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L'école innovante

Cette année, le forum des enseignants innovants accueillait les écoles innovantes ; 80 en tout, réparties en deux catégories : les « innovative mentor schools » (écoles déjà dans le programme) et les « innovative pathfinder school » qui entrent dans le programme.

 

Le programme des écoles innovantes existe déjà depuis quelques années concrétisé au départ par deux écoles à Taïwan et à Philadelphie. Il essaime et se structure en réseau. Des mentors, experts en innovation pédagogique et en Tice, faciliteront la diffusion des bonnes pratiques entre les deux types d’écoles et accompagneront les unes et les autres pour  développer leur projet. Serge Pouts-Lajus, mentor  pour une grande partie de la zone francophone débute son rôle à Cape Town. La mise en réseau passe aussi par de tels évènements rassemblant des représentants des écoles. Tout au long du forum, des conférences et des ateliers sont prévues. Les écoles innovantes exposent leurs projets tout comme les enseignants innovants mais hors de toute compétition.

Côté français, deux écoles étaient présentes, toutes deux avec un projet fort différent. Régis Bracq est principal adjoint du Collège François Raspail de Carpentras. Il est venu en compagnie de Romain Desplanches, jeune enseignant en sciences physiques. Car pour Régis, l’innovation passe en premier lieu par les pratiques éducatives. Dans son collège, situé en quartier difficile, sujet à des accès de violence et miné par les problèmes socio-économiques de son environnement, il y a nécessité d’innover, de capter l’attention des élèves, de prendre en compte leurs difficultés pour les inclure dans l’école plutôt que de les voir sombrer. C’est ainsi que depuis cette année, des évaluations sont proposées en début d’année pour cerner les difficultés de chacun. Des groupes de remédiation par discipline et intégrant plusieurs classes sont ensuite proposées. Au collège Raspail, les innovations font florès, une quasi tradition animée par une équipe éducative impliquée dans son établissement. Pour accompagner et structurer l’innovation, Régis propose un véritable management de projet avec l’écriture du projet d’établissement à partir d’un diagnostic, un découpage en grands axes et en actions, attribuées ensuite aux enseignants en fonction de leurs compétences et de leurs envies détectées lors de l’entretien annuel. A chaque action, des critères de réussite sont affectées permettant ainsi un suivi. Pour Régis, suivre les actions permet aussi de repérer des difficultés rencontrées par l’enseignant et de l’aider à les résoudre puisqu’action et critères de suivi ont été définis et validés avec lui. Pour obtenir des financements supplémentaires et intégrer des réseaux d’établissement favorisant l’échange, le collège Raspail participe à des projets européens et nationaux. Il a été retenu pour le projet « innovative school » il y a peu misant là sur l’obtention d’outils permettant d’améliorer les projets.

Autre projet français, l’Ilot 104, ainsi nommé du fait de son emplacement dans le forum. Gilles Blanchard et Gilles Zuretti sont venus représenter ce projet qui est encore à l’état d’idée et qui n’a pas encore de nom. Le programme innovative school intègre différents types de projets, aboutis ou à l’ébauche, l’expérience  des uns devant enrichir l’avancement des autres. L’importance est dans l’innovation, la technologie et dans la vision systémique du projet, englobant toutes les dimensions de l’apprentissage et les effets de son environnement avec une prise en compte des questions de santé, de nutrition, de développement durable et même dans certains cas de sécurité et de violence scolaire. Les écoles innovantes se doivent aussi d’être numériques. Le projet « Ilot 104 » concerne une école primaire qui sera fondée à Montreuil en utilisant au mieux les nouvelles techniques de construction inspirée du développement durable (autonomie énergétique, terrasses et toitures végétalisées, respect des normes HQE, etc.). Ecole verte, elle sera aussi numérique. Le projet en est à son démarrage. Les partenaires sont multiples : mairie, inspection, parents, enseignants, etc. Dans ce type de projet, Microsoft s’invite comme un partenaire capable d’accompagner sur le volet numérique. La posture n’est pas simple et demande une clarté du langage. Certes, dans d’autres pays comme l’Angleterre, les partenaires industriels sont associés à la conception de nouveaux établissements aux côtés d’une communauté éducative englobant les parents. Cette association heurte encore les esprits en France dans un pays attaché au service public de l’éducation. Pour s’insérer dans ce type de projet, les représentants de Microsoft doivent œuvrer de diplomatie et prouver des intentions exemptes de velléités colonisatrices.

L’incursion de Microsoft dans le système éducatif est elle plus simple ailleurs ? Pas sur non plus, le changement de posture de la firme de Redmond n’est pas toujours perçu. On attend d’elle du matériel alors que ce qu’elle désire c’est offrir des services.

Deux établissements tunisiens présentaient eux aussi leur école innovante. Tous deux se sont lancés dans l’innovation, de façon modeste selon leurs représentants. La pédagogie précédant la technologie le qualificatif de « modeste » correspond principalement à une vitrine technologique peu développée. Le lycée Bourguiba de Tunis et le collège de Manzeh ont tous les deux la particularité d’accueillir des élèves de bon niveau après sélection.

Au lycée Bourguiba, l’équipe souhaite pousser les élèves à coopérer, à s’entraider pour amoindrir l’esprit de compétition et le stress qui en découle. Pas de souci de violence, d’incivilité dans le lycée nous précise son proviseur Mr Lelhajsadock, mais un mal être latent lié à la peur de l’échec ou plutôt de ne pas être le meilleur le tout dans une concurrence qui tend à devenir malsaine. Des cellules d’écoute sont organisées pour favoriser l’expression du malaise et la recherche de solution. Un forum a été mis en place et permet de poser des questions de façon anonyme. Ici, c’est l’entraide qui est stimulée. Un élève peut se retrouver dans la question, un autre proposer une solution, l’anonymat protégeant de l’aveu de faiblesse. Un espace médiathèque est en cours d’aménagement avec des accès Internet pour aller facilement sur le forum. Les travaux de groupe sont rendus obligatoires pour réaliser des documents, des actions en commun. Les actions associatives et solidaires sont particulièrement encouragées. La production commune en art plastique permet elle de réaliser ensemble ce qui ne pourra être attribué à chaque individu, de montrer les vertus créatives du collectif. Six enseignants portent et animent le projet qui a pour objectif d’alléger la compétition au profit de la coopération.

 

Le collège de Manzeh a déjà vu son esprit d’innovation récompensé par différents prix. L’école est récente. Elle propose à ses élèves des activités artistiques (théâtre, musique), associatives et sportives. Créé il ya trois ans seulement, elle a intégré les nouvelles technologies pour stimuler l’émergence d’une réelle communauté éducative incluant les parents. L’école produit une radio et un journal, utilise Facebook pour communiquer. Les Tice sont utilisés dans les classes avec notamment des projets s’appuyant sur Didapages. Le principe est d’utiliser à plein les moyens disponibles ; moyens encore trop faibles au regard de l’objectif pédagogique poursuivi notamment en matière de créativité et d’autonomie. Par exemple, le nombre d’ordinateurs est insuffisant pour palier au manque d’équipement personnel chez les élèves et les enseignants.

De leur venue à Cape Town, les quatre établissements attendaient des échanges. Ils ont parfois été freinées dans leur volonté par la barrière de la langue : difficile de participer aux ateliers et de retirer des idées des conférences lorsque seul l’anglais est utilisé. Au-delà de Cape Town, il est difficile de cerner leur intérêt à entrer dans la démarche : recherche de méthodes, de matériels, de soutien sur la face technique de l’école numérique ?

Dans le cas des écoles françaises comme tunisiennes, que les projets visent l’inclusion ou la socialisation, Microsoft devra moduler son discours à dominante anglo-saxonne pour pourvoir apparaitre dans les écoles francophones comme un véritable partenaire. Des enseignants innovants à l’école innovante, il y a un grand pas, celui qui va de l’acteur au système, systèmes éducatifs locaux et sphère de l’éducation internationale. En souhaitant reliant les uns aux autres, en s’affirmant comme un accompagnateur de projet, un partenaire du changement, Microsoft tente de franchir ce pas de géant. Selon les pays, gageons qu’il sera plus ou moins accepté, souhaité, accueilli. Microsoft apparaitra comme un acteur de premier plan ou comme un partenaire assis au fond de la pièce. Il sera intéressant d’observer ces tentatives.

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