Philippe Cosentino : La révolution géologique  

Le logiciel Tectoglob 3D s’est imposé rapidement dans les salles de classe pour comprendre la géologie de notre planète. Faire de la tomographie en 3D ou voir des foyers sismiques par transparence sur le globe sont désormais possibles avec ce logiciel accessible en ligne. Philippe Cosentino, enseignant de SVT au lycée Rouvière à Toulon (83), à l’origine du logiciel, explique les possibilités de ce bijou technologique qu’il améliore sans cesse avec les données de la NASA. Collégiens et lycéens peuvent ainsi manipuler à leur guise ce globe virtuel  et « y superposer des calques, des repères ou y réaliser des coupes topographiques, sur lesquelles figurent les foyers sismiques ».

 

Le nom du logiciel fait immédiatement penser à Tectoglob dont Jean-François Madre est l’auteur , pourquoi ce choix ?

 

Je suis un grand fan des logiciels de JF Madre (Mesurim, Geniegen etc.), et je souhaitais lui rendre hommage en reprenant le nom de son logiciel (avec son accord). C’est aussi une façon d’indiquer aux collègues que Tectoglob3D s’inscrit dans la continuité de Tectoglob, qu’il en reprend un peu l’ergonomie.

 

Que peut-on faire avec le logiciel en ligne Tectoglob3D ?

 

En gros, ce que l’on pouvait faire avec les autres logiciels usuellement utilisés en classe, mais pas uniquement. On peut l’utiliser comme un globe virtuel, un peu à la façon de Google Earth, y superposer des calques ou des repères, et même dessiner sur le globe. On peut également y réaliser des coupes topographiques, sur lesquelles figurent les foyers sismiques, le Moho ou la LVZ, des coupes tomographiques également, étudier les données GPS... Il permet également de visualiser des sismogrammes, de les traiter, de pointer les temps d’arrivée des ondes sismiques etc. Bref, il se veut la synthèse de plusieurs logiciels préexistants, tels que Tectoglob, Educarte, Ondes P, ou Tomographie sismique.

 

Quels sont les avantages du logiciel par rapport à d’autres ressources du même acabit ?

 

Pour commencer, il fonctionne en ligne, il n’est ainsi pas nécessaire de disposer du logiciel pour l’utiliser. Mais pour ceux qui ont une connexion défaillante, il existe également en exécutable pour Windows, Mac et Linux, il existe même une version Android, pour tablette, téléchargeable sur le Play Store.

 

Ensuite, Tectoglob3D regroupe en un seul logiciel ce que plusieurs autres logiciels proposaient, parfois en croisant leurs possibilités, créant une synergie. Mais pas seulement, il propose de nombreuses fonctions inédites, comme la possibilité de faire de la tomographie en 3D, ou de voir les foyers sismiques par transparence sur le globe.

 

Enfin, il a été l’objet d’une collaboration avec l’équipe de l’UMR GéoAzur (Université la Côte d’Azur), ce qui lui ouvre l’accès à la banque de données sismiques du site Edumed Obs. Je remercie d’ailleurs au passage Julien Balestra et Jean-Luc Bérenguer pour leur aide.

 

L’étude de données sismologiques est au programme en 1ère. En quoi Tectoglob3D est-il un atout pour l’élève ?

 

Le module sismologique de Tectoglob3D a été bâti autour du modèle PREM, qui apparaît 4 fois dans le programme de 1ère. J’ai fait en sorte que ce modèle ne soit pas une « boîte noire », que les élèves aient pleinement conscience que les prévisions de temps d’arrivée, ou encore les tracés de rais sismiques, découlent de ce modèle (qu’il est d’ailleurs possible d’afficher).

 

De plus, la mise en évidence de la zone d’ombre est grandement facilitée, étant donné qu’il est possible d’avoir sur le même écran les sismogrammes et leur projection sur une coupe du globe montrant les rais sismiques (à la façon du logiciel Ondes P de JF Madre). Tout cela devrait faciliter le travail de l’enseignant.

 

Mais ce serait dommage de cantonner Tectoglob3D au lycée. Beaucoup de fonctionnalités, comme la possibilité de dessiner directement sur le globe, ont été pensées pour le collège. J’ai d’ailleurs davantage de retours d’enseignants de ce niveau !

 

D’où viennent les données utilisées à mettre au point le logiciel ?

 

La plupart viennent de la NASA, qui bien heureusement met à disposition du public ses données librement. Pour le reste, les sources sont très diverses, et sont citées dans le menu « A propos du logiciel ». Il est d’ailleurs intéressant de souligner qu’ont devrait plutôt parler de « modèles » ; pour la profondeur du Moho, pour les anomalies de vitesse etc. ce sont des modèles globaux, qui sont certes bâtis à partir de données, mais qui comportent leur lot d’hypothèses et de corrections.

 

De nouvelles options sont-elles envisagées ?

 

Le module sismique va être étoffé. En particulier, il sera bientôt possible d’enregistrer des audiogrammes (la fameuse manipulation avec des capteurs piézoélectriques), et de les traiter comme des sismogrammes. L’exploitation des tracés sera je l’espère bien plus intuitive qu’avec Audacity, notamment lorsqu’il s’agit de déterminer le temps (de l’ordre de la milliseconde) qui sépare l’arrivée du train d’onde sur les 2 capteurs.

Pour le reste, je suis à l’écoute de la communauté (essentiellement via Facebook), et je rajoute les fonctionnalités au fil des désirs de mes collègues.

 

Quel est votre regard sur la place accordée aux géosciences dans les nouveaux programmes d’enseignement scientifique et de SVT ?

 

Si à titre personnel je prends de plus en plus de plaisir à enseigner les géosciences, et si je suis convaincu de l’intérêt méthodologique immense qu’il y a à traiter des problématiques géologiques, je vois bien que ce n’est pas forcément le cas de nos élèves. Avec la réforme, un grand nombre, si ce n’est la plupart, des élèves qui prendront SVT en terminale se destinent à faire des études de santé (les autres seront nombreux à abandonner les SVT au profit de Maths-Physique chimie). Or plusieurs m’ont dit qu’ils ne prendront pas notre discipline parce qu’ils ne s’y retrouvent plus, pas assez de physiologie, pas assez de santé humaine … et trop de géologie à leur goût. Du coup, dans cette nouvelle configuration que nous impose cette réforme, je ne suis pas convaincu qu’il soit par exemple plus important pour nos élèves de connaître la différence entre une dorsale lente et rapide par rapport au fonctionnement du rein, du cœur, ou des poumons (jamais abordés au lycée).

 

Même chose pour l’enseignement scientifique, qui de plus, concerne également des élèves ne se destinant pas à des études scientifiques. Certaines notions, tels que la structure des cristaux, ne me semblent pas aussi indispensables que des notions élémentaires de biologie humaine qui font cruellement défaut.

 

Propos recueillis par Julien Cabioch

 

Le logiciel Tectoglob3D

Article sur Tectoglob3D

Observatoire de l’Environnement Méditerranéen à but Educatif

 

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Par fjarraud , le mardi 11 février 2020.

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