Voilà un drôle de débat pour Administration & Éducation, la Revue de l’AFAE. La question n’est-elle pas tranchée depuis que le ministère de l’Instruction publique a cédé la place à celui de l’Éducation nationale ? Ce numéro de la revue s’interroge plutôt sur les partenaires de l’École dans cette éducation et met en avant le rôle des collectivités locales. Et là on est bien dans les questions de gouvernance de l’École.
Claude Lelièvre a beau rappeler Jules Ferry, qui mettait le mot d’éducateur plus haut que celui d’instructeur, le débat Éducation vs Instruction reste actif dans le système éducatif français. C’est que Jules Ferry parlait du primaire, cette branche populaire et inférieure de l’École chargée de domestiquer le petit peuple. Or l’École française est plutôt l’héritière de l’autre filière, celle des lycées où, de la « 11ème » à la terminale, seule l’instruction règne. Un siècle plus tard cela nous vaut la conception particulière de la « vie scolaire » largement en charge des nécessités de l’éducation comme le rappelle Y Dufrenne dans un article sur les CPE. Un autre moment intéressant de ce numéro c’est l’article d’Alain Garcia qui analyse des règlements intérieurs d’établissements pour constater que bien peu sont éducatifs. Les règlements « sont surtout préoccupés du maintien de l’ordre » et pour cela « prescrivent une obéissance quasi inconditionnelle. Les possibilités offertes aux collégiens sont très restreintes ». « L’École rappelle leurs devoirs aux élèves mais peine à leur reconnaitre des droits et surtout résiste à les mettre en pratique » conclue-t-il.
La revue consacre plusieurs articles au rôle des collectivités locales dans le développement de structure d’éducation. Henriette Zoughebi, vice présidente de la région Ile-de-France, montre comment la question de l’égalité et de la mixité sociale et des genres est au coeur des projets régionaux et comment cela influe sur l’éducation. Ainsi la région a créé une dotation de solidarité pour les lycées pour aider ceux qui concentrent des élèves issus de famille populaire. La région développe des actions éducatives contre le décrochage, pour aider à trouver des stages en LP ou pour soutenir des projets d’élèves. Et c’est bien sur la région qui permet d’avoir des manuels scolaires.
Mais au final, « le caractère adolescent ne se forme plus à l’École » explique Anne Barrère. Or pour elle l’École ne prend pas assez en charge « l’éducation buissonnière », tout ce que les jeunes apprennent en dehors de l’École. Or avec le développement des TIC cette part ne cesse de grandir entrant en compétition avec les savoirs scolaires. « Comment espérer éduquer en faisant une impasse totale sur l’autoéducation, sans tirer parti de cette énorme implication adolescente ? ». Voilà qu’elle inverse le rapport traditionnel entre éducation & instruction ! Si l’éducation n’a jamais réellement trouvé sa place dans le secondaire et si l’instruction doit venir du dehors. Alors à quoi sert l’École ?
François Jarraud
Les dimensions éducatives de l’École, Administration & Éducation, n°2 2014, AFAE .
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