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Exhibition

Nous sommes rentrés hier dans le vif du sujet, la présentation des projets. Sur leur stand, les enseignants présentent, en un poster et en quelques phrases en anglais, une langue que tous ne maitrisent pas, des mois de travail, de réflexion, de réalisations. Trois juges passent pour évaluer leur projet et le sélectionner éventuellement pour la suite de la compétition.

 

Selon les pays, les motivations sont différentes, gagner ou simplement montrer, intéresser, échanger, prendre des contacts. L’aspect compétition nous semble à nous français étrange et dérangeant au premier abord. Ensuite, immergés dans l’atmosphère bouillonnante, l’exercice devient amusant, une méthode accélérée pour travailler son anglais.

Pour une bloggeuse, la présentation des projets est un véritable défi. Quels enseignants interroger, quelle idée décrire ? Les stands rivalisent d’imagination pour attirer mon regard mais je fuis les présentations stéréotypées, formatées par une furieuse envie de correspondre aux critères attendus par les juges et par Microsoft. Beaucoup mettent en avant les outils utilisés alors que je recherche la pédagogie et surtout la problématique, le questionnement qui a initié le projet. Ce qui m’intéresse c’est de comprendre comment et pourquoi un enseignant met au point une innovation, à quoi a-t-il été confronté, qu’est ce qui l’a motivé à sortir des sentiers battus et à consacrer des heures et des heures pour créer quelque chose de nouveau. A vrai dire, je me moque un peu de l’innovation, mot derrière lequel j’ai du mal à mettre une définition. Alors, je cherche quoi dans ces allées bruyantes ? Et bien beaucoup d’imagination et des récits d’enseignants.

 

Alors, je rends visite à des projets que j’ai déjà aperçus, que je connais par échanges électroniques interposés. Fatou Diouf, enseignante sénégalaise, a travaillé avec ses classes de 4e et de 3e pour sensibiliser les populations sur les dangers de la malaria. Ses élèves se sont documentés. Ils  ont étudié en biologie les origines de la maladie, les moustiques anophèles, les moyens de la prévenir, de la guérir. En mathématiques, ils ont établi des statistiques, construit des graphiques avec un tableur pour comparer l’importance de la maladie par zone géographique. Ils ont contacté les organismes de santé pour collecter des informations. Ils ont correspondu avec d’autres écoles pour enrichir leur dossier de façon collaborative. Puis, ils ont réalisé des outils de communication, vidéos et images pour mener une véritable opération de sensibilisation des populations avec le soutien du district.

Le projet de Fatou Diouf est il innovant ? Peu importe. Il inclut tous les mots clés d’un projet innovant pour le forum : travail collaboratif, ouverture vers la communauté, pluridisciplinarité, nouvelles technologies. Peu importe vraiment. Derrière la présentation de Fatou, on perçoit tout le travail mené simplement pour avoir les outils, trouver les ordinateurs, donner à ses élèves les moyens d’apprendre à utiliser les outils numériques. Elle a contacté des organismes comme USAID pour obtenir ces moyens. La préoccupation première, lutter contre la malaria et la réponse trouvée, celle de l’éducation et de la sensibilisation, sont totalement, illustrent parfaitement l’importance de l’éducation.

 

Kamal Essouafi a développé un outil numérique en astronomie. A partir d’une banque de données et d’images collectées auprès d’instituts, son DVD permet de visionner les systèmes, les planètes, les mouvements. L’élève est guidé par une aide audio. Il peut réaliser des quizz, exporter les données pour les réexploiter. Il possède un exemplaire du DVD qu’il peut emmener chez lui ou consulter dans un cybercafé.

Le guide de l’astronomie réalisé par Kamal Essouafi est esthétique et facile à utiliser, à mon sens une belle réussite technique. Est-ce une innovation ? Là aussi peu importe. Ce que souhaite Kamal c’est partager sa passion pour les étoiles avec les élèves, leur donner la possibilité de connaître les secrets des planètes au-delà des cours, de nourrir leur curiosité astronomique. Sans formation informatique de base, il a appris le développement multimédia. Il a pu s’appuyer sur le programme Genie mis en place par le gouvernement marocain pour développer l’usage des Tice. Son école de l’enseignement primaire, située dans une zone de montagne, est équipée d’ordinateurs. Son outil sera utilisé par d’autres écoles situées dans son district et sans doute dans des districts avoisinants. Il soulève déjà l’intérêt de la presse marocaine, Kamal Essaoufi l’a présenté il y a quatre jours lors d’une conférence.

Alors, une innovation le guide de l’astronomie ? A mon sens oui, il amène de nouvelles pratiques, une nouvelle approche de la science dans l’école marocaine et favorise l’acquisition de compétences numériques.

Autre contexte, autre pays mais même continent, Peter de Lisle, enseignant sud africain s’intéresse au thème de la biodiversité. Il demande à ses élèves de 14 ans d’imaginer des animaux capables de s’adapter à un environnement donné. Chaque élève créé son animal sur Photoshop, explique ses choix morphologiques en se documentant dans la base de connaissances rassemblées sur une plateforme moodle et raconte ensuite l’histoire de sa créature. Le travail est évalué selon une grille prenant en compte les différentes compétences mobilisées. Connaissances en biologie, en géographie, manipulation de l’ordinateur, techniques d’expression, Peter fait visiter à ses élèves nombre de disciplines pour aboutir à un travail créatif. Le tylophane imaginé par un élève a des ailes en argent pour que brillantes sous la lune, elles attirent les insectes qui le nourrissent.

Peter De Lisle est un habitué de l’innovation. Il avait proposé il y a trois ans un projet sur le pluriculturalisme et la tolérance, projet convaincant mais qui n’avait pas retenu l’intérêt du jury. Ses ingrédients de base sont la créativité, la pluridisciplinarité et le numérique. Peter cherche les moyens d’intéresser les élèves à une question vive, de les motiver à aller plus loin, ici à comprendre les enjeux de la biodiversité, l’impact des changements climatiques sur les animaux, la nécessité pour eux, et parfois l’impossibilité de s’adapter. Ce projet est le dernier qu’il mènera car l’an prochain, il deviendra accompagnateur, « mentor », pour aider les enseignants de son école à concevoir et mettre en œuvre des innovations pédagogiques.

Une de ces trois innovations retiendra t’elle l’attention du jury ? J’aimerais dire peu importe mais ce serait pur mensonge. Pour chacun d’entre eux, la reconnaissance de leur travail est d’importance.

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