Pour le Snes Fsu, le projet de loi « confirme les inquiétudes suscitées par ses premières annonces ». Le syndicat souligne plusieurs points négatifs : » les heures de soutien du CIRE (Contrat individuel de réussite éducative) seront financées partiellement par les heures d’itinéraires de découverte (IDD) et, selon toute probabilité, par tout ou partie des moyens des ZEP, même s’il est affirmé que le principe du dispositif ZEP n’est pas remis en cause. Toutes les heures dédoublées en lycée, en dehors des langues vivantes, sont supprimées. Toutes les heures statutaires (heures de labo, de cabinet d’Histoire Géo, premières chaires) sont remises en cause dans la mesure où elles ne seraient plus « désormais justifiées ». La seconde option obligatoire de détermination (3h) est supprimée dans toutes les classes de seconde ». Le Snes craint un collège à plusieurs vitesses et s’oppose à la réforme du bac.
Le SE-UNSA « considère que l’avant-projet de loi d’orientation ne règlera aucun des défis d’avenir posés à l’Ecole… Ce projet apparaît en totale contradiction avec les valeurs éducatives et l’action développées depuis le début des années 80. On cherche en vain les propositions permettant de traiter les inégalités sociales et de favoriser la réussite de tous les élèves ».
Une analyse que partage Philippe Meirieu. Pour lui, « l’avant-projet de loi de François Fillon révèle un changement de philosophie très important. La loi de 1989 établissait un ‘droit de l’enfant à l’instruction’, parlait d’éducation des élèves et concluait par l’apprentissage de l’exercice de la citoyenneté à l’école. Ainsi, l’école française était-elle une institution organique de la République et formait d’abord des personnes à la participation à la vie publique. Or, l’actuel avant-projet… supprime la référence au droit de l’enfant, parle de formation scolaire et non plus d’éducation, place l’autorité des professeurs au premier plan, évoque le travail nécessaire et la mise en valeur des qualités personnelles et des aptitudes de l’élève: tout cela est inquiétant car on peut y lire une sorte d’idéologie des dons, une évacuation implicite de tout effort spécifiquement pédagogique et l’affirmation que les problèmes seront résolus avec simplement de l’autorité et du travail ». Le directeur de l’IUFM de Lyon est « scandalisé » par la suppression des TPE (P. Meirieu a signé la pétition initiée par le Café et le CRAP). S’agissant du bac, « On devrait revoir toutes les épreuves et l’évaluation sur le modèle des TPE et développer ainsi la recherche documentaire, la démarche expérimentale, le travail en groupes. Le baccalauréat doit devenir un moyen pour faire évoluer la pédagogie vers plus d’exigence authentique. Introduire du contrôle continu pour diminuer le bachotage, c’est bien. Introduire des épreuves impliquant un vrai travail de recherche et permettant de favoriser une approche plus citoyenne des savoirs serait encore mieux ». Enfin, il craint un effet négatif des mesures d’organisation des établissements. « Loin d’aller vers une mobilisation des acteurs au service de l’école, je crains que ces mesures encouragent le soupçon réciproque et suscitent bien du découragement chez ceux et celles qui se battent au quotidien, dans les situations les plus difficiles, pour l’honneur de notre institution scolaire ».
L’association Education et Devenir parle d’un « retour en arrière ». « La notion fondamentale de projet d’établissement outil d’harmonisation et d’échange, a quasi disparu. Quel sera en effet le rôle d’un conseil pédagogique face à la reconnaissance insistante de la liberté individuelle de chaque enseignant en matière de discipline et de pédagogie ? Ne va-t-on pas accroître l’aspect « profession libérale » si souvent dénoncé du métier d’enseignant ?… Toute la dynamique issue de la création d’établissement autonome (EPLE – loi de 1985), de la loi d’orientation de 1989, du texte définissant les missions de l’enseignant (1997) et des innovations destinées à développer le travail en équipe et à donner du sens aux enseignements (TPE, IDP, PPCP) est remise en cause. La classe devient une « boîte noire » refermée sur elle-même, le tissu relationnel reliant la classe à l’établissement et à l’extérieur est déchiré ». Pour l’association, » à aucun moment on a perçu dans les propositions du ministre la compréhension du vécu de l’échec scolaire. A l’heure actuelle on ne sait déjà pas aider l’élève à surmonter le premier échec qu’il rencontre. Dans un parcours parsemé d’évaluations déterminantes ne va-t-on pas reléguer radicalement et plus tôt les plus démunis ?… L’école va-t-elle produire des êtres formatés s’adaptant parfaitement aux besoins économiques du moment ou former des citoyens engagés, autonomes et critiques ? »