Dans un
entretien accordé au Monde le 5 février, à deux semaines de la guerre contre
l’Irak et après la répétition d’incidents antisémites depuis le début de
l’année dans les établissements scolaires, Luc Ferry a exprimé nettement sa
volonté de lutter contre les dérives communautaristes et particulièrement
contre l’antisémitisme. « Je demande aux recteurs de veiller à ce qu’on
réponde avec la dernière énergie et la plus grande fermeté à tout ce qui
ressemblera à des actes antisémites ou racistes. J’ai l’exemple précis d’un
élève qui a fini par quitter son collège tant l’environnement devenait
intolérable. C’est rigoureusement inacceptable.. Il faut faire preuve de
fermeté. Le pire serait d’importer le conflit du Proche-Orient dans les
établissements, y compris dans les universités. Nous payons très cher une
dérive de l’ensemble de la société française vers le communautarisme… Face
à la montée des communautarismes, nous devons avoir trois types de réponses
: une réaffirmation sans faiblesse des principes républicains (appuyée sur
des sanctions appropriées lorsqu’ils sont bafoués) ; un dispositif de veille
relayé dans chaque académie pour aider les enseignants à prévenir les
situations de crise ou à les résoudre au mieux ; des enseignements qui
remettent en valeur l’apport de la laïcité dans le contexte de tensions
communautaires que nous connaissons. Cela veut dire qu’un individu est
respecté indépendamment de ses appartenances communautaires quelles qu’elles
soient ». Le ministre a condamné à nouveau les votes de boycott de
certaines universités. Très clairement il a condamné les nouvelles formes
d’antisémitisme. « Je pense qu’il y a aujourd’hui trois formes
d’antisémitisme en France. L’antisémitisme traditionnel, hitlérien, qui peut
exister dans certains partis d’extrême droite. Il est aujourd’hui résiduel
et en régression. Une deuxième sorte est en lien avec le conflit au
Moyen-Orient ; c’est l’antisémitisme le plus inquiétant, lié à la présence
d’une très forte communauté musulmane en France. Je ne dis évidemment pas
que les musulmans sont antisémites : leur religion, bien comprise, s’oppose,
au contraire, à toutes les formes de racisme. Mais force est de constater
que cela n’empêche pas les dérives. C’est pour cette raison qu’un professeur
d’histoire-géographie est parfois interrompu quand il donne un cours sur la
Shoah. Il y a enfin une tentation antisioniste qui vire parfois à
l’antisémitisme, bien qu’elle vienne souvent d’intellectuels de gauche,
démocrates, mais en désaccord avec la politique d’Israël. Cet antisionisme
d’extrême gauche dérape parfois et déculpabilise des pulsions politiques
déplaisantes. Ce fut le cas, je crois, à Paris-VI. Il faut savoir, là aussi,
y résister ».
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