« La décision des autorités administratives de réviser, ou non, la carte scolaire et de réguler, ou non, les demandes de dérogation a eu un impact indéniable sur les phénomènes locaux de concurrence scolaire, et donc sur le fonctionnement et l’évolution des collèges classés en ZEP. Et ce, dès les années 1990. La seule implantation géographique ou l’opposition centre‑périphérie ne constituent pas les éléments explicatifs les plus pertinents pour comprendre les situations exposées ici ». Dans un article de la revue Sociologie (n°2 volume 8 2017), Lydie Heurdier (Escol Paris 8) pointe l’archéologie de l’éducation prioritaire.
Dans une étude locale très détaillée menée sur 3 départements, elle montre l’impact de décisions administratives prises bien avant la politique d’éducation prioritaire. Elle pointe aussi celles du privé qui contribuent aussi à la ségrégation. Mais l’article montre surtout l’intérêt d’une gestion administrative locale. « Les phénomènes sociaux liés à des choix d’organisation spatiale doivent être réellement pris en compte par les responsables académiques, au risque de pénaliser davantage les établissements les plus fragilisés socialement. Toute modification des secteurs scolaires demande donc du temps, des études et des réflexions préalables, des consultations avec tous les partenaires concernés ; leurs intérêts divergents, voire pouvant même être antagonistes, il s’agit bien de trouver des compromis locaux. Si cette démarche paraît désormais indispensable, les autorités éducatives doivent de plus réguler et veiller à maintenir une certaine équité grâce à un pilotage permanent et effectif de leurs établissements ».
Pour elle , « la différenciation entre collèges n’est pas seulement le reflet des ségrégations résidentielles. Il existe bien aussi « des relations d’interdépendance compétitive » entre établissements : compétition pour maintenir ou augmenter les effectifs, pour accueillir les bons élèves. Relations compétitives qui accentuent les inégalités de réussite, creusent les écarts entre groupes sociaux mais affectent également les apprentissages de tous les élèves. Le seul classement en éducation prioritaire a été largement insuffisant pour contrer des processus urbains et sociaux non régulés. »
