Les députés en panne de confiance devant la loi Blanquer 

Fini le temps des questions sympas. Le 23 janvier JM Blanquer a du affronter des questions précises et pointilleuses des députés de la commission de la culture et de l'éducation de l'Assemblée sur le projet de loi sur "l'école de la confiance". Au terme d'une audition qui a duré 2 heures et demi, le ministre a du prendre des engagements sur des points importants du projet de loi : le fameux article 1 mais aussi la suppression du Cnesco et les futurs établissements internationaux.

 

Un ministre prêt aux concessions

 

"Je suis là pour faire évoluer le texte", affirme d'emblée JM Blanquer devant la commission de la culture et de l'éducation de l'Assemblée. Le ministre sait qu'il peut compter sur les deux rapporteures du projet de loi, deux députées LREM. Mais les députés vont poser des conditions pour un éventuel soutien au projet de loi. Parmi les nombreux points d'un texte qui est un fourre tout, les députés se sont focalisés sur l'article 1, les établissements internationaux, l'avenir du Cnesco et de l'évaluation de l'école et la formation des enseignants.

 

Blanquer prêt à réécrire l'article 1

 

Le ministre était bien sur attendu sur l'article 1. Le 12 décembre le Café pédagogique a révélé que cet article ambitionne de museler l'expression des enseignants sur les réseaux sociaux. "Il serait important d'apporter des précisions", demande la députée socialiste G Pau-Langevin. Caroline Fiat (LFI) évoque "l'ironie des enseignants" devant le mot confiance inscrit dans cet article.

 

JM Blanquer explique que l'étude d'impact de la loi, fournie par ses services, a trahi ses intentions. "Je suis prêt à revenir (sur cet article) pour éviter un malentendu", affirme le ministre. "Il est très important d'avoir dans cet article l'affirmation de l'importance de la confiance".

 

Pour le Cnesco l'indépendance du pauvre ?

 

L'avenir du Cnesco mobilise aussi plusieurs députés. V Bazin Malgras (LR) craint le remplacement du Cnesco par un conseil trop proche du ministre. G Pau Langevin, tout comme Maxime Minot (LR) demandent ce que va devenir le Cnesco. R Juanico, qui dans un récent rapport a demandé le renforcement du Cnesco, pose la question de l'indépendance de la nouvelle agence d'évaluation voulue par JM Blanquer.

 

Là aussi, JM Blanquer louvoie. Il "salue le bilan du Cnesco" et promet que celui ci aura davantage d'indépendance encore quand il sera devenu une chaire du Cnam. Un nouveau statut qui va le couper des services du ministère et qui pose la question de l'avenir de ses moyens. L'étude d'impact de la loi Blanquer prévoir que les moyens humains du Cnesco aillent à la nouvelle agence d'évaluation.

 

JM Blanquer est prêt aussi à faire évoluer la composition de cette dernière pour lui donner davantage d'indépendance. Il est prévu que 8 membres sur 12 soient nommés par lui dont 4 seront des fonctionnaires du ministère..."La future agence ne sera pas une bureaucratie" promet JM Blanquer. Mais là aussi l'étude d'impact parle de près de 2000 évaluateurs avec déjà tous les corps d'inspection... La question de la publication des résultats des évaluations d'établissement se noie sous les promesses d'uen évaluation bienveillante. Portant les effets de la publication des indicateurs des lycées sur la concurrence entre établissements et même le marché immobilier sont bien connus alors qu'elle n'a pas aidé en réalité les familles à détecter les lycées apportant une réelle plus value.

De nouvelles écoles pour les plus favorisés

 

Et c'est justement cette question qui s'invite avec les articles consacrés aux futurs établissements internationaux dans la loi. On comprend vite en écoutant JM BLanquer qu'il s'agit d'attirer des entreprises étrangères, par exemple venues de Londres, en offrant aux cadres de ces entreprises des écoles publiques internationales sur mesure. Plusieurs députés demandent que ces écoles ne soient pas des ghettos de riches et qu'elles soient mixtes socialement. "J'ai entendu la remarque sur les enjeux de mixité sociale", répond JM Blanquer. Le ministre serait prêt à accepter que ces écoles soient ouvertes aux enfants du quartier en maternelle. L'expérience de certaines sections internationales à Montpellier montre pourtant que la porte se referme plus tard, sous prétexte de ne prendre que les enfants forts en langues. Un critère qui camoufle un fait beaucoup plus simple; les familles favorisées veulent être entre elles dans une école faite pour elles. Et c'est bien cela le moteur de leur attractivité...

 

Consensus sur l'obligation scolaire à 3 ans ?

 

L'abaissement de l'obligation scolaire à 3 ans fait aussi réagir les députés. Le principe en est contesté par G Pau-Langevin qui souligne le fait que les 2% d'enfants non scolarisés en maternelle à 3 ans sont soit des enfants isolés soit des enfants avec un lourd handicap. Ces questions amènent JM Blanquer à préciser ses vues sur certains points. Par exemple il précise qu'il envisage de créer une certification pour enseigner en maternelle. Il s'engage à ce que l'Etat compense auprès des communes les frais engagés par la loi. Ils sont évalués à 100 millions dont la moitié ira aux établissements privés, une réalité que les députés n'ont pas relevé.

 

La réforme de la formation de enseignants

 

Reste la réforme de la formation des enseignants. Le ministre assume d'imposer ses décisions aux futurs INSPE qui remplaceront les Espe. "On doit garantir le même nombre d'heures de formation sur la lecture à tous les enseignants... L'education nationale doit avoir un impact sur ce qui se passe dans les structures qui alimentent le système". Pour lui ce n'est pas une reprise en mains mais une question de logique. On comprend que toutes les Espe devront proposer la même formation et qu'en même temps la moitié de  leur personnel sera remplacé par des enseignants de terrain choisis par l'institution, plus obéissants et moins onéreux que des universitaires. Sur ce point le ministre ne bouge pas d'un pouce.

 

Il évoque aussi le pré recrutement d'enseignants auprès des assistants d'éducation. Pour lui il s'agit d'élargir le vivier de recrutement des enseignants et aussi d'aider des jeunes défavorisés à faire des études. Paul Molac lui fait remarque que les étudiants des IPES étaient payés que pour étudier. Mais le ministre estime que les jeunes prérecrutés disposeront de 700 euros par mois cumulables avec une bourse. Pour lui ce sera "très attractif". Il précisera dans les débats sur la loi le devenir précis des concours.

 

Le risque d'annualisation des services

 

A la question de la députée Géraldine Bannier sur l'élargissement des expérimentations au temps de service des enseignants, le ministre répond qu'effectivement ils pourront faire l'objet d'expérimentation "sur la base du gagnant gagnant". En réalité le projet de loi va faire sauter les garanties qui permettent aux enseignants de s'opposer à une expérimentation. Le nouveau système ouvre la voie à l'annualisation des services.

 

F Jarraud

 

Sur l'article 1

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Par fjarraud , le jeudi 24 janvier 2019.

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