministre camoufle l’essentiel de ce qu’est aujourd’hui la situation des établissements et occulte les menaces qui pèsent sur l’avenir du second degré…Tout porte à penser que le PPRE sera financé par un redéploiement d’heures déjà dispensées aux élèves (par exemple les 2 heures d’ATP en 6ème, l’ heure dite « libre » en 5ème et 4ème). Dans ce cadre, les moyens de la politique d’Education prioritaire (ZEP) sont eux aussi menacés ». Le Snuipp estime que » le Ministre a multiplié les annonces : scolarisation des enfants handicapés, enseignement des langues vivantes, ZEP, soutien et aide aux enfants en difficulté, direction d’école; les décisions budgétaires les vident de sens ! ». Le Se-Unsa dénonce les réductions de postes : 3500 dans le primaire en 3 ans, 18 000 dans le secondaire depuis 2003. » Le financement des rares mesures inscrites dans la loi d’orientation (projet personnalisé de réussite éducative, plan langues vivantes) est prévu par la réorientation de moyens existants et donc, au détriment d’autres actions. Au total, les ambitions gouvernementales affichées pour l’école se réduisent comme peau de chagrin. En un an, d’une loi d’orientation et de programmation, on sera passé à une loi de très faibles orientations qu’aujourd’hui le budget 2006 ne finance même plus ! »
Pour le Sgen-Cfdt, « la réussite scolaire de tous les jeunes n’est décidément pas la priorité du gouvernement. Non seulement les départs en retraite soit loin d’être compensés mais, qui plus est, le ministère continue de supprimer des emplois… Quand on sait par ailleurs que les PPRE (programmes personnalisés de réussite éducative) devront être financés par des redéploiements, on peut bel et bien affirmer que la réussite scolaire ne constitue pas un objectif, ne serait ce que dans l’imaginaire de ce ministère ».
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=20059291516
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=20059291440
http://www.sgen-cfdt.org/actu/article906.html
Une circulaire réforme la commission permanente
Le B.O. du 6 octobre publie une circulaire qui met en application les modifications dans la gestion des établissements introduites par la loi Fillon. Il s’agit d’abord de l’augmentation des pouvoirs de la Commission permanente », un conseil d’administration réduit, chargé de traiter les questions pour lesquelles elle reçoit délégation. Le Conseil d’administration est remanié. Dans les établissements techniques et professionnels, son président n’est plus forcément le chef d’établissement mais peut être une « personnalité extérieure » c’est-à-dire quelqu’un méconnaissant l’Ecole. La représentation des élèves est modifiée.
Le même texte établit l’obligation d’un projet d’établissement et d’un contrat d’objectifs dans les établissements. Ce dernier « sur la base des orientations fixées aux niveaux national et académique, il définit des objectifs à atteindre à une échéance pluriannuelle (de 3 à 5 ans) sous forme d’un programme d’actions, dont la mise en oeuvre peut être facilitée voire conditionnée par un appui des services rectoraux. Les indicateurs permettant d’apprécier la réalisation de ces objectifs sont mentionnés dans le contrat ». L’Ecole française entre ainsi dans la voie glissante du pilotage par les résultats. On en voit pourtant les déviances outre-Atlantique ou en Angleterre. La statistique finit par y devenir la raison d’être de l’école. La tentation d’exclure les difficultés est forte.
Enfin le texte définit l’équipe de direction et le rôle du gestionnaire.
http://www.education.gouv.fr/bo/2005/36/MENE0502168C.htm
Nouveaux textes d’application de la loi Fillon au B.O.
Le B.O. n°35 publie le décret modifiant le fonctionnement des établissements scolaires en application de la loi Fillon annoncé par L’Expresso du 12 septembre. Il évoque la mission de liaison avec les collectivités locales du gestionnaire, le fonctionnement et l’élection des conseils, la possibilité de choisir le président du conseil d’administration « parmi les personnalités extérieures à l’établissement ». Tous ces points refusés par le CSE sont mis en oeuvre par le ministre. Une circulaire précise les missions et le recrutement des assistants pédagogiques.
http://www.education.gouv.fr/bo/2005/35/encart.htm
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2005/09/index120905.aspx
La journée d’action du 4 octobre
Combien étaient-ils ? Selon le ministère, 29% des enseignants du premier degré, 37% en collège, 32% en lycée, 25% des ATOS. Pour les syndicats, un enseignant sur deux a fait grève le 4 octobre. Les cortèges ont réuni plus d’un million de personnes selon les syndicats, 470.000 selon la police.
Les syndicats se félicitent : » le gouvernement ne peut laisser en l’état ses projets et ses décisions sur la précarisation accentuée, sur les salaires et l’avenir des services publics » affirme l’Unsa. » Le Ministre de l’Education nationale doit répondre maintenant aux exigences des personnels largement soutenues par l’opinion publique » réclame le Snuipp.
Ca semble mal parti : pour le ministre la journée d’action est un échec : « la grève d’aujourd’hui a été moins suivie que ne l’avaient annoncé les syndicats, c’est sans doute (à cause de)… la qualité de la concertation avec les partenaires sociaux depuis trois mois ».
Pour E. Davidenkoff, dans Libération, « la mobilisation du monde de l’éducation pourrait signer la fin des illusions pour le ministre de l’Education nationale : les déclarations d’amour réitérées de Gilles de Robien n’ont pas entamé la mauvaise humeur de personnels qui ont le sentiment qu’on leur demande toujours plus avec toujours moins ».
http://actu.voila.fr/Depeche/ext–francais–ftmms–emploieducation/051004150428.6e3xt132.html
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=20051041549
http://www.liberation.fr/page.php?Article=328426
L’orientation et l’entreprise
Annoncé dans L’Expresso du 9 septembre, le rapport de la députée I. Tharin sur l’orientation scolaire est maintenant publié. Il voit dans les entreprises le recours aux maux, bien réels, dont souffre l’orientation scolaire. Ainsi, I. Tharin déplore que « la formation des C.O.P. (conseillers d’orientation) a été essentiellement basée sur la psychologie ». Elle demande donc une refonte de leur recrutement et des stages obligatoires en entreprise. Finalement, à ses yeux, c’est la vie professionnelle qui justifie les enseignements : « il faut donner du sens en expliquant aux élèves l’utilité professionnelle et sociale de sa discipline ». Ces excès font oublier quelques propositions de bon sens : améliorer l’éducation à l’orientation en prévoyant un temps ad hoc dans les emplois du temps et un programme, valoriser ce que l’élève sait faire par exemple.
I. Tharin demande également une réforme du BEP : la seconde professionnelle devrait ouvrir sur des BEP moins étroits et au bac pro en 2 ans. Mais faut-il diminuer la valeur professionnelle de certains BEP et bacs pros encore recherchés ?
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/054000631/index.shtml
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2005/09/index090905.aspx
L’Université demande des moyens
« Nous sommes prêts à assumer la mission de recevoir tous les jeunes qui ont eu plus de 10 au bac, nous sommes contre la sélection à l’entrée de l’université, mais il faut qu’on nous donne les moyens de les faire réussir » demande, selon l’AFP, la Conférence des présidents d’université. Elle souligne l’écart de moyens entre université et classes préparatoires. Les premières ont les élèves les plus faibles et peu de crédits.
http://actu.voila.fr/Depeche/ext–francais–ftmms–emploieducation/051006154731.jcwtq6q6.html
La lente scolarisation des enfants handicapés
« Avant l’annonce de son handicap, Louis, pourtant bon élève, était parfois considéré comme « pas très courageux ». « Il a passé plusieurs récréations à devoir réécrire ses cahiers, explique sa mère. Juste parce qu’au bout d’un moment, il lui devenait difficile de lire et d’écrire en même temps. Mais sa maîtresse ne pouvait pas le savoir… A l’heure actuelle, – c’est un environnement – adapté car Louis voit encore. Mais si sa vue continue de baisser, cela deviendra dur ». Le Monde publie un intéressant dossier sur la scolarisation des enfants handicapés depuis le vote de la loi de février 2005 qui l’ordonne.
En fait plusieurs milliers d’enfants sont encore laissés hors de toute structure comme le révèle le procès gagné par une famille contre l’Etat pour défaut de scolarisation. A l’Ecole, la situation n’est pas toujours facile. Le Monde cite le cas de Clairvine, scolarisée en CE1. Elle souffre de troubles de la personnalité. Sa maîtresse « n’a bénéficié d’aucune formation, d’aucun conseil… Elle est allée se documenter sur Internet ».
Pour le président de l’Unapei, » La loi est un acte politique fort. Mais elle ne va pas résoudre les problèmes de scolarisation d’un coup de baguette magique ». La présidente d’Autisme France appelle les parents d’enfants handicapés à saisir la justice pour faire respecter leur droit à être scolarisés.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-695903@51-696019,0.html
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-695904@51-696019,0.html
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-695905@51-696019,0.html
L’OZP intervient dans le débat sur les ZEP
Plutôt que sembler découvrir cette réalité et vouloir tirer un trait sur les ZEP, mieux vaut engager, comme prévu, des expérimentations, en choisissant un petit nombre de territoires où il est urgent de rendre à l’Education nationale la capacité d’être efficace. L’OZP, pour sa part, a déjà présenté des analyses et des propositions précises en demandant la création de sites urbains prioritaires en éducation (SUPE) ». L’Observatoire des zones prioritaires répond ainsi à la diffusion médiatique des résultats d’une enquête (voir l’Expresso du 19 septembre). Dans une lettre au ministre l’OZP demande que l’on cible certains territoires en concentrant sur eux les moyens de l’Etat.
http://www.association-ozp.net/article.php3?id_article=1071).
http://www.association-ozp.net/article.php3?id_article=1456
http://www.association-ozp.net/article.php3?id_article=1455
Le petit livre rouge de la Desco
Comme le célèbre petit Livre, la couverture est rouge et le contenu décevant. Pour la Direction de l’enseignement scolaire « Les dossiers de l’enseignement scolaire font le point sur les orientations et les chantiers prioritaires de la politique éducative française et sur leur pilotage pédagogique par la Direction de l’enseignement scolaire… Pour chaque thème sont proposés une information qui situe les données et les enjeux de la question, précise l’esprit et les objectifs des évolutions en cours ; des contacts avec les personnes compétentes sur le sujet traité, au sein de la Direction de l’enseignement scolaire ; des ressources documentaires ».
Mais on est frappé de la distance qui sépare les affirmations de l’ouvrage avec les réalités du terrain. Prenons quelques exemples. Ainsi à propos de l’éducation à l’environnement pour un développement durable, l’ouvrage affirme « depuis la rentrée 2004, les élèves bénéficient d’une éducation à l’environnement pour un développement durable (EEDD) qui leur assure une formation progressive tout au long de leur cursus scolaire » alors que la mise en place de l’EEDD ne concerne encore qu’une petite minorité d’établissements. A propos des TICE, il présente un large déploiement du B2i ce qui semble là aussi éloigné de la réalité. L’ouvrage donne la même impression que certaines circulaires, celle de la confusion entre l’injonction et le pilotage éducatif.
http://eduscol.education.fr/index.php?./D0039/actualites2005.htm
Une rubrique d’aide juridique
La répartition des élèves dans les classes est-elle une mesure d’ordre intérieur ? Quelles limites à l’obéissance des élèves ? L’Ecole supérieure de l’éducation nationale ouvre une intéressante chronique juridique qui fait le point sur la jurisprudence en matière éducative. Ainsi cet arrêt qui rappelle l’obligation de politesse et d’obéissance des élèves. Objet d’une colle de 2 heures pour manquement à la première obligation, un élève peut-il être excusé par son père ? Cette chronique est d’autant plus précieuse que l’Ecole n’échappe pas à la judiciarisation de la société.
http://www.esen.education.fr/actualites/
Des assistants pédagogiques pour le soutien scolaire
» Les assistants pédagogiques assurent une fonction de soutien et d’accompagnement aux élèves en difficulté qui ont besoin d’une aide scolaire… L’objectif premier est de permettre aux élèves de préparer les examens dans les meilleures conditions : il s’agit donc d’offrir une aide méthodologique et une aide au travail personnel dans le cadre des programmes enseignés ». Pour cela 1 500 assistants d’éducation seront affectés dans 361 lycées où se concentrent des difficultés a annoncé G. de Robien le 23 septembre. Le même jour, un décret paru au Journal officiel précisait que ces assistants seraient recrutés parmi des étudiants se préparant aux carrières de l’enseignement titulaires d’un DEUG. Ils sont embauchés pour 36 semaines.
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=20059231531
http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MENF0501662D
Versailles sous les feux de l’inspection
« L’académie de Versailles a vu ces dernières années ses résultats scolaires baisser progressivement. Depuis la fin des années 1990, elle s’est peu à peu écartée de la moyenne nationale avec un décrochage particulièrement préoccupant des résultats de la fin du collège et du baccalauréat technologique et professionnel. Rien, pourtant à première vue, n’explique une telle situation. Sa population est nettement plus favorisée que la moyenne, elle bénéficie d’équipes d’encadrement et d’enseignement formées et expérimentées, elle a une longue tradition d’innovation administrative et pédagogique ». Le rapport d’évaluation de l’enseignement dans l’académie de Versailles, rédigé par l’Inspection générale, concerne la première académie de France avec un million d’élèves et un budget de près de 4 milliards d’euros. Il cherche à expliquer et à remédier à ce paradoxe. Les causes semblent à la fois locales et nationales.
Nationales d’abord : Dieu est loin et Paris est si proche. Lors de la création de l’académie, Versailles a été mal dotée. Cela a pu être compensé localement par des interventions politiques fortes qui ont creusé des inégalités dans l’académie. Mais, si proche de Paris, l’académie est pourtant délaissée par le ministère : « à leur arrivée, les recteurs successifs, pour la plupart, ont adressé au cabinet du ministre un diagnostic académique et des propositions d’action. Aucune réponse ne leur est parvenue, aucune feuille de route ne leur a jamais été donnée ».
Il y a aussi des facteurs internes. « Dans l’académie de Versailles, le référent implicite et assez bien partagé de la réussite scolaire est celui de l’intégration dans la voie générale et plus particulièrement dans la série scientifique. En résulte un surinvestissement sur le LEGT et plus particulièrement sur la seconde générale et technologique, niveau clé de l’orientation vers la voie générale, au détriment, d’une part du premier degré et du collège (et par conséquent de la voie générale) et d’autre part des deux autres voies de formation. En dehors de ce modèle dominant de la réussite, non adapté à l’extrême diversité de la population scolaire, le discours se focalise sur la réparation (améliorer les résultats, fluidifier les parcours et rééquilibrer les flux) et non sur l’ambition ».
Beaucoup d’énergie semble dépensée au bénéfice de la discipline scolaire et de la surveillance avec, semble-t-il une certaine contre-productivité éducative. Le rapport cite le cas d’un collège de 500 élèves, éloigné des caractéristiques ZEP, qui a distribué 122 sanctions, allant du blâme à l’exclusion en 2003-2004. Dans certains établissements « Il n’est pas mis fin à des vexations ou à des humiliations ou parfois à de fortes incitations à la démission ».
Les recommandations du rapport répondent-elles aux difficultés académiques ? Le rapport souhaite un rééquilibrage des académies franciliennes. Il demande davantage de pilotage académique et « une grande marge d’initiative maîtrisée » pour les différents acteurs, « un micro pilotage permanent ».
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/syst/igen/enseignement_versailles.pdf
http://www.adobe.fr/products/acrobat/readstep2.html
Langues : Réactions syndicales
Pour le Snuipp, » pour augmenter encore les progrès des élèves, par exemple en compréhension orale, les efforts doivent porter sur la formation initiale et continue des enseignants ainsi que les conditions matérielles et pédagogiques de cet enseignement. Il faut, par exemple, que les effectifs soient allégés ». Le Se-unsa souligne lui que « le plan de rénovation des langues proposé par le ministère et l’adoption du cadre européen de référence ne s’accompagnent d’aucun effort en matière de formation et de recrutement… Enfin, la cohérence n’est toujours pas au rendez-vous : un élève qui commence l’apprentissage d’une langue vivante à l’école primaire n’a toujours pas l’assurance de le poursuivre l’année suivante puis au collège ».
http://www.se-unsa.org/presse/comm/page.php?id=050927
http://www.snuipp.fr/article2659.html