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Aref2010 > Messages > Le travail, un passager clandestin ?
Le travail, un passager clandestin ?

dolzUn symposium, c'est un moment de rencontre entre plusieurs équipes de recherche qui travaillent sur des thématiques qui peuvent se croiser, tout en travaillant chacun "à leur façon", avec leur lexique,  leur terrain, leurs concepts, leurs méthodes. En introduisant le symposium long "Dimensions cachées, dimensions clandestines du travail", Patricia Remoussenard insiste sur l'intérêt de la transversalité. Sa contribution va être "discutée" (sous entendu passée à la moulinette...) par Yves Schwartz, dont la parole fait référence. Dans le même bateau, Pierre Imbert et Marc Durand, et Richard Wittorski, qui ont précédemment donné à moudre leur production écrite au "discutant".
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Yves Schwartz retient la dimension "polémique" de la proposition du symposium : si on s'en tient à la dimension apparente du travail et de la prescription, on ne comprend rien. Aborder la dimension cachée du travail, c'est dériver vers l'activité de travail des sujets. Au titre des convergences entre les approches des trois contributions, c'est la totalité de la vie dans son énigme qui entre dans cette problématique, le travail n'en étant qu'une des facettes. Les frontières entre travail et vie privée sont floues, la transversalité générale. On ne peut segmenter type d'activité par type d'activité. Même dans un colloque sur le travail éducatif,  refuserait-on de limiter l'éducatif à sas dimension éducative, s'amuse Y. Schwartz. "Si on manque cette porte d'entrée riche, on va limiter l'activité de travail à son aspect utilitaire, ce qui limite la force de l'analyse. Ainsi, comment définir la compétence au travail sans parler du travail caché ? 
Comment intégrer dans l'évaluation de la compétence cette dimension ? Comment définir le travail d'un emploi-jeune, en reléguant le relationnel au pourtour du légitime ? Rendre visible la part cachée de l'activité, c'est bien aussi valoriser, professionnaliser, reconnaître, en renouvelant l'approche par compétences.  C'est aussi rompre les conditions habituelles de la recherche "traditionnelle" qui pose le principe de sa nécessaire distance, de sa capacité d'expertise ou de sa capacité à accéder à l'essence des situations. Il faut au contraire d'abord se mettre d'accord sur ce qu'on a à faire ensemble, en formation ou dans l'analyse des systèmes. Ces "débats de norme" chers à Y. Schwartz sont ce qui rend le travail humain si problématique, si difficile à comprendre. (pour voir le détail de l'approche d'Yves Schwartz, voir  ce dossier)
dolzAlors, quelle conclusion provisoire ? Patricia Remoussenard revient sur le paradoxe : en s'intéressant à des univers du travail très éloignés des situations d'enseignement, on peut nourrir des ressources fécondes pour comprendre le travail enseignant, considéré comme un travail "comme un autre". "Désenclaver les métiers de l'enseignement pour mieux les comprendre, ça n'a l'air de rien, mais ça change tout, intervient Françoise Lantheaume (Lyon 2) de la salle. Les métiers émergeants dans la sphère éducative ont sans doute contribué à ce rapprochement". 


dolzDans la seconde phase du symposium, c'est à Françoise Lantheaume, Nicole Mencacci et Jean Clenet de passer sur le grill, à travers le regard de Frédéric Saujat.
S'intéressant aux différentes "traductions" qui doivent s'opérer dans la mise en oeuvre de la prescription, de l'écriture de la circulaire rédigée dans le cabinet ministériel à l'exercice de la situation d'enseignement dans la classe, Françoise Lantheaume a d'abord le souci de la description modeste des différentes dimensions de l'activité professionnelle, la "façon dont les gens travaillent" étant dépendante du cadre normatif qui définit leur activité singulière. "Or, l'évolution du cadre normatif amène des suprescriptions, à la fois dans ce qu'on demande de faire, et dans ce que chacun se dit qu'il doit faire pour être conforme". Elle invite à "découvrir le gisement des trésors cachés de l'activité", en se gardant des pièges de l'auto-surprescription. Nicole Mencacci s'intéresse aux "ingéniosités éducatives de l'instant", dans ce moment particulier où on doit résoudre une tâche sans avoir de solution toute faite, où l'enseignant doit à la fois se garder de la guidance excessive et de la non-intervention, sans "prêt-à-faire" ni "prêt-à-dire", saisissant le bon moment pour agir. Jean Clenet veut rendre compte des "pratiques peu visibles", entre le "cristal et la fumée", dans l'entre-deux entre le prescrit et le réel. Il voudrait "donner un statut scientifique et éthique au flou",  parce qu'il cache des choses qu'il n'est pas toujours nécessaire de dévoiler. S'il est un champ de recherche important en physique, pourquoi ne le serait-il pas en éducation ?

Tentant une "discussion", Frédéric Saujat extrait la notion d'"épreuve", de débat avec le milieu. "C'est la trace d'un sujet capable, créatif, acteur", qui ne se contente pas d'exécuter ce qu'on lui demande de faire, mais prend en compte "ce que ça lui demande de faire". Ni girouette, ni prisme qui dévierait les rayons lumineux, mais barreur d'un bateau à voile faisant des choix concernant l'activité et l'usage de soi. S'il y a du travail caché, c'est bien parce que le travail est une épreuve qui expose le sujet au vent de l'activité. Du coup, Saujat invite à dépasser la notion de "sujet" pour aller vers les dimensions collectives de l'activité, du travail.
A qui, et par qui le travail serait-il caché ? Et comment le rend-on visible, avec quels outils et dispositifs ? Frédéric Saujat invite les auteurs à creuser quelques questions : la prescription est-elle une contrainte extérieure, ou fait-elle l'objet de retraductions qui l'amènent aussi à pouvoir devenir ressource ? A quelles conditions ce qui peut être rendu public dans le collectif de travail peut l'être devant le chercheur ? Quelles raisons ont ceux qui travaillent à rendre visibles leurs pratiques cachées devant un intervenant ? Ont-ils une demande ? Et leur expérience est-elle verbalisable, comme se le demande aussi Philippe Astier ? A quelles conditions langagières ? Avec quelle définition de ce que serait "faire du bon travail" ?

Françoise Lantheaume profite de la perche tendue : "C'est d'autant plus important pour les métiers qui commencent, comme les assistants d'éducation, qui n'ont pas de normes antécédantes. Pour revenir aux enseignants, on constate à la fois du trop-plein et du "trop vide" quand a prescription leur dit "débrouillez-vous", voire leur donne un mandat contradictoire (transmettre un patrimoine et de la culture collective, mais en même temps individualiser ; faire du chiffre aux examens tout en tenant compte de chacun...) . On est en train de passer à un nouveau régime d'engagement, qui exige une plus grande plasticité, une plus grande capacité de réaction à l'inattendu, une énergie pharamineuse des individus pour combler les vides de la prescription qui risque de les épuiser si on n'a pas les espace de retravailler collectivement ce qui est essentiel de ce qui est accessoire. Sans l'aller et retour avec le collectif, la crise n'arrive pas à reconstituer de nouvelles normes de métier. Le chercheur ne révèle rien, il peut juste contribuer à remettre en mots et à faire le pas de côté. Je ne crois que modérément aux révélations..."

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