Informations recueillies auprès de Françoise Nagy, proviseur, et Julien Poly, PLP lettres histoire
Le lycée François Arago de Villeneuve-Saint-Georges, polyvalent et situé en zone prévention violence, reçoit un public très diversifié comprenant 73 ethnies différentes. Une bonne soixantaine d’élèves, principalement des entrants en filière professionnelle, connaît de graves difficultés d’expression écrite et orale, révélées par un test de début d’année. Les élèves des filières générales reçoivent un soutien linguistique dans le cadre de l’aide individualisée, mais un soutien linguistique spécifique a été mis en place pour les élèves de CAP et de BEP depuis trois ans, dans le cadre d’un projet reconnu d’abord comme projet européen, puis également comme projet « Réussite pour tous ».
Ce soutien prend deux formes. Les élèves reçoivent un enseignement supplémentaire obligatoire en français de 2 à 4 heures par semaine, en deux sessions de 6 à 7 semaines, repris en aide individualisée. La thématique de travail est très liée à une étude de film (Amélie Poulain il y a trois ans, des productions internes depuis). La production vidéo annuelle est réalisée dans le cadre d’un atelier cinéma de 2 heures hebdomadaires, animée par un réalisateur de France 3, auquel participent les PLP de lettres. Chaque année, le groupe effectue un voyage d’une semaine, dans le Morbihan l’an dernier, dans le Morvan cette année. Ce voyage permet de souder le groupe et de travailler le scénario ou le tournage. La présence d’un professeur d’EPS permet de nombreuses activités de plein air. Pour compléter les activités d’écriture, un journal de bord est tenu et des cartes postales sont rédigées pour les camarades de classe restés au lycée.
Ce temps fort est très bien vécu par les élèves et les professeurs participants qui apprennent sur le tas à gérer le groupe. Des relations de confiance se nouent, qui faciliteront le travail tout au long de l’année. Le réalisateur lui-même se réjouit du dynamisme des élèves et de leurs capacités d’apprentissage. Les personnels des centres d’accueil, un peu inquiets au début d’accueillir des jeunes de « banlieue difficile » sont agréablement surpris du climat et de leur participation.
Le scénario de la vidéo de l’an dernier, l’Ile de l’oubli, a été construit à partir d’une nouvelle écrite par un élève, en réponse à un concours de nouvelles. Mêlant fantastique et réalité, elle met en scène un groupe de jeunes, victimes d’une secte qui les envoûte, les coupe de leur vie quotidienne et les entraîne un par un sur une île. Le tournage a été en partie réalisé sur l’île de Berber où s’est déroulé le séjour.
Cette année deux productions sont au programme. La première, tournée dans le Morvan par le réalisateur et les enseignants, présente les trajectoires des jeunes du groupe de leurs origines à l’entrée au lycée. Il n’a pas toujours été facile de faire s’exprimer devant la caméra ces élèves qui vivent parfois leur ethnie comme une tare, mais dans l’ensemble, cette galerie de portraits devrait constituer un documentaire très intéressant.
La deuxième production, fondée sur une publication de Ni putes, ni soumises, met un scène deux jeunes garçons qui ont une vue relativement négative des filles dont ils parlent en termes méprisants, tout en cherchant à protéger, voire à enfermer, leurs sœurs. Assistant par hasard à une répétition de spectacle, ils sont séduits par le talent et la vitalité d’un groupe de filles masquées auxquelles ils manifestent respect et admiration, avant de découvrir que l’une d’entre elles est la sœur de l’un d’eux.
Françoise Solliec