L'Ecole entre Fillon et Le Pen 

Après un Forum des enseignants innovants particulièrement réussi, l'annonce de la victoire de F Fillon à la primaire de la droite est un triste réveil. Voilà que se dresse la perspective d'un second tour des présidentielles où il faudrait choisir entre F Fillon et M Le Pen. Pour l'Ecole et pour les enseignants, après la Refondation, c'est la perspective du Grand Recul.

 

L'école de la revanche de M Le Pen...

 

  Le programme de M Le Pen pour l'Ecole c'est l'école de la revanche. Validées par la candidate le 22 septembre, les 100 propositions du Collectif Racine additionnent des mesures à visée assimilationnistes, une nébuleuse d'intérêts corporatistes jusqu'au détail, avec des mesures qui ramènent l'école aux années 1960. On appréciera ainsi la proposition 43 qui veut "instaurer le cours magistral à tous les niveaux dans toutes les disciplines", ce qui changerait un peu les maternelles... La proposition 3 proscrit "les pseudos enseignements ludiques". La suivante fait de la méthode syllabique la seule méthode autorisée. La 44 instaure partout la note.

 

Mais les propositions portent aussi les corporatismes les plus recuits, que l'on sent fignolés dans les détails depuis des lustres.  Pierre Miscevic, professeur de lettres en Cpge plaide pour créer un corps de "professeurs d'excellence" enseignant... en CPGE. Marc Chapuis, professeur de maths en CPGE présente une refonte de la filière S : on élimine 30 000 élèves indignes d'être là, puis on crée 3 sous filières de façon à dégager un noyau de mathématiciens limité à 15 000 élèves...

 

Ou l'école de 1914 de F Fillon ?

 

 On ne sait quel Fillon choisir. Le François Fillon qui mit en application la loi sur  " le rôle positif" de la colonisation en 2005, ou le plus durable des premiers ministres (après G Pompidou) qui supprima 80 000 postes d'enseignants entre 2007 et 2012 ?

 

Le programme du candidat Fillon va encore plus loin pour 2017. Le point essentiel est la suppression de 500 000 emplois de fonctionnaires. Alors qu'au bout du quinquennat on arrive tout juste à retrouver l'encadrement profs / élèves de 2008, la suppression de 150 000 ou 250 000 enseignants ne peut aboutir qu'à des taux d'encadrement des élèves qui n'ont encore jamais été vus. Mais c'est cohérent avec l'allongement de 24% du temps de travail des enseignants en établissement promis par F Fillon. Vu la réalité des établissements ce temps là ne pourra être que devant élèves.

 

Homme d'ordre, F Fillon veut aussi donner aux directeurs et chefs d'établissement le droit d'embaucher, évaluer et licencier les enseignants. Ils décideraient aussi de la dotation horaire des disciplines. Dans le secondaire les enseignants de 6ème et 5ème seraient polyvalents : un seul enseignant pour les sciences et un seul pour les lettres et l'histoire géographie. C'est d'ailleurs bien suffisant puisqu'on n'enseignerait plus l'histoire mais un "récit national" imaginaire...

 

Mais le programme Fillon c'est surtout pour les élèves la sélection permanente et l'élimination des plus faibles par l'orientation précoce vers l'apprentissage. De surcroit, la voie professionnelle quitterait l'éducation nationale pour être confiée aux régions.

 

Un programme irréalisable

 

On a évidemment du mal à imaginer que certaines de ces propositions puissent être mises en application. Pour ceux qui veulent faire travailler les enseignants davantage , il faut peut-être rappeler que les professeurs du 1er degré font déjà nettement plus d'heures d'enseignement (environ 200 de plus) que la moyenne de leurs collègues de l'Ocde. Ou que ce n'est peut-être pas par hasard que les enseignants du 2d degré, très mal payés, boudent les heures supplémentaires : avec les préparations et les corrections , ils dépassent déjà les 44 heures hebdomadaires selon une évaluation officielle de la Depp. Impossible aussi, notons le, de demander aux professeurs d'histoire d'enseigner autre chose que l'Histoire...

 

Il y a d'autres réalités à rappeler au moment du choix d'un dirigeant pour la France. Contrairement à ce que croient beaucoup d'électeurs, la France a la particularité d'avoir la main d'oeuvre la moins formée des grands pays  développés, selon une étude OCDE sur les compétences des salariés. Et cela a surement à voir avec ses difficultés économiques actuelles. Cela provient du fait que pendant longtemps elle a fabriqué très peu de bacheliers. En 1980, seulement un jeune sur quatre avait le bac, seulement 43% en 1990. Cela alors qu'on atteignant 80% aux Etats Unis à la même date par exemple. De plus la formation professionnelle en France ne compense pas ce handicap de départ.

 

Alors que l'on commence tout juste à rattraper ce retard et qu'une nouvelle dynamique est insufflée dans le système éducatif, la politique Fillon ne ferait pas sombrer que l'Ecole mais aussi notre place dans la compétition internationale.

 

La revanche sociale

 

Sur le plan social, pour atteindre les 80% au bac, il faut bien sur hisser les enfants des familles modestes vers le lycée. Evidemment cela demande plus de moyens que pour les enfants des familles favorisées.

 

C'est bien là qu'est la logique du choix de baisse des moyens de l'Ecole. Diminuer l'investissement dans l'éducation, c'est chasser de l'Ecole et de la promotion qu'elle permet les enfants des classes moyennes et populaires. Dans quelques jours, les résultats de Pisa 2015, qui évaluent les enfants entrés en CP en 2007 qui n'ont connu que les programmes de 2008 à l'école et au collège et les réductions de postes, nous diront ce qu'ont donné les années Sarkozy - Fillon en matière d'éducation.

 

Les programmes des deux candidats qui semblent en tête pour la présidentielle actuellement sont déraisonnables et nuisibles pour l'Ecole. Pour les enseignants, ils signifient une dégradation violente de leur statut et de leurs conditions de travail. Il est encore temps de travailler à barrer la route à ces politiques.

 

François Jarraud

 

Programme Fillon

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Par fjarraud , le lundi 28 novembre 2016.

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