Amoureux
des langues, Philippe Godé est conseiller pédagogique en Lozère. En une
dizaine d’années, il a fédéré un important réseau qui donne sens à
l’apprentissage de l’anglais, dont la partie émergée prend la forme de
rencontres annuelles pour 1500 élèves.
1. Quel a été l’origine (la personne,
l’évènement, la rencontre…) de votre projet ?
J’ai initié le projet pluridisciplinaire axé autour d’un pays
anglophone en 2003, sur la circonscription de Florac (Lozère) où je
travaille comme conseiller pédagogique depuis septembre 1999. La toute
première approche du projet mettait en avant la valorisation des acquis
des élèves en anglais, seule langue enseignée à l’époque à l’école,
pour des raisons de continuité des apprentissages dans nos petits
collèges de Lozère qui ne proposaient que cette première langue
étrangère. Les programmes de 2002 venaient de paraître, instaurant de
manière définitive (et obligatoire) l’enseignement des langues vivantes
étrangères dans les écoles primaires. Je me souviens m’être
interrogé sur le sens que pouvait bien donner un jeune élève Lozérien à
l’apprentissage de la langue d’un pays lointain… Mon rôle de
conseiller pédagogique est de « soutenir
la mise en œuvre d’activités nouvelles et d’accompagner les équipes
d’enseignants dans la réalisation de ces activités. » Ma
formation (DEUG Allemand, Certificat de Didactique FLE) et mon parcours
professionnel (six ans en Allemagne, deux ans aux États-Unis) m’avaient
préparé à travailler avec les enseignants sur la question de
l’enseignement des langues vivantes étrangères.
Aussi, suite à l’encadrement d’un stage d’enseignants LVE en février
2002, j’ai proposé aux classes de cycle 3 de la circonscription une
rencontre intitulée « An english day
together »,
préparée en amont selon mes propositions, et clôturée le 03 juin 2003
par une journée de rencontre à Florac. Tous les « ingrédients » du projet
actuel s’y trouvaient déjà : un spectacle issu des différentes
préparations de chaque classe participante, une prestation sur scène
par une artiste anglophone, la conception de panneaux documentaires sur
le pays pour les rassembler dans une exposition, des jeux et des
activités conduits par des bénévoles anglais résidant en Lozère. Le
succès fut immédiat (360 élèves) et les enseignants ont réclamé une
suite au projet.
Pour ne pas « tourner en rond » autour de Big Ben et de la Reine
d’Angleterre, j’ai décidé de conserver la structure initiale et de la
décliner à la sauce… australienne (2004). La suite, c’est le parcours
à travers tous les pays anglophones (États-Unis, Irlande, Canada,
Nouvelle -Zélande, Afrique du Sud, Ecosse, Angleterre, et en 2012,
l’Inde).
http://ecoles48.net/elve/anglais/index.html
Le projet s’est étoffé au cours du
temps, il est devenu un véritable
travail d’équipe (de la circonscription), avec Thierry Vigroux (IAI),
Eric Beauclair (conseiller pédagogique EPS) et depuis 2 ans avec Sigrid
Connor, qui occupe depuis deux ans le poste de conseiller pédagogique
départemental « Langues Vivantes » en Lozère et qui a développé le projet
au niveau départemental. Aujourd’hui, ce sont environ 1500 élèves de la
Lozère qui utilisent les outils que nous mettons à leur disposition, en
vue de rencontres de secteurs.
Le projet 2012 :
http://ecoles48.net/elve/pays_cedes/inde/index.htm
http://ecoles48.net/elve/pays_cedes/videos_spectacles/
Jean-Pierre Martin, Inspecteur de notre circonscription en 2009-2010, a
« exporté » le concept du projet pluridisciplinaire autour des langues
dans sa nouvelle circonscription de Montpellier : son équipe a axé le
travail autour des ouvrages de littérature de jeunesse : http://www.ecoles.montpellier.fr/elv/
2. Pouvez-vous décrire, du point de
vue des activités menées avec les élèves, une situation dans laquelle
vous avez vu un impact positif sur les apprentissages scolaires ou de
la mobilisation des élèves ?
L’impact sur les apprentissages des élèves est observable lors des
journées de rencontres annuelles, qui ont désormais lieu juste avant
les vacances de printemps (productions, motivation, ouverture sur une
autre culture, acquisition de connaissances linguisitques, utilisation
des TICE, etc.).
3. Selon vous, quel est/a été la plus
belle réussite de ce que vous avez pu mettre en oeuvre ?
Chaque partie du projet comprend des aspects intéressants. Le volet
linguistique (anglais) est très riche : je pense que le jeu « Who wants
to win a sweetie », qui est un « Quizz » inspiré du jeu télévisé « Qui veut
gagner des millions ? » est une réussite particulière. En effet, il est
conduit uniquement
en langue anglaise
(et par des anglais résidant en Lozère !) sur des questions qui n’ont
jamais été vues ou entendue précédemment (en revanche, bien sûr, les
élèves ont préparé le jeu par l’acquisition guidée de connaissances).
Cela signifie que les élèves sont placés dans la situation de
communication réelle avec un anglais, et qu’ils sont amenés à
comprendre la question qui leur est posée sans l’avoir « étudiée »
auparavant d’un point de vue lexical ou syntaxique.
Le jeu « Who wants to win a sweetie ? »
:
http://ecoles48.net/elve/pays_cedes/inde/india_who_wants.zip
4. Et a contrario, une difficulté
persistante, un écueil que vous n’aviez pas mesuré complètement ?
Les difficultés sont plutôt d’ordre
matériel (gestion de grands
groupes, moyens financiers, temps de rencontre limité en raison des
longs déplacements des écoles vers Florac).
Depuis deux ans, nous encourageons la mise en place de rencontres
décentralisées, par secteurs géographiques.
5. Pouvez-vous nous faire partager une
anecdote significative d’un comportement, d’une réaction d’élève(s) au
cours d’une des phases de votre travail ?
Les élèves sont amenés à se plonger dans une autre culture pendant
plusieurs semaines : histoire, géographie, habitudes alimentaires, jeux
traditionnels et sports, art, musique, danse, chant, symboles,
traditions, personnages célèbres, etc.
Écoutez par exemple, le témoignage sur « Radio Gazouille » (Radio des
écoles de Lozère) concernant le spectacle de danse de l’artiste Flora
DEVI lors de la rencontre du 3 avril 2012 à Florac : http://www.radiogazouille.net/
(cliquer sur « coup de coeur »)
6. Si c’était à refaire, pouvez vous
citer une phase du projet que vous pourriez modifier pour le rendre
plus « efficace » pour les élèves ?
Nous améliorons actuellement le travail sur l’apprentissage du lexique
anglais en proposant aux enseignants des outils multimédias utilisables
sur TBI ou sur les micro-pc largement disponibles dans nos petites
écoles dans le cadre de l’ENR.
http://ecoles48.net/elve/pays_cedes/inde/jeux_clic/index.htm
D’autres outils sont en construction ou à l’étude (des générateurs de
jeux construits par Thierry Vigroux (IAI), utilisation de « Didapages »
ou « ActivInspire »)
7. Un point de vue, une remarque que
vous souhaiteriez partager avec les lecteurs du Café Pédagogique ?
« A la découverte de l’Inde » relève de la pédagogie de projet. C’est le
fruit d’un travail d’équipe de formateurs, pour susciter un travail
d’équipe dans les écoles. C’est un projet fédérateur, ce qui explique
qu’il existe depuis si longtemps. J’aime à penser que les élèves qui
ont participé à la première session de 2003 sont actuellement à
l’université. Je me demande parfois ce qu’ils ont gardé en souvenir de
ces moments forts : leurs premiers contacts avec un « vrai » anglais ?
Leurs premiers pas sur une « vraie » scène de spectacle » ? Leurs
premières découvertes d’une culture différente de la leur ?
Si
par hasard ils me lisent, qu’ils n’hésitent pas…